L’entreprise familiale Cycle Néron souffle ses 50 bougies cette année. (Photo: courtoisie)
FOCUS RÉGIONAL: MONTÉRÉGIE. La crise de la COVID-19 n’aura pas empêché le printemps de s’installer, au plus grand bonheur des détaillants de vélo qui réalisent l’essentiel de leur chiffre d’affaires pendant cette saison. «Notre année se fait entre mars et juin. C’est surtout pendant cette période que les gens dépensent chez nous», affirme Chloé Néron, directrice des opérations chez Cycle Néron, une chaîne de magasins de vélos présente entre autres à Brossard, à Boucherville et à Saint-Lambert.
L’annonce, à la fin mars, de la fermeture des commerces non essentiels pour trois semaines représente donc un coup dur pour l’entreprise familiale, qui souffle ses 50 bougies cette année. «C’est plate de devoir fermer boutique, mais on n’a pas le choix», se raisonne-t-elle.
Cycle Néron pourra néanmoins compter sur sa nouvelle plateforme de commerce en ligne pour poursuivre ses activités. Inaugurée il y a un an à peine, celle-ci a nécessité des investissements de l’ordre de 50 000 $, une somme qui paraît bien dérisoire dans les circonstances. «Disons qu’on est heureux d’avoir injecté du temps et de l’argent là-dedans ! Depuis le début de la crise sanitaire, nos ventes ne cessent d’augmenter», se réjouit Chloé Néron, qui supervise la boutique virtuelle.
Si les internautes y achètent un peu de tout, il semble que les bases d’entraînement soient tout particulièrement prisées. «On en vend de quatre à cinq par jour, alors que ce sont des produits qui partent normalement pendant l’hiver. Les gens redoutent le confinement total», pense-t-elle.
Situation inédite
La pandémie met plus que jamais en exergue l’urgence, pour les PME du commerce de détail, d’investir dans la vente en ligne. Là où le vieillissement des baby-boomers et l’arrivée des millénariaux en âge de dépenser ont échoué à les convaincre de se lancer, un virus les y contraint. Bien heureuses celles qui n’ont pas attendu d’être acculées au pied du mur pour entamer ce virage numérique. «Le client est forcé, par les circonstances, d’explorer de nouvelles avenues. S’il n’avait jamais pensé faire son épicerie en ligne, il a désormais d’excellentes raisons de le considérer pour éviter les lieux publics», analyse Abdel Mekki Berrada, professeur de marketing à l’Université de Sherbrooke.
Dans ce contexte inédit, les entreprises qui tardaient à lancer des opérations de commerce en ligne se retrouvent en mode rattrapage. Plusieurs pourraient être tentées de sauver les meubles en créant un magasin en ligne «de fortune» sur des plateformes comme Shopify. L’apprentissage sera néanmoins difficile pour elles, prévoit le spécialiste du commerce électronique. «Les consommateurs jugent de l’ensemble de l’expérience d’achat, du magasinage du produit jusqu’à sa livraison. Les PME ont toutefois peu de contrôle sur la dernière étape, qui échoit à de tiers partis qui sont actuellement débordés», indique-t-il.
Tirer son épingle du jeu
Pour résoudre ce problème du dernier kilomètre, les PME québécoises devront faire preuve de beaucoup d’inventivité, estime Abdel Mekki Berrada. Parmi les solutions à envisager, celle de la mise en place de services de livraison, à l’échelle locale, est à considérer. «Pourquoi pas ? C’est une chance en or de tirer son épingle du jeu en innovant», affirme-t-il. Chose certaine, les consommateurs vont changer leur façon d’acheter pendant cette crise, et garder ces habitudes par la suite. «Auparavant, le commerce en ligne pouvait représenter environ de 10 % à 12 % du chiffre d’affaires d’un détaillant. Je ne me prononcerai pas sur un pourcentage, mais ça va augmenter, c’est sûr», prévoit-il.
Chez Cycle Néron, ces idées ont déjà fait leur bout de chemin. Dès le début de la crise, l’entreprise a mis en place un service de livraison de vélos à domicile. Le but : offrir à la clientèle de ses plateformes numériques un service qui se rapproche le plus possible de celui proposé en magasin. «Nous avons implanté un outil de clavardage en ligne sur notre site web afin de guider les gens dans leur démarche d’achat. Cela nous a aidés à réaliser quelques ventes jusqu’à maintenant», révèle Chloé Néron.