[Photo: 123RF]
LES GRAND(E)S DE LA GOUVERNANCE — En cinq ans, la rémunération des administrateurs de sociétés cotées a connu une hausse, les attributions d’options ont perdu en popularité et les femmes ont gagné un peu de terrain.
Le rapport que vient de publier la Chaire de recherche en gouvernance de sociétés de l’Université Laval montre que, de 2013 à 2018, la rémunération des administrateurs a augmenté, pour atteindre une moyenne de 141 000 $.
Pour effectuer son calcul, la Chaire a comparé l’état de 2013, qui comptait 949 administrateurs dans 105 sociétés québécoises inscrites à la Bourse TSX, à celui d’aujourd’hui, qui compte 782 administrateurs dans 87 sociétés.
Les données révèlent une hausse de 18 % du salaire moyen des membres externes, celui-ci passant de 119 000 $ à 141 000 $. Ce pourcentage est encore plus élevé si l’on considère les médianes des mêmes périodes, 82 000 $ et 113 000 $, ce qui correspond à une augmentation de 38 %, ou 6,6 % annuellement.
«La médiane représente un indice plus juste, parce que si l’on se réfère à la moyenne, laquelle est affectée par des valeurs extrêmes, on porte une conclusion sur la base du salaire d’un seul individu», explique Jean Bédard, professeur et titulaire de la Chaire.
Qu’il y ait une augmentation ne surprend pas Nathalie Francisci, associée à Odgers Berndtson, où elle s’occupe du recrutement de dirigeants et d’administrateurs pour des entreprises publiques et privées, ainsi que pour des sociétés d’État. «La responsabilité des administrateurs s’est accrue, en particulier celle des présidents de comités d’audit et de rémunération. Siéger aujourd’hui à un conseil d’une entreprise publique demande beaucoup plus que quatre rencontres par année. Ça se reflète de plus en plus dans la rémunération», dit-elle.
Le revenu médian des présidents de conseil d’administration (CA) connaît également une hausse, cette fois de 18 %. La médiane de 167 000 $ représente en 2018 une fois et demie celle des autres membres de sociétés.
Plus d’actions, moins d’options
Les attributions d’actions restent à ce jour la deuxième forme de rémunération la plus courante, précédée par les honoraires qui, en 2018, représentent plus de la moitié (58 %) du salaire et sont distribués à presque tous (93 %) les administrateurs de sociétés.
La grande différence en cinq ans s’observe dans la perte de popularité des options, au profit des actions. Selon les données de la Chaire, près du quart (21 %) des administrateurs recevaient des options en 2013, alors que le taux atteint aujourd’hui 12 %. La proportion de ceux recevant une rémunération sous forme d’actions a quant à elle augmenté, passant de 38 % à 51 %.
Cette baisse est notamment due au fait qu’on reproche à ce mode d’attribution d’être lié presque exclusivement au prix de l’action et de perdre sa valeur incitative lorsque ce prix est inférieur à celui d’exercice des options. «Cette forme de rémunération peut donc encourager une gestion à court terme ainsi que la prise de risques indus, indique Yvan Allaire, président exécutif du conseil de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP). On constate donc, tant pour les dirigeants que pour les administrateurs, un déplacement vers les programmes incitatifs liés aux actions, lesquels sont souvent conditionnels à l’atteinte d’objectifs de performance et gardent une valeur incitative, même en cas de baisse du prix de l’action.»
La rémunération sous forme d’actions représente aujourd’hui le tiers (32 %) du salaire total des administrateurs, contre le quart (24 %) en 2013. Les options équivalent quant à elles à 5 %, soit une diminution de plus de moitié par rapport à 2013. «Les options ont beaucoup été critiquées au cours des dernières années, parce qu’elles peuvent inciter des comportements contraires au bon alignement sur les intérêts des actionnaires, souligne M. Bédard. C’est la raison pour laquelle elles sont moins favorisées.»