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La formation, un remède qui soulage la pénurie de main-d’oeuvre

Anne-Marie Tremblay|Édition de la mi‑juin 2021

La formation, un remède qui soulage la pénurie de main-d’oeuvre

La formation en entreprise pourrait représenter un espoir pour guérir le Québec du mal de la pénurie de main-d’œuvre. (Photo: Scott Graham pour Unsplash)

FORMATION. Les entreprises canadiennes investissent moins en formation que leurs voisines américaines, montre une étude de Randstad Canada publiée en février dernier. Pourtant, le développement des compétences en entreprise constitue l’un des remèdes à la pénurie de main-d’œuvre et une clé pour amorcer le virage technologique.

«Aujourd’hui, les organisations canadiennes sont à la remorque en matière de perfectionnement des compétences. Pour chaque dollar investi par les organisations américaines dans l’apprentissage et le développement, leurs homologues canadiennes ne dépensent que 81 cents», soutient ainsi le rapport L’avenir du travail: trois grandes tendances qui façonneront le monde du travail en 2021, de Randstad Canada.

Une réalité qui diffère légèrement au Québec, pense Denis Hamel, vice-président aux politiques de développement de la main-d’œuvre au Conseil du patronat du Québec (CPQ). «Si on regarde les chiffres de plus près, on réalise que les organisations d’ici forment beaucoup plus que celles du reste du Canada.» Il rapporte que si 35% des entreprises ont investi dans une formation structurée à l’échelle du pays, cette proportion grimpe à 60% au Québec. Les données remontent à 2015, puisque Statistique Canada ne mène plus d’enquête à ce sujet depuis, nuance-t-il. «Mais je ne pense pas que les tendances aient beaucoup changé dans les dernières années.»

Même si le Québec fait bonne figure, les besoins en matière de formation en entreprise demeurent importants, affirme Dominic Lévesque, conseiller en relations industrielles agréé (CRIA) et président du groupe Randstad Canada. «Quand on regarde le nombre de postes à pourvoir, on voit bien que les besoins de formation sont criants, note-t-il. Et je ne suis pas sûr que nous allions assez vite, alors que la pénurie de main-d’œuvre s’accélère.»

En avril dernier, le Québec comptait près de 150 000 emplois vacants. Un chiffre plus élevé qu’avant la pandémie, observe Denis Hamel. «Et ce n’est pas fini, parce que l’économie n’est pas encore complètement reprise.»

 

Un retard à combler

Pour Dominic Lévesque, ce manque à gagner s’explique en partie par la difficulté des entreprises à planifier leurs besoins en matière de développement des compétences. «Le marché change tellement vite qu’il est complexe de savoir de quoi sera fait demain, quelles compétences seront cruciales à l’avenir, constate-t-il. C’est vraiment le défi.»

Résultat: plusieurs entreprises ne sont pas prêtes à faire face aux changements. D’ailleurs, l’étude de Randstad Canada montre que 64% des dirigeants canadiens interrogés reconnaissent qu’ils ont besoin de plus de compétences en entreprise, entre autres pour soutenir leur numérisation accélérée.

Le remède, c’est la planification, estime le CRIA. «Les organisations ne doivent pas simplement réagir aux problèmes, mais plutôt mettre en place une veille pour voir venir les changements, pour former en fonction de leur planification stratégique.» Les ressources humaines doivent prendre part à cette réflexion sur l’architecture de talents pour déterminer quels sont les apprentissages à offrir aux travailleurs et les plans de formation à mettre en place. «Bref, il faut former aujourd’hui pour répondre aux besoins de demain», martèle Dominic Lévesque.

 

Soutenir les PME

D’autres obstacles freinent aussi l’élan des employeurs en matière de formation, estime Denis Hamel, comme les problèmes de littératie des employés. «De plus, le tissu économique du Québec est composé d’une majorité de PME et, dans une petite organisation, c’est plus difficile de libérer un salarié pour le former», rappelle-t-il. Sans compter que, malgré toute la bonne volonté des dirigeants, les coûts grimpent vite.

Conscient de cette réalité, le gouvernement du Québec a mis en place différentes initiatives pour aider les entreprises à ce chapitre, comme le Programme actions concertées pour le maintien en emploi (PACME), lancé en pleine crise sanitaire. La demande a explosé, montrant l’appétit pour ce genre de mesure, observe le vice-président du CPQ.

Le gouvernement provincial soutient aussi la formation pour assurer la reprise économique. «Il faut utiliser le potentiel des travailleurs en misant sur la formation, le développement des compétences et la requalification pour mieux répondre aux réalités du marché du travail. C’est devenu un impératif aujourd’hui», mentionne Jean Boulet, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS).

Il rapporte que les dépenses de son ministère pour soutenir les entreprises sont à la hausse, «ce qui montre que les besoins sont importants».
Ainsi, en 2019-2020, le MTESS a accompagné près de 15 000 nouvelles entreprises, y consacrant un total de 172,8 millions de dollars (M$). En 2020-2021, plus de 17 000 sociétés ont bénéficié de mesures directes, ce qui représente 266,5M$, détaille le ministre Boulet. Des chiffres qui incluent différentes mesures, dont des appuis à la formation. «C’est important de soutenir les entreprises à ce chapitre, fait-il valoir, puisque cela permet d’accroître la productivité, d’augmenter les compétences des salariés et de répondre aux défis numériques.»