Le terminal maritime de Grande-Anse, située à La Baie, au Saguenay, a vu défiler l’an dernier un total de 369 020 tonnes de marchandise. (Photo: Administration portuaire du Saguenay)
FOCUS SAGUENAY–LAC-SAINT-JEAN. Impossible de la manquer. En arrivant à la ville de Saguenay, après la longue traversée du parc des Laurentides, l’immense aluminerie de Laterrière, propriété du géant Rio Tinto (anciennement Alcan), témoigne de l’importance de l’aluminium et de la présence de cette entreprise dans la région, baptisée à juste titre la «Vallée de l’aluminium».
Il va sans dire que la fin des tarifs douaniers sur les exportations d’aluminium aux États-Unis, annoncée le printemps dernier, «est une très bonne nouvelle qui donne un nouvel élan à la région», se réjouit Christian Fillion, directeur général de la Société de la Vallée de l’aluminium. Cet organisme s’affaire à stimuler le développement de projets et la création d’entreprises en transformation d’aluminium et en fabrication d’équipements spécialisés.
En juillet, Rio Tinto a justement annoncé des investissements de 209 millions de dollars dans ses installations d’Alma afin d’accroître sa capacité de production d’aluminium, un projet qui avait été mis sur la glace en raison de ces mêmes tarifs douaniers.
Les taxes ont aussi eu pour effet de mettre en veilleuse certains projets de développement et de création d’entreprise. Or, en juin, Nature Alu a annoncé l’implantation d’une usine de production d’aluminium de haute pureté à Saguenay, dans l’arrondissement de La Baie, au coût de 15 M$. Ce produit très niché est destiné à l’exportation dans les marchés de l’électronique, de la chimie et des alliages spécialisés pour l’aéronautique et l’industrie militaire.
Quelques jours plus tard, c’était au tour de l’entreprise FjordAl Aluminium d’annoncer des investissements de 6,5 M$ pour l’installation d’une usine de fabrication de tiges d’aluminium à Saguenay, cette fois dans l’arrondissement de Jonquière.
Plus grande diversification
L’omniprésence de Rio Tinto a d’ailleurs donné naissance à de nombreuses entreprises spécialisées dans le secteur de l’aluminium. Le Saguenay-Lac-Saint-Jean (SLSJ) regroupe aujourd’hui une centaine d’entreprises de transformation et d’équipementiers, dont STAS et MECFOR, qui emploient plus de 2 600 personnes. La région, qui est un des principaux centres de production d’aluminium du Canada, compte aussi sur la présence d’importants centres de recherche, dont le Centre québécois de recherche et de développement de l’aluminium (CQRDA), le Centre des technologies de l’aluminium (CNRC-CTA) et le Centre de recherche et de développement Arvida (CRDA) de Rio Tinto, créé en 1946.
«Les industries traditionnelles de l’aluminium et du bois dominent encore l’économie de la région, note Carl Laberge, président de la Chambre de commerce et d’industrie Saguenay-Le Fjord. Comme ce sont des industries cycliques, qui vivent des hauts et des bas, il faut maintenant développer de nouveaux créneaux.»
La région mise notamment sur la réalisation d’importants projets à venir dans le domaine minier, surtout l’exploitation de la mine d’apatite du Lac à Paul, située au nord du SLSJ. Pilotée par Arianne Phosphate, celle-ci entraînerait des investissements de plus de 1 milliard de dollars. Métaux BlackRock, qui souhaite exploiter une mine de ferrovanadium-titane à Chibougamau, prévoit du même coup établir une usine de transformation métallurgique au terminal maritime de Grande-Anse, dans l’arrondissement saguenéen de La Baie. GNL Québec continue ses démarches en vue d’implanter son usine de liquéfaction de gaz naturel au même endroit, un projet de près de 10 G$.
Un million de tonnes de marchandises
Tous ces projets apporteront de l’eau au moulin du Port de Saguenay, qui a manutentionné l’an dernier un total de 369 020 tonnes à son terminal maritime de Grande-Anse. Il s’agit d’une augmentation de plus de 13 % par rapport à l’année précédente.
«On devrait dépasser le million de tonnes de marchandises transbordées d’ici trois ans», prévoit d’ailleurs M. Laberge, qui est aussi directeur général de l’Administration portuaire du Saguenay. D’autant que la vaste zone industrialo-portuaire de 12 km2 a le potentiel d’attirer de nombreuses autres entreprises, ajoute-t-il.
En attendant, l’entreprise forestière Barrette-Chapais y termine la construction d’un site d’entreposage et d’expédition de granules de bois. Elle en exportera quelque 200 000 tonnes vers les marchés européens.
Un autre acteur important de cette industrie, Produits forestiers Résolu, est pour sa part en voie de totaliser des investissements de plus de 60 M$ à son usine de pâte kraft de Saint-Félicien, et de 13 M$ à sa scierie de La Doré.
Par ailleurs, le Saguenay-Lac-Saint-Jean compte depuis peu sur un tout nouveau joueur. L’un des plus importants studios de développement de jeu vidéo du monde, Ubisoft, s’y est en effet installé il y a près de deux ans. Le studio saguenéen, qui travaille en collaboration avec les autres studios du groupe, prévoit toutefois «développer ses propres projets dans un horizon de trois à cinq ans», indique Jimmy Boulianne, directeur général d’Ubisoft Saguenay, qui compte une cinquantaine d’employés, et souhaite en recruter 75 autres d’ici 5 ans.