Les incubateurs et les accélérateurs, la nouvelle tendance
Kévin Deniau|Édition de la mi‑septembre 2019Au lieu de créer son propre accélérateur, le Port de Montréal a fait appel au Centech, l’accélérateur fondé par l’École de technologie supérieure. (Photo: 123rf)
INNOVATION. Le Québec compte une soixantaine de structures qui offrent des services d’accélération d’entreprises, estime Louis-Félix Binette, directeur général du Mouvement des accélérateurs d’innovation du Québec. Une centaine si on y ajoute les incubateurs. «Cela pousse comme des champignons : Montréal en comptait moins de cinq il y a à peine trois ans, observe Aurélie Wen, directrice, Amérique du Nord, d’Agorize. Les grands groupes se tournent vers cette solution pour chercher de l’innovation ouverte.»
En octobre dernier, la coopérative laitière Agropur a ainsi lancé le premier accélérateur nord-américain spécialisé en produits laitiers, Inno Accel. «Il s’agit d’une démonstration claire de notre volonté de continuer de mettre de l’avant l’innovation ouverte afin de réinventer l’industrie laitière», témoignait à l’époque Robert Coallier, chef de la direction de l’entreprise dont le siège social est situé à Saint-Hubert.
Autre exemple : le programme d’accélération Startup en résidence lancé par le Mouvement Desjardins, à Montréal et à Québec, en juin 2017. Pour Martin Brunelle, vice-président, Transformation et bureau des projets chez Desjardins, l’objectif est d’encourager l’entrepreneuriat et de jouer un rôle socioéconomique dans le développement de la province. Mais aussi de pouvoir bénéficier de ces nouvelles idées. «C’est rafraîchissant de voir arriver des personnes qui viennent avec des solutions parfois plus simples que ce que nous pouvons concevoir», dit-il. Même si, pour l’heure, aucune relation d’affaires concrète n’a encore été nouée avec une des start-up participantes. Une simple question de temps, selon M. Brunelle.
Accélérer sa transformation numérique
Le Port de Montréal a opté pour une autre démarche. Au lieu de créer son propre accélérateur, l’entité fédérale s’est appuyée sur le Centech, l’accélérateur de l’École de technologie supérieure (ÉTS) fondé en 1996, et dont les locaux sont aujourd’hui situés dans l’ancien Planétarium Dow.
«Entre le Port de Montréal, qui a 200 ans d’histoire, et une start-up qui peut avoir 2 mois d’existence, le langage n’est pas nécessairement le même. Le Centech joue ainsi un rôle d’intermédiaire», précise Daniel Olivier, directeur de la veille stratégique et de l’innovation du Port de Montréal. Selon lui, le budget pour développer son propre incubateur aurait été au moins dix fois supérieur à ce que lui coûte son partenariat avec le Centech. De plus, il aurait fallu bâtir de zéro une expertise en matière de sélection et d’accompagnement de start-up, ainsi qu’une crédibilité aux yeux de l’écosystème et des autres jeunes pousses.
«Un des gros défis d’une start-up, c’est de trouver son premier client. D’où la création de ce programme d’innovation ouverte pour permettre à de grosses entreprises de se rapprocher d’un écosystème», explique Jean-Philip Poulin, coordonnateur d’innovation corporative au Centech. L’organisme compte dix cellules d’innovation que les grandes entreprises peuvent intégrer pour bénéficier de l’innovation ouverte de l’écosystème. Un après le lancement de ce programme, huit sont déjà occupées par des entreprises comme Thalès, CAE et Siemens, en plus du Port de Montréal.
«On ne veut pas des commanditaires qui mettent juste des logos sur des portes, mais des personnes qui s’impliquent dans l’écosystème pour accélérer l’innovation et le transfert technologique», assure M. Poulin. Les projets au sein des cellules durent en moyenne quatre mois, le temps de développer un livrable qui pourra ensuite être vendu à la grande entreprise partenaire.
Même s’il ne souhaite évoquer aucun chiffre – le site web de Centench indique que les frais d’admission au programme sont de 125 000 $ par année -, M. Olivier se dit très satisfait du rendement de l’investissement. «Le Port est ici pour accélérer son cycle d’innovation en ayant accès à un bassin de talents que l’on n’a pas chez nous, tout en limitant les risques. Bref, une fois qu’on a goûté à l’innovation ouverte, on ne peut qu’y revenir !»