Pyrowave a élaboré une technique innovante qui permet de retransformer le plastique en matière première.
LE MOIS DU GÉNIE. Le plastique est de plus en plus perçu comme une menace environnementale, mais les ingénieurs cherchent des solutions. Pyrowave, par exemple, une firme fondée par deux diplômés montréalais en génie chimique, a élaboré une technique innovante qui permet de retransformer le plastique en matière première.
À partir de cette idée, elle a ensuite mis au point une machine – un ensemble d’équipements modulaires de la taille d’un conteneur de transport – qui fonctionne un peu comme un four à micro-ondes et qui permet de transformer les déchets plastiques en matières premières. Celles-ci peuvent ensuite servir à reformer des plastiques neufs, entre autres.
Lauréate du Prix Génie innovation 2018 et fondée en 2014, Pyrowave se lance cette année dans la commercialisation de son idée. Elle devrait ainsi installer, avant la fin de 2019, une première unité dans un centre de recyclage en Ontario.
Qu’est-ce qui distingue le procédé de Pyrowave des autres procédés de recyclage ?
La méthode la plus courante de recycler le plastique consiste essentiellement à trier d’abord les plastiques pour réunir ceux qui sont du même type, à les laver, puis à les fondre pour reformer ensuite d’autres produits. Aujourd’hui, cependant, de nouvelles méthodes de recyclage ayant des avantages distincts commencent à être développées. Le recyclage chimique en est une, et c’est ce que fait Pyrowave.
« Ce que fait notre procédé, c’est de prendre le plastique et de le ramener sous sa forme initiale. On se retrouve au bout de la machine avec du liquide, des monomères, soit les produits chimiques initiaux qui composent le plastique », explique Jocelyn Doucet, cofondateur et PDG de Pyrowave.
De nouveaux marchés possibles
Le procédé de Pyrowave est avantageux, notamment parce qu’il permet d’ouvrir de nouveaux marchés pour le plastique recyclé.
Normalement, dans le procédé traditionnel de recyclage, le plastique est simplement fondu : il peut donc être utilisé simplement pour reformer de nouveaux produits de plastique du même type. Mais le procédé chimique utilisé par Pyrowave, puisqu’il ramène le plastique sous forme de monomères, ouvre la voie à de nouveaux marchés et à de nouvelles utilisations.
Le polystyrène, par exemple, est un des principaux plastiques visés par Pyrowave. Il est formé à partir d’un monomère appelé « styrène ». Et ce monomère a plusieurs utilisations. Il entre, par exemple, dans la fabrication de polystyrène, mais aussi dans la fabrication d’ABS, un polymère utilisé notamment dans les ordinateurs portables, en plus d’entrer dans la composition de plusieurs produits autres que le plastique.
M. Doucet estime que le recyclage du plastique est la question de l’avenir. « Jusqu’à aujourd’hui, la production industrielle consistait à extraire des matières premières pour en faire des produits, dit-il. On doit maintenant apprendre à faire l’inverse. Mais pour ça, toutes les disciplines de la chimie doivent être impliquées, de la chimie industrielle à la chimie analytique en passant par le génie chimique. »
Composter le plastique
Pour l’instant, à l’échelle mondiale, seulement 14 % des plastiques sont recyclés, note Basil Favis, professeur au département de génie chimique de Polytechnique Montréal qui se spécialise en polymères. Il reste donc beaucoup de travail à faire, et, selon lui, la solution passe notamment par le développement de nouvelles technologies et techniques de recyclage.
Une des avenues prometteuses qu’il aperçoit est celle des plastiques produits à partir d’autres ressources que le pétrole. Le PLA, objet de beaucoup de recherches dans un grand nombre d’universités en Amérique du Nord, en est un exemple. Produit à partir de maïs, il se biodégrade relativement rapidement. Il peut même être composté au moyen d’équipements industriels.
C’est là un avantage notable, entre autres parce que ce plastique répond à une difficulté bien connue du procédé de recyclage conventionnel : celui du plastique souillé.
« Le plastique conventionnel est difficile à recycler s’il a été en contact avec de la nourriture. Mais pour le PLA, que l’on peut composter, cela ne pose aucun souci », explique M. Favis. Impliqué dans la recherche sur le PLA, il dirige également le Centre de recherche sur les systèmes polymères et composites à haute performance.
Le PLA, s’il présente certains avantages, n’arrive toutefois pas à la cheville des autres plastiques en ce qui a trait à certaines propriétés importantes. Ce plastique est par exemple souvent moins ductile que l’ABS. « L’avenir du plastique ne passe pas par une solution unique, dit M. Favis. Il faudra élaborer différentes solutions de recyclage, et choisir différents plastiques pour différentes applications. Et pour y arriver, tout le monde doit y mettre du sien, des chimistes aux administrateurs de sociétés en passant par les ingénieurs. »