Chloé Freslon, fondatrice d’Urelles, une entreprise qui propose des solutions innovantes en EDI pour les organisations (Photo: courtoisie)
LEADERSHIP INCLUSIF. Dans le cadre d’une politique volontariste en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI), mettre des chiffres sur les manquements en interne revêt une importance capitale. Il faut déterminer les inégalités, les rendre tangibles, pour être en mesure de les corriger. Pour ce faire, plusieurs stratégies existent.
« Notre équipe, dans tous ses aspects, doit refléter l’image du Canada contemporain ». Voilà l’objectif auquel s’affairent quotidiennement Sandra Houillier, responsable du volet « Capital humain » au sein de Deloitte Canada et sa collègue Samantha Welscheid, responsable du volet « Culture & People Leader ». La représentation des autochtones au sein de l’entreprise est l’un de leurs chevaux de bataille. « Nous sommes très investis sur cette question au point d’avoir conclu un partenariat avec une école dans l’Ouest, leader sur l’éducation des autochtones, explique Sandra Houillier. En tant que Française, je n’étais pas vraiment sensibilisée à la réalité de la sous-représentativité de cette population au sein des organisations ».
Pour tenter de remédier à cette situation, Deloitte a pris les devants. Outre cet aspect formation professionnelle, l’entreprise a ouvert un bureau dans l’Ouest du pays « afin d’être au cœur de cette communauté », comme le précise Sandra Houillier. Le manque de personnes autochtones dans la sphère professionnelle n’est pas l’apanage de Deloitte, comme en atteste un rapport de la banque de développement du Canada (BDC) publié en 2021 et intitulé « Diversité et inclusion dans le portefeuille de capital de risque de BDC Capital ». Celui-ci souligne que sur les 1 900 répondants à cette étude seulement quatre sont autochtones.
Les êtres humains derrière les chiffres
Deloitte utilise également les sondages d’auto-identification, utiles mais qui, seuls, demeurent insuffisants. C’est du moins le sentiment de Chloé Freslon, fondatrice d’Urelles, qui propose des solutions innovantes en EDI pour les organisations. « Ils doivent être accompagnés de sondages de perception qui permettent de mesurer davantage le sentiment d’inclusion. En croisant ces deux sources de données, l’une autour de la diversité et l’autre autour de l’inclusion, l’entreprise peut ajuster sa politique EDI en conséquence », explique la dirigeante.
Cet équilibre peut parfois se révéler complexe à atteindre puisque derrière ces chiffres se cachent des êtres humains dotés de leur propre sensibilité. Les « statistiques brutes » peuvent parfois fournir des enseignements à rebours de la réalité. À l’image de ces organisations qui se prévalent d’une parfaite représentativité entre hommes et femmes sur l’ensemble de leurs employés… quand leur seul comité de direction est très loin de la parité.
Exercice de transparence
Certaines entreprises jouent toutefois le jeu de la transparence dans toutes leurs strates, mettant de l’avant tant leurs progrès que le chemin qui leur reste à parcourir. Pascale Alpha, cheffe de la direction de la diversité, de l’équité et de l’inclusion au sein de CAE, spécialiste des technologies de simulation et de formation destinées à l’aviation civile et aux forces de défense, se livre volontiers à l’exercice, chiffres à l’appui. « Sur l’ensemble de nos employés, seulement 18 % d’entre eux étaient des femmes en 2018. Une proportion qui s’élève en 2023 à 23 %. La progression est davantage manifeste au niveau de notre exécutif et de nos “VP” puisque nous sommes passés, sur le même laps de temps, de 15 à 25 % ». Pour autant, il ne s’agit nullement d’une politique de quotas. Le personnel est recruté en raison de sa compétence.
Tous les trimestres, la responsable rend également compte à son président de ces questions de diversité et d’inclusion. « L’exemple doit venir d’en haut et tout le monde dans l’entreprise doit être concerné ». Un parti pris auquel souscrit volontiers Céline Morellon, fondatrice de Leaders d’avenir, qui met en place des programmes en lien avec ces thématiques dans les entreprises qui désirent progresser sur ces sujets. « Il faut permettre à chaque individu d’utiliser son plein potentiel afin de contribuer à la mission du groupe auquel il appartient ». Selon elle, la diversité n’est pas suffisante, c’est l’inclusion qui doit être l’objectif. « Cette dernière n’est pas un sprint mais un marathon », ajoute-t-elle. Une chose est certaine : si la ligne d’arrivée est encore lointaine, chaque foulée ressemble à une petite victoire dans cette course à un monde plus juste et équitable.