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Des solutions qui favorisent le cycle de vie des emballages

Claudine Hébert|Édition de la mi‑juin 2021

Des solutions qui favorisent le cycle de vie des emballages

La laiterie Chagnon a éliminé les emballages individuels pour ses sandwichs à la crème glacée. (Photo: courtoisie)

INDUSTRIE DE L’EMBALLAGE. Soucieuses de faire leur part en matière d’emballage durable, plusieurs entreprises consacrent temps et argent à trouver des solutions en ce sens. En voici quelques exemples.


Elfe Plastik veut faire sa part

En attendant que les technologies de recyclage s’améliorent, le fabricant d’emballages alimentaires Elfe Plastik, de Saint-Léon-de-Standon, en Chaudière-Appalaches, a investi plus de 100 000 $ en trois ans afin de trouver différentes façons d’intégrer de la résine recyclée postconsommation (PCR) dans ses contenants. Afin d’y parvenir, l’entreprise collabore étroitement avec Pecca Technologies, une start-up de Québec spécialisée dans l’ingénierie et la fabrication de mélanges polymères, et le recycleur britanno-colombien Merlin Plastics.

La PME de 25 employés a déjà mis au point une recette afin de pallier la fragilisation du polymère recyclé. «Tout est presque prêt», soutient Denis Labrecque, directeur des opérations, responsable de la recherche et du développement. «Si nous pouvions demain matin bénéficier d’un approvisionnement stable de résine PCR approuvée par Santé Canada et par la Food and Drug Association américaine vendue à un coût raisonnable, Elfe Plastik serait à un cheveu de pouvoir mouler cette matière postconsommation», assure-t-il.

Ce fabricant de plusieurs dizaines de millions de contenants par année explore également d’autres avenues. Il travaille notamment à mettre au point un bioplastique biodégradable à base d’huile de soya. «En introduisant adéquatement des plastifiants d’origine végétale dans les contenants, nous allons être en mesure de préserver les propriétés de l’emballage tout en favorisant son caractère biodégradable», explique Denis Labrecque. La PME souhaite présenter ce produit d’ici un an à des clients qui évoluent dans l’événementiel ou encore dans les foires alimentaires. «Pour que le cycle de vie fonctionne avec les emballages biodégradables ou compostables, ils doivent actuellement être récupérés en circuit fermé. Les composteurs industriels sont efficaces si leurs utilisateurs réussissent à réduire l’introduction d’intrants contaminants», indique le directeur des opérations.

 

S’offrir une usine de recyclage pour mieux s’approvisionner

Il ne suffit pas de vouloir intégrer du plastique postconsommation dans ses emballages à usage unique. Encore faut-il que les fabricants trouvent la matière nécessaire et conforme aux normes des industries auxquelles elle s’adresse. Un obstacle que TC Transcontinental a décidé de surmonter à sa façon: elle s’est offert une usine de recyclage.

Depuis juin 2020, l’entreprise dispose d’une telle installation à Montréal, car le groupe Recyclage a fait l’acquisition des actifs d’Enviroplast. Elle peut maintenant y transformer des plastiques usés de sources commerciale, industrielle et agricole. «Des matières qui vont provenir également de centres de tri en résines recyclées», fait savoir son conseiller principal en économie circulaire, Charles David Mathieu-Poulin. Grâce à cette acquisition, le fabricant d’emballages s’assure de la qualité de la résine postconsommation utilisée dans ses contenants.

Charles David Mathieu-Poulin tient à rappeler que TC Transcontinental, qui compte investir plus de 25 millions de dollars dans ses activités d’emballage d’ici 2025, a pris trois engagements pour cette même année. Non seulement veut-elle s’assurer que tous ses emballages seront alors 100 % recyclables et recyclés, mais elle souhaite également intégrer au moins 10 % de matière postconsommation dans l’ensemble de ses produits. «Nous avons contacté au moins huit centres de tri afin d’établir des partenariats d’approvisionnement de matières», note-t-il.

Cette stratégie d’intégration verticale a été saluée à maintes reprises. Elle a remporté un prix au gala du CRE-Montréal 2021, et a entre autres été nommée parmi les 20 meilleures innovations à impact de l’année par Novae.

 

Un emballage qui a de l’«attitude»

Cascades est reconnue pour son rôle majeur dans la recyclabilité du papier et du carton depuis plus de 50 ans. Et depuis le tournant des années 1980, l’entreprise applique également cette philosophie aux matières plastiques qui se retrouvent dans ses usines.

«L’objectif est de pouvoir offrir une gamme de produits composés à plus de 50 % — voire à 100 % — de matières plastiques recyclées et recyclables», indique Hugo D’Amours, vice-président aux communications et aux affaires publiques à Cascades. Bien que ce volet représente moins de 10 % des quelque 5 milliards de dollars de revenus générés par la société fondée par la famille Lemaire, il gagne en popularité. Parmi ses plus récents adeptes, on retrouve un des plus importants producteurs de bébés laitues du pays, Vegpro.

