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Des projets difficiles à écarter

Simon Lord|Édition de la mi‑octobre 2021

Des projets difficiles à écarter

Les firmes de génie-conseil se sont désintéressées des projets publics, notamment municipaux. (Photo: 123RF)

GÉNIE-CONSEIL. Même si bon nombre de firmes de génie-conseil continuent à soumissionner pour des contrats et des projets publics, elles ne le font pas à n’importe quel prix — littéralement et au sens figuré. Voici comment elles tirent leur épingle du jeu et pourquoi elles continuent à opérer sur ce marché, dont elles déplorent les conditions.

Plus du tiers (37 %) des professionnels membres de l’Association des firmes de génie-conseil du Québec (AFG) disent tirer leur volume d’affaires majoritairement des marchés publics, selon un rapport de Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT) commandé par six organismes liés à l’industrie de la construction et publié en avril dernier. À l’inverse, 19 % d’entre eux disent tirer leur volume d’affaires majoritairement du secteur privé. Fait notable, toutefois, aucun d’entre eux ne dit pour l’instant tirer exclusivement son volume d’affaires dans un ou l’autre des types de marchés. 

Ces chiffres sont surprenants puisque, toujours selon le rapport de RCGT, 40 % des professionnels ont connu une baisse de leur intérêt à soumissionner sur les marchés publics depuis les cinq dernières années. 

 

Soumissions sélectives

Dans bien des cas, les firmes de génie-conseil continuent de tenter leur chance sur les marchés publics parce qu’ils sont presque inévitables en raison de leur taille, mais aussi parce que les problèmes (voir l’article d’introduction du dossier) sont localisés dans certains créneaux.

« Stantec a 1500 employés au Québec et les marchés publics sont de grands marchés, alors ils demeurent importants pour nous », explique Isabelle Jodoin, vice-présidente principale pour le Québec de l’entreprise d’Edmonton. Environ la moitié des contrats de l’entreprise dans la belle Province sont d’origine publique. 

« Ce qu’on déplore, comme bien d’autres, c’est que les conditions contractuelles sont parfois difficiles », poursuit Isabelle Jodoin. Pour Stantec, comme pour bien d’autres firmes, le problème concerne surtout le milieu municipal, où les honoraires sont souvent jugés trop faibles, et où l’on déplore le fait que les contrats sont fréquemment accordés au plus bas soumissionnaire, sans égard pour la compétence.

« Parfois, le prix est tellement bas qu’on se dit que la firme qui remportera le contrat ne peut pas avoir compris tous les enjeux du client, souligne la vice-présidente. Pour cette raison, quand il y a seulement le prix qui est important pour un client, le projet ne nous intéresse pas. »

Ces propos font écho aux statistiques compilées dans le rapport de RCGT. Selon celui-ci, 82 % des 178 professionnels interrogés se permettent d’écarter les donneurs d’ouvrage publics en fonction des conditions qu’ils offrent.

 

À la pièce

À CIMA+, basée à Laval, le son de cloche est similaire. Son président et chef de la direction, François Plourde, est bien au courant du fait que plusieurs firmes dans son industrie se désintéressent des marchés publics, plus particulièrement des projets municipaux.

« C’est le cas chez nous, admet-il. On a diminué de 50 % le nombre de contrats municipaux que l’on faisait en comparaison d’il y a quelques années, et on a arrêté de travailler complètement avec certaines villes qui n’ont d’égard que pour le prix. »

François Plourde explique que le problème est lié au cadre législatif encadrant les appels d’offres avec les villes québécoises, soit le projet de loi 106. En place depuis 2002, elle qui fait en sorte que le plus bas soumissionnaire est celui qui se voit accorder le contrat. 

Une règle qu’il estime considérablement dissuasive. « Pour d’autres projets, comme ceux du ministère des Transports ou d’Hydro-Québec, le prix n’est pas un critère, rappelle-t-il. C’est le client qui évalue la meilleure soumission en fonction de critères de compétence et de qualité. »

Par conséquent, les professionnels ont manifesté beaucoup moins de désintérêt pour ces autres clients. Seuls 15 % et 12 % des professionnels interrogés disent avoir perdu de l’intérêt depuis les cinq dernières années pour les contrats d’Hydro-Québec et du ministère des Transports du Québec, respectivement.

