Pour rapprocher ses équipes, qui travaillent maintenant à distance pour la plupart, il faut s'assurer que les rencontres soient plus fréquentes. (Photo: 123RF)
FUSIONS ET ACQUISITIONS. Loin du bureau, loin du cœur? Intégrer les nouvelles équipes de travail est une étape décisive pour le bon succès d’une fusion-acquisition. Mais comment s’y prendre alors que bon nombre d’employés sont toujours en télétravail? Comment réussir cette étape – déjà délicate en temps normal – alors que les équipes ne peuvent ou ne veulent se rencontrer?
C’est le genre de question qu’a dû se poser Steve Foisy au cours des dernières semaines. Président d’IP4B, un fournisseur montréalais de téléphonie IP, il annonçait le 4 mai dernier avoir conclu une entente avec FasTTelecom afin d’acquérir son unité d’affaires de téléphonie IP.
Et bien que l’acquisition soit d’une taille relativement limitée – IP4B passera de 20 à 24 employés – l’intégration des équipes n’en est pas moins importante. « C’est un élément clé, c’est ça qui va permettre à une acquisition, si cette étape-là est bien gérée bien sûr, d’être un succès. »
Pour rapprocher ses équipes, qui travaillent maintenant à distance pour la plupart, il s’assure donc que les rencontres soient plus fréquentes. « À cause du télétravail, les gens sont seuls à la maison. Ils commencent à s’ennuyer et à trouver le temps long. C’est donc important d’avoir souvent des rencontres de groupe virtuelles pour conserver le contact, quitte à faire des rencontres plus courtes », explique Steve Foisy.
Le matin de bonne heure, vers 8 h, IP4B fait par exemple un « kickoff » (coup d’envoi) de la journée au cours duquel tout le monde se rencontre via vidéoconférence. « On essaie de motiver nos équipes », explique Steve Foisy. Les équipes des différentes fonctions de l’entreprise se rencontrent ensuite à d’autres moments durant la semaine pour discuter d’enjeux qui leur sont propres.
Formation à distance
Pour s’assurer que les nouveaux employés connaissent bien IP4B et son offre de produit, Steve Foisy a opté pour de la formation par vidéoconférence. La firme a également offert de la formation RH à ses directeurs pour qu’ils soient plus à même de faire une bonne intégration des équipes et des employés.
« Nous avons organisé de la formation par téléconférence, et ça se fait très, très bien », dit Steve Foisy. Le formateur peut facilement partager son écran ou des documents avec les gens qui suivent la formation, explique le président, et comme le formateur ne perd plus de temps à se rendre sur place, il lui reste plus de temps pour la formation comme telle.
« Le temps qu’il aurait perdu dans le trafic, à se rendre au bureau, il peut maintenant le prendre pour parler d’un à un, après la formation, à un employé qui a mal compris la matière, dit-il. C’est plus efficace. »
Impliquer les équipes
Avec la pandémie, les gestionnaires sont déjà surchargés. Intégrer une fusion-acquisition est donc un poids supplémentaire. Pour cette raison, il est important pour eux d’impliquer leur équipe dans le processus de sorte que tout le travail ne repose pas uniquement sur leurs épaules, explique Noémie Poli, CRIA et consultante pour Ascendis Conseils, une firme de service-conseil en stratégie d’entreprise.
« On peut responsabiliser des membres de son équipe, des ambassadeurs de la culture organisationnelle, afin qu’ils puissent accompagner leurs collègues nouvellement acquis dans leur réalité pour accélérer leur intégration », dit Noémie Poli. À titre d’exemple : expliquer comment fonctionne la gestion documentaire et la gestion de projets, ou quels sont les outils qui sont utilisés pour communiquer à distance. Elle suggère d’ailleurs de multiplier les contacts avec les gens dans l’entreprise que l’on vient d’acheter pour assurer leur bonne intégration puisque le contexte actuel est moins propice aux discussions impromptues qui prennent forme au fil des rencontres dans les corridors.
Normalement, explique Noémie Poli, après une acquisition, l’acquéreur accueillera les nouveaux employés et les intégrera dans leur poste, dans leur équipe et dans leur organisation. Et une part de ce travail se fera dans l’informel : le gestionnaire passe devant le bureau de l’employé et lui demande s’il a des questions, ou un collègue l’aborde devant la machine à café pour discuter avec lui des façons de faire propres à la culture de la nouvelle entreprise.
« Mais ça, en ce moment, ce n’est plus possible », note Noémie Poli. Il faut donc « formaliser l’informel », et multiplier les points de contact en faisant davantage d’appels, en organisant plus de rencontres par vidéoconférence, et en envoyant plus de courriels. « L’aspect humain, en ces temps de crise, reste la clé d’une bonne intégration. »
***
Trois conseils pour les gestionnaires, selon Noémie Poli, CRIA et consultante pour Ascendis Conseils
1. Organiser un jumelage virtuel : charger un employé d’expliquer la gestion de projet aux nouvelles équipes, ou faire d’un autre employé un ambassadeur de la culture.
2. Créer des missions : charger certains employés de contacter leurs nouveaux collègues dans le simple but de socialiser. L’objectif? Recréer la machine à café, et aider les équipes à se connaître mutuellement.
3. Rassurer : rapidement, présenter les gestionnaires, préciser le rôle des nouveaux, leur dire quels outils privilégier. Ils pourraient même être soulagés d’être acquis si l’ancien employeur était en difficulté.