«Les consommateurs sont très intéressés à ce genre de produits, ce qui encourage de nouveaux joueurs à se lancer», souligne Jean-François Cloutier, président de l'Association des microdistilleries du Québec (AMDQ) et copropriétaire de la Distillerie du St. Laurent, qui produit le gin du même nom. (Photo: courtoisie)
TRANSFORMATION ALIMENTAIRE. L’engouement pour les spiritueux québécois ne se dément pas, et les distillateurs misent de plus en plus sur les produits locaux. Les petites entreprises pourraient bientôt compter sur de nouvelles certifications pour mousser leurs produits, mais elles doivent encore composer avec certains irritants.
De plus en plus de Québécois osent se lancer dans la distillation. La Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) n’avait décerné que 21 permis à cet effet dans la province avant 2016. Puis, entre 2016 et 2018, elle en a remis 33. Ce chiffre pourrait encore