CIMA+ a toutefois augmenté son volume d’affaires dans le municipal ailleurs au pays, comme en Ontario et dans l’Ouest canadien, où les règles sont jugées moins contraignantes. « On a toujours espoir qu’il y aura du changement dans les règles au Québec, note François Plourde. Mais pour l’instant, dans le marché municipal, on choisit à la pièce. »

 

Même si bon nombre de firmes de génie-conseil continuent à soumissionner pour des contrats et des projets publics, elles ne le font pas à n’importe quel prix — littéralement et au sens figuré. Voici comment elles tirent leur épingle du jeu et pourquoi elles continuent à opérer sur ce marché, dont elles déplorent les conditions.
Plus du tiers (37 %) des professionnels membres de l’Association des firmes de génie-conseil du Québec (AFG) disent tirer leur volume d’affaires majoritairement des marchés publics, selon un rapport de Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT) commandé par six organismes liés à l’industrie de la construction et publié en avril dernier. À l’inverse, 19 % d’entre eux disent tirer leur volume d’affaires majoritairement du secteur privé. Fait notable, toutefois, aucun d’entre eux ne dit pour l’instant tirer exclusivement son volume d’affaires dans un ou l’autre des types de marchés. 
Ces chiffres sont surprenants puisque, toujours selon le rapport de RCGT, 40 % des professionnels ont connu une baisse de leur intérêt à soumissionner sur les marchés publics depuis les cinq dernières années. 
Soumissions sélectives
Dans bien des cas, les firmes de génie-conseil continuent de tenter leur chance sur les marchés publics parce qu’ils sont presque inévitables en raison de leur taille, mais aussi parce que les problèmes (voir l’article d’introduction du dossier) sont localisés dans certains créneaux.
« Stantec a 1500 employés au Québec et les marchés publics sont de grands marchés, alors ils demeurent importants pour nous », explique Isabelle Jodoin, vice-présidente principale pour le Québec de l’entreprise d’Edmonton. Environ la moitié des contrats de l’entreprise dans la belle Province sont d’origine publique. 
« Ce qu’on déplore, comme bien d’autres, c’est que les conditions contractuelles sont parfois difficiles », poursuit Isabelle Jodoin. Pour Stantec, comme pour bien d’autres firmes, le problème concerne surtout le milieu municipal, où les honoraires sont souvent jugés trop faibles, et où l’on déplore le fait que les contrats sont fréquemment accordés au plus bas soumissionnaire, sans égard pour la compétence.
« Parfois, le prix est tellement bas qu’on se dit que la firme qui remportera le contrat ne peut pas avoir compris tous les enjeux du client, souligne la vice-présidente. Pour cette raison, quand il y a seulement le prix qui est important pour un client, le projet ne nous intéresse pas. »
Ces propos font écho aux statistiques compilées dans le rapport de RCGT. Selon celui-ci, 82 % des 178 professionnels interrogés se permettent d’écarter les donneurs d’ouvrage publics en fonction des conditions qu’ils offrent.
À la pièce
À CIMA+, basée à Laval, le son de cloche est similaire. Son président et chef de la direction, François Plourde, est bien au courant du fait que plusieurs firmes dans son industrie se désintéressent des marchés publics, plus particulièrement des projets municipaux.
« C’est le cas chez nous, admet-il. On a diminué de 50 % le nombre de contrats municipaux que l’on faisait en comparaison d’il y a quelques années, et on a arrêté de travailler complètement avec certaines villes qui n’ont d’égard que pour le prix. »
François Plourde explique que le problème est lié au cadre législatif encadrant les appels d’offres avec les villes québécoises, soit le projet de loi 106. En place depuis 2002, elle qui fait en sorte que le plus bas soumissionnaire est celui qui se voit accorder le contrat. 
Une règle qu’il estime considérablement dissuasive. « Pour d’autres projets, comme ceux du ministère des Transports ou d’Hydro-Québec, le prix n’est pas un critère, rappelle-t-il. C’est le client qui évalue la meilleure soumission en fonction de critères de compétence et de qualité. »
Par conséquent, les professionnels ont manifesté beaucoup moins de désintérêt pour ces autres clients. Seuls 15 % et 12 % des professionnels interrogés disent avoir perdu de l’intérêt depuis les cinq dernières années pour les contrats d’Hydro-Québec et du ministère des Transports du Québec, respectivement.
 
CIMA+ a toutefois augmenté son volume d’affaires dans le municipal ailleurs au pays, comme en Ontario et dans l’Ouest canadien, où les règles sont jugées moins contraignantes. « On a toujours espoir qu’il y aura du changement dans les règles au Québec, note François Plourde. Mais pour l’instant, dans le marché municipal, on choisit à la pièce. »