Grâce à un partenariat établi depuis juillet 2020, Cascades produit des contenants composés de polytéréphtalate d’éthylène (PET) 100 % recyclé et recyclable sur mesure pour les salades Attitude Fraîche du producteur montérégien à l’usine Cascades Inopak de Drummondville. «Des contenants, souligne Hugo D’Amours, qui ont été testés et approuvés par les centres de tri avant de faire leur entrée sur le marché.»

Cette collaboration s’est traduite par 30 nouveaux postes à l’usine Cascades Inopak de Drummondville et plus de 100 à Vegpro, à Sherrington.

 

Réduire l’emballage individuel, un pas à la fois

Au premier regard, la boîte de sandwichs à la crème glacée de la Laiterie Chagnon semble être un contenant de carton comme les autres. Pourtant, en l’ouvrant, on découvre quatre portions non emballées individuellement. Un «exploit» pour ce type de produits congelés, estiment plusieurs écoconcepteurs.

Commercialisé depuis près d’un an, cet emballage a été conçu avec l’aide de l’équipe d’Agro Québec. Depuis plus de 10 ans, ce service-conseil accompagne une vingtaine de producteurs et de transformateurs afin, entre autres, de les aider à surmonter les problèmes des emballages à usage unique.

La solution proposée par Laiterie Chagnon pour éliminer les quatre pellicules de plastique individuelles ne fait pas toutefois que des heureux. «Elle implique un changement de comportement de la part du consommateur, qui doit accepter cette nouvelle formule, souligne Suzie Dubé, conseillère principale à la mise en marché et à la commercialisation à Agro Québec. C’est pourquoi une communication claire sur les motivations du fabricant apparaît sur la boîte.»

Quoi qu’il en soit, le consommateur gagne au change, assure-t-elle. En effet, parce que les sandwichs ne sont plus emballés individuellement, le produit n’est plus assujetti aux taxes provinciale et fédérale.

 

Travailler ensemble

Le manque de communication est régulièrement pointé du doigt comme un facteur nuisant à l’économie circulaire des emballages de plastique à usage unique au Québec. Or, une poignée d’entreprises souhaitent faire tourner le vent. Au printemps 2019, cinq entreprises et un organisme — Cascades, Danone, Dyne-A-Pak, Keurig Dr Pepper Canada, TC Transcontinental et l’Association canadienne de l’industrie de la chimie — ont mis en place un tout nouveau partenariat, le Groupe d’action plastiques circulaires (GAPC).

Cette collaboration a pour objectif de bâtir une économie circulaire des plastiques au Québec et au Canada. Les six acteurs comptent miser sur un meilleur alignement entre la chaîne de valeur de la récupération et du recyclage et les marchés finaux pour les résines recyclées. Déjà, une première des trois phases de leur projet commun a été finalisée ce printemps. Financée par Environnement et Changement climatiques Canada, cette première étape du GAPC a permis d’établir une cartographie exhaustive de la chaîne de valeur du recyclage au Québec.

«L’exercice a également permis de trouver les solutions — technologies, procédés, etc. — susceptibles d’améliorer la qualité des plastiques recyclés pour mieux répondre aux exigences du marché», indique Charles David Mathieu-Poulin, conseiller principal en économie circulaire à TC Transcontinental.

La carte en question doit être rendue publique en juillet.

La deuxième phase du projet, qui doit prendre son envol d’ici la fin de l’année, prévoit des projets pilotes qui viendront confirmer le potentiel des solutions déjà en place. Au terme de ces deux phases, le GAPC espère disposer d’un modèle éprouvé pouvant être répliqué hors Québec.

 

Établir des partenariats

Depuis sa création, en 1967, l’entreprise montréalaise Les Papiers Atlas a toujours participé au stade de la préconsommation de l’économie circulaire. Spécialisée dans la transformation de cartons de grade commercial et d’emballages destinés aux fabricants de boîtes, la PME d’une dizaine d’employés revend, tous les mois, ses retailles, ses rejets et même ses mandrins — qui servent d’axes aux bobines de carton — à des recycleurs. Ceux-ci veillent à réacheminer la matière aux moulins à papier. «La valeur de ces ballots varie selon le prix du carton sur les marchés internationaux», souligne la présidente du transformateur, Mala Balshine. En 2020, c’est plus de 300 tonnes métriques de retailles et de mandrins qui ont été récupérées, précise-t-elle. Cela représente près de 1 % des revenus de l’entreprise.

Les Papiers Atlas introduisent également de la fibre de carton recyclé dans plusieurs de leurs produits. Depuis deux ans, la demande pour cette matière constitue plus de 35 % de sa production annuelle. «Cette demande provient en grande partie des compagnies pharmaceutiques et cosmétiques qui subissent des pressions de leur clientèle, soutient Mala Balshine. Ces industries réussissent à adopter des options d’emballage plus écologiques parce que leurs utilisateurs sont moins sensibles au prix, et donc plus susceptibles de payer davantage.»

Ce n’est pas encore le cas dans le domaine alimentaire. Mais un changement est à nos portes, avance-t-elle. Son entreprise surveille de près l’introduction d’un carton enduit d’une matière biodégradable qui résiste à la graisse alimentaire et à l’humidité. Une matière 100 % recyclable et recyclée qui pourrait éventuellement remplacer l’usage du polyéthylène dans plusieurs contenants.