Acquisitions, stratégie en intelligence artificielle et souci d'excellence font partie des priorités des grands cabinets cette année. (Photo: 123RF)
GRANDS DU DROIT. Voici des nouvelles des cabinets Fasken, Norton Rose Fulbright, Lavery Avocats, Cain Lamarre et BCF Avocats d’affaires.
1. Fasken mise sur l’«excellence collaborative»
Fasken a beau trôner au sommet du classement, il entend continuer de travailler sur son «excellence collaborative», qui est une des quatre priorités du cabinet avec le bien-être des employés, le virage technologique et une présence «forte» sur le marché. «Je suis un fervent croyant de la théorie voulant que les clients sophistiqués recherchent de plus en plus de profondeur dans une expertise de pointe, explique François Brais, associé directeur de Fasken pour le Québec. Selon lui, il ne serait plus suffisant pour un cabinet d’avoir un associé qui se spécialise dans un domaine; quand la demande est là, il faut «bâtir une équipe».
En regardant dans le rétroviseur de 2023, François Brais se réjouit également que Fasken se soit classé «band 1» dans trois des quatre catégories évaluées au Québec par l’organisme Chambers: droits des sociétés et du commerce, droit immobilier et droit du travail. «Dans l’année à venir, nous voulons progresser en litige (classé “band 2”), car nous jugeons, en interne, que nous ne sommes pas assez bien classés.»
2. Norton Rose Fulbright réfléchit à la conformité
Très présent sur le front de la protection des renseignements personnels, Norton Rose Fulbright multiplie les webinaires (sur sa plateforme de visionnement) et les capsules d’information (sur LinkedIn) sur le thème de la protection des données et des cyberrisques. «Les dispositions les plus onéreuses de la loi 25 sont entrées en vigueur en septembre 2023, expliquait Imran Ahmad, associé et cochef canadien de la gouvernance de l’information, de la protection des renseignements personnels et de la cybersécurité chez Norton Rose Fulbright, dans un webinaire de février dernier. Donc, beaucoup de nos clients se demandent comment ils peuvent démontrer qu’ils sont conformes avec les exigences de la loi.»
Le spécialiste en gouvernance de l’information explique que les entreprises cherchent à mettre en place des politiques qui leur donnent des garanties de conformité à l’échelle internationale. «Les données sont transférées outre frontière régulièrement, dit-il dans le webinaire. On voit [chez nos clients] une volonté d’avoir un plan, un cadre d’analyse qui peut être utilisé par de multiples juridictions, de multiples pratiques et solutions technologiques également. Et c’est quelque chose sur quoi on travaille beaucoup.»
3. Cain Lamarre repense le déploiement de ses groupes de pratique
Anciennement directrice, Gina Doucet a été nommée chef de la direction de la pratique professionnelle en novembre 2022 avec un mandat précis: réfléchir au déploiement des groupes de pratique au sein du cabinet. «Nous avons 18 groupes de pratique et nous voulons être en mesure de saisir l’essence de chaque pratique, pour en faire profiter tous nos clients, peu importe où ils se trouvent au Québec.»
Cain Lamarre veut configurer ses services de manière que chaque entreprise accompagnée ait un point de contact «local» (un personne pivot), tout en bénéficiant d’une expertise «nationale». «Pour y arriver, il faut que la personne pivot puisse rapidement identifier l’expertise dont a besoin leur client à travers notre réseau, pour ensuite faire la mise en relation.» L’autre défi: s’assurer que les avocats qui ont des spécialisations aient l’ouverture de répondre à des demandes qui ne concernent pas leurs propres clients. «Nous travaillons fort pour que cette culture soit comprise et valorisée au sein du cabinet», explique Gina Doucet, ajoutant que ce chantier viendra alimenter le plan stratégique à paraître à l’automne prochain.
4. BCF Avocats d’affaires en quête de croissance
Nommée directrice de BCF Avocats d’affaires en septembre 2023, Julie Doré arrive au poste avec un mandat «clair» de la part de ses associés: la croissance. «Durant les deux premières années de pandémie, le cabinet a été davantage en mode consolidation et, par conséquent, nous n’avons pas toujours été à l’affût de recruter de nouveaux talents.» BCF veut investir ses efforts dans les secteurs dans lesquels le bureau juge qu’il peut briller parmi les meilleurs du Québec. «Quand je parle de la propriété intellectuelle et de l’intelligence artificielle, c’est clairement quelque chose de distinctif pour nous.»
D’ailleurs, la directrice de BCF Avocats se réjouit d’avoir attiré dans son giron — en avril dernier — deux praticiens «reconnus» du monde de l’intelligence artificielle: les avocats Paul Gagnon (spécialisé en matière de droit des technologies, de droit commercial et de propriété intellectuelle,) et Misha Benjamin. Le duo a été nommé coleaders des technologies et de l’intelligence artificielle (IA) de BCF.
Ce double recrutement vient compléter la «solide» équipe de propriété intellectuelle, comptant notamment des agents de brevets qui représentent de grandes sociétés internationales, fait valoir la directrice. «Nous nous positionnions comme un joueur incontournable pour conseiller autant les entreprises qui développent des solutions basées sur l’intelligence artificielle que celles qui se posent des questions sur l’adoption de ces technologies dans leurs opérations.»
5. Lavery Avocats se positionne sur l’IA
Lavery cherche aussi à prendre sa place dans le créneau de l’IA, mais cette fois en misant sur l’adoption de cette technologie par son équipe. En octobre dernier, le cabinet a annoncé avoir mis à la disposition de ses membres l’«assistant Lavery», soit un bot conversationnel basé sur les grands modèles de langage, développé en interne par le laboratoire juridique Lavery sur l’intelligence artificielle (L3IA), sous la responsabilité de l’associé Éric Lavallée, basé sur la technologie d’OpenAI.
Loïc Berdnikoff, chef des opérations juridiques et de conformité du cabinet, concède avoir eu quelques réticences au départ. «Comme la plupart des entreprises, on s’est d’abord posé la question: est-ce qu’on peut et est-ce qu’on doit utiliser ce genre de technologie? Le premier réflexe, d’un point de vue conformité, a été de dire: attention, il y a de gros enjeux.» Or, Éric Lavallée a défendu son projet. «À la suite de l’initiative d’Éric et son équipe, la direction s’est dit: on ne peut pas être de ces entreprises qui vont juste dire non. Les gens vont finir par l’utiliser malgré tout, et là, le risque sera plus grand.»
Avec le souci de bien faire les choses, Lavery a mis trois filtres de sécurité en place:
1) adoption d’une politique interne visant notamment un usage respectueux du code déontologique; 2) surveillance des questions soumises dans l’assistant Lavery; et 3) entente contractuelle avec OpenAI prévoyant que les données de Lavery ne serviront pas à entraîner le modèle. «À ce stade-ci, l’outil n’est pas utilisé pour livrer des services juridiques», précise Loïc Berdnikoff. «L’objectif est de comprendre et d’apprivoiser la bête, ajoute Éric Lavallée. Certains l’utilisent pour comprendre le secteur d’activité de leurs clients, d’autres, pour s’inspirer dans la rédaction d’un contrat.»
Parallèlement à cet apprentissage, le L3IA continue de faire l’analyse des différentes solutions qui sortent dans le marché, pour comprendre les choix technologiques et les spécificités de chaque application. «Le secteur évolue rapidement et nous voulons continuer d’être un précurseur des tendances technologiques», fait valoir Loïc Berdnikoff.