Le taux d’inoccupation national était de 7,6%. (Photo: La Presse Canadienne)
Toronto — Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé et que de nombreux magasins et restaurants ont été désertés, le commerce de détail, dans sa version en briques et en mortier, est devenu l’un des actifs les plus indésirables au Canada.
Mais maintenant, alors que de nombreux Canadiens n’ont plus peur de se rassembler et que les passeports vaccinaux ont été abandonnés, des sociétés immobilières affirment que les chaînes de vente au détail et de restauration se démènent pour reprendre leur place.
«Il y a eu une période assez laide provoquée par la COVID, pendant laquelle il y avait beaucoup d’incertitude quant à la place de la vente au détail physique dans le paysage de consommation, et même avant la COVID (…) à cause du commerce électronique», a expliqué le chef de la direction de la fiducie de placement immobilier RioCan, Jonathan Gitlin.
«Maintenant, je peux confortablement dire que nous sommes dans une position où le commerce de détail physique s’est affirmé et il y a beaucoup moins d’ambivalence.»
La chaîne de poulet frit Popeyes prévoit d’ouvrir 200 nouveaux magasins au Canada et aux États-Unis cette année, le vendeur de burritos Chipotle compte ajouter 10 établissements en Colombie-Britannique et en Ontario, et BeaverTails en a plus de 20 en préparation. La marque de chaussures Allbirds et les établissements de restauration rapide Xero Degrees et Prince Town Pizza s’installent également dans des établissements canadiens.
Plus de 90 % du portefeuille immobilier de RioCan est composé d’espaces commerciaux. Les épiciers, les pharmacies et les magasins d’alcools représentent 20 % de son loyer au détail — la plus grande part de tous les secteurs – suivis des détaillants spécialisés à environ 15 %, des services personnels à 14 % et des détaillants à bas prix à 11 %.
Des épiciers ont récemment approché RioCan pour augmenter leur empreinte, les pharmacies sont en «mode d’hyper expansion», les détaillants à bas prix comme les magasins à un dollar ou les enseignes comme Winners recherchent de l’espace, tout comme les sociétés de restauration rapide, a précisé, Jonathan Gitlin.
Les tendances pandémiques consistant à prioriser le secteur de la santé ou à acquérir des animaux domestiques façonnent également la reprise immobilière, a noté Jonathan Gitlin, qui observe un plus grand nombre d’ouvertures de cabinets de médecins, de dentistes et de vétérinaires.
«(L’enseigne) Petsmart connaît une expansion, et là où elle comptait traditionnellement de plus grands magasins, elle recherche maintenant des espaces plus petits et plus urbains, afin qu’un propriétaire de copropriété puisse aller acheter une laisse pour chien ou de la nourriture pour chat», a poursuivi Jonathan Gitlin.
Le portefeuille de commerces de détail de RioCan, qui comprend un grand nombre de centres commerciaux en plein air dans les zones urbaines et suburbaines, est occupé à environ 94 %, mais certains espaces restent vacants.
Le taux d’inoccupation national a connu une baisse aux deuxième et troisième trimestres de 2021. Il a maintenant graduellement diminué à 4,1 %, a constaté la société de services pour l’immobilier commercial CBRE dans le cadre d’une enquête trimestrielle sur les fiducies de placement immobilier.
L’enquête, qui couvre environ 30 % du marché et exclut les propriétés ayant pignon sur rue, a révélé que la majeure partie de l’espace disponible au cours du premier trimestre se trouvait dans les centres commerciaux régionaux, où le taux d’inoccupation national était de 7,6 %. Ce taux est encore plus élevé dans de nombreuses communautés, y compris à Halifax, où il a atteint 24,2 %.
Les plus petits espaces ont la cote
À Toronto, Tim Sanderson voit à nouveau les gens affluer vers Yorkville, Queen Street et King Street, mais le cœur du quartier financier regorge toujours d’enseignes à louer.
«Il n’y a que des gens partout, mais on ne voit pas cela dans le centre et on ne le verra pas (…) d’ici à ce que les niveaux d’occupation des tours de bureaux reviennent à ce qu’ils étaient auparavant — s’ils y retournent un jour», a indiqué le vice-président et responsable national du commerce de détail de la société immobilière JLL.
Il croit que la cadence de croissance du commerce de détail physique «ne sera plus ce qu’elle était», car les détaillants deviennent plus judicieux et moins susceptibles de se développer avec des plans d’expansion de 40 ou 80 magasins, comme ils le faisaient auparavant.
Il observe cette situation chez Gap, qui a annoncé la fermeture de 350 magasins d’ici 2023, et Starbucks qui en a abandonné jusqu’à 300.
Tim Sanderson et Arlin Markowitz, vice-président exécutif et chef du secteur des détaillants urbains de Toronto chez CBRE, remarquent que les chasseurs immobiliers recherchent souvent des espaces plus petits avec une infrastructure de ramassage en bordure de rue, car ils comptent de plus en plus sur le commerce électronique et les entrepôts.
«Petit espace ? Pas de problème. Espace au rez-de-chaussée ? Pas de problème», a observé Arlin Markowitz.
«Là où on commence à voir des espaces problématiques, c’est dans les espaces de 15 000 à 30 000 pieds carrés à deux étages, où se trouvaient autrefois des (détaillants de) vêtements.»
Alors que ceux qui cherchaient de l’espace souhaitaient précédemment des baux à court terme pour s’ajuster à l’incertitude de la pandémie, Arlin Markowitz a noté que les entreprises avaient repris confiance et étaient de nouveaux prêts à signer de plus longs contrats.
Plusieurs ont même supprimé les clauses COVID-19 des baux, a-t-il ajouté.
«Nous sommes au meilleur point où nous étions avant la pandémie, a-t-il assuré. De toute évidence, cela a pris beaucoup de temps, mais nous avons assisté à une grande reprise et à un grand changement dans le sentiment et la tendance.»