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L’environnement et le «social» en priorité

Philippe Jean Poirier|Édition de la mi‑juin 2024

L’environnement et le «social» en priorité

(Photo:123RF)

Ingénieur: rayonner à l’étranger. Les cinq plus grandes firmes de génie du Québec sont occupées par la transition énergétique et les enjeux sociaux liés à leur pratique. Voici des nouvelles de WSP,
AtkinsRéalis, CIMA+, Tetra Tech et Englobe.

  1. WSP grossit ses rangs en « acceptabilité sociale »

En mars dernier, la firme de services professionnels WSP — dont le siège social se
situe à Montréal — a fait l’acquisition du cabinet albertain Communica, spécialisé dans
la « mobilisation des Autochtones et des parties prenantes ». Marie-Claude Dumas,
présidente et cheffe de la direction de WSP au Canada, attire l’attention sur le terme
« mobilisation », très important à ses yeux. « Autrefois, on parlait de la “gestion” des
parties prenantes, alors que, aujourd’hui, on reconnaît que les communautés
autochtones et toutes les autres parties prenantes à un projet doivent être “impliquées”
plutôt que simplement “gérées”. »

Communica intégrera la « communauté de pratique » de WSP en acceptabilité sociale.
L’acquisition est stratégique pour la firme. Lors du budget fédéral d’avril dernier, le
gouvernement libéral a annoncé qu’il offrirait aux communautés autochtones 5 milliards
de dollars en garanties de prêts à investir dans des projets liés aux ressources
naturelles et à l’énergie.

Plus largement, Marie-Claude Dumas rappelle que le principe s’applique à des projets
d’envergure réalisés au Canada. « On ne peut plus juste tenir compte du retour financier
sur l’investissement, dit-elle. Il faut aujourd’hui considérer les aspects environnementaux
et sociaux. » Pour la cheffe canadienne, l’acceptabilité sociale et la mobilisation des
parties prenantes sont les fils conducteurs qui permettent à WSP d’« intégrer » tous les
aspects de son offre de services professionnels.

  1. AtkinsRéalis se positionne sur l’hydrogène vert

En 2021, AtkinsRéalis avait annoncé son intention de se retirer du secteur du gaz et du
pétrole. Depuis, la firme de génie-conseil basée à Montréal a continué de placer ses
pions sur l’échiquier de la transition énergétique. Déjà présente sur des projets d’énergie
hydroélectrique, de ligne de transport et de distribution et d’énergie nucléaire, elle coche
dorénavant une nouvelle expertise en participant — depuis l’automne passé — au projet
« Mauricie » de TES Canada.

AtkinsRéalis a été retenue par TES Canada pour faire les travaux d’ingénierie et la
conception préliminaire de son usine de production d’hydrogène « vert » à Shawinigan.
« Après le projet Varennes, dans lequel nous ne sommes pas impliqués, c’est le
deuxième projet d’hydrogène vert au Québec. Et pour nous, c’est notre premier projet
d’hydrogène vert au Canada », rappelle Sébastien Mousseau, vice-président principal et
chef du marché mondial pour la Division de l’énergie et des énergies renouvelables
d’AtkinsRéalis.

Pour que l’hydrogène soit considéré comme « vert », il doit avoir été produit avec une
source d’énergie renouvelable. Donc, TES Canada alimentera son électrolyseur avec
1000 mégawatts provenant de sources d’énergie éolienne et solaire. « À l’heure
actuelle, il y a des secteurs qui sont difficiles à électrifier, explique Sébastien Mousseau.
Si on pense aux transports lourd, ferroviaire ou maritime, ou aux industries lourdes
comme les alumineries et les cimenteries, ces secteurs ont encore besoin de brûler
quelque chose. Le projet de TES s’inscrit dans la mouvance de trouver une molécule
propre à brûler, pour assurer la survie de ces industries. » AtkinsRéalis souhaite
demeurer un partenaire de TES jusqu’à la réalisation complète du projet.

  1. CIMA+ consolide ses avancées dans l’Ouest

Amorcée en 2007, l’aventure « hors Québec » de CIMA+ va bon train, puisque la firme
de génie-conseil basée à Laval compte aujourd’hui 20 bureaux dans le reste du Canada,
dont cinq en Colombie-Britannique. En février dernier, la firme a récolté les fruits de sa
démarche en devenant un partenaire de BC-Hydro pour accomplir un vaste plan
d’investissement en vue de moderniser son réseau électrique.

L’entente-cadre couvre une période de sept ans, avec une extension de 13 ans. Par
conséquent, ce mandat de « services d’ingénierie » pourrait potentiellement occuper
CIMA+ pendant les 20 prochaines années. « Un contrat d’une aussi longue durée,
personnellement, je n’ai jamais vu ça », affirme Steeve L’Heureux, premier vice-
président à l’énergie et aux ressources de CIMA+. Par ailleurs, le VP se réjouit de
l’approche de réalisation mise de l’avant par BC-Hydro. « Nous serons appelés à
réaliser un programme de projets, dans le cadre d’une équipe partenariale à long terme
avec BC-Hydro. Pour nous, c’est fantastique. »

Steeve L’Heureux attribue cette marque de confiance à la réputation que CIMA+ a bâtie
ces 30 dernières années dans le cadre de projets avec Hydro-Québec, mais aussi parce
que la firme peut mobiliser des ressources à l’échelle nationale. À court terme, le VP à
l’énergie et aux ressources voit deux défis pour CIMA+ : « Bien exécuter nos plans
d’embauche local et national. Et bien intégrer de petites firmes à la suite de leur
acquisition. »

  1. Tetra Tech s’intéresse à l’aluminium « vert »

L’aluminium « vert » a fait couler beaucoup d’encre au Québec depuis que Alcoa et Rio
Tinto ont annoncé leur intention, en 2018, de concevoir un procédé de fabrication de
l’aluminium sans émissions de gaz à effet de serre. Ce qu’elles seraient parvenues à
faire en 2021. Sans vouloir donner les détails de sa participation au déploiement de
cette technologie, Tetra Tech annonce vouloir être de la partie.

« Tetra Tech suit activement l’évolution et le développement de l’aluminium vert dans le
cadre de son engagement d’impacter la vie d’un milliard de personnes », nous a
expliqué en entrevue Marie Paule Barreto, vice-présidente aux bioénergies, carburants
et technologies propres de Tetra Tech. Pour rappel, la firme basée à Pasadena, en
Californie, a profité de la publication de son rapport d’écoresponsabilité 2022 pour
s’engager à améliorer les conditions de vie « d’un milliard de personnes d’ici 2030 »
(« 1 Billion People Challenge »). Pour y arriver, Tetra Tech participe à différents projets

d’ingénierie liés à la transition énergétique, incluant ceux visant à rendre la production
de l’aluminium moins polluante.

« Nous ne faisons pas de recherche et développement [en aluminium], précise Marie
Paule Barreto. Lorsqu’une nouvelle technologie est développée, nous regardons à
implanter les premières usines pilotes ou à intégrer les technologies aux usines
existantes. C’est l’expertise que l’on a développée en aluminium dans les 40 dernières
années. » Selon Marie Paule Barreto, Tetra Tech est déjà un acteur « important » dans
l’implantation de ce virage qui aura une incidence « majeure » sur l’industrie, dit-elle.

  1. Englobe développe son volet « social »

En mars dernier, Englobe a accueilli Geneviève David Watson à titre de directrice de la
Division environnementale, sociale et de gouvernance (ESG), un tout nouveau poste de
direction créé pour l’occasion. « Les critères ESG ont toujours fait partie de notre ADN,
mais c’était davantage une responsabilité collective, explique Mike Cormier, président
d’Englobe. Nous voulons maintenant un peu mieux encadrer et structurer notre
démarche auprès des employés. Nous voulons aussi renforcer le volet “S” de l’ESG. »

Le président d’Englobe place sous le thème « sociale » la décision de renforcer les
relations de la firme avec les Premières Nations. En 2021, Englobe a donné à son
directeur des relations avec les communautés autochtones, Edmond Collins, un rôle
national, alors que ses responsabilités se limitaient jusqu’alors à l’Ontario, et elle a lancé
le programme de formation Bearh, pour permettre le transfert de connaissances vers la
communauté lors des projets se déroulant en territoire autochtone.

Mike Cormier désire également associer au volet « social » l’engagement d’Englobe
auprès de la municipalité de La Baie, au Saguenay. En avril 2022, la firme a participé à
l’évacuation « urgente » des 230 résidents dont les 80 maisons situées sur un talus
étaient menacées d’un glissement de terrain. « Nos ingénieurs ont guidé la municipalité
dans la décision d’évacuer les lieux. Nous avons rapidement identifié le problème et
trouvé une solution pour rebâtir le talus », raconte fièrement Mike Cormier. Mentionnons
qu’Englobe a reçu pour cet engagement un Grand Prix du génie-conseil québécois
2023, dans la catégorie « Géotechnique et ingénierie des matériaux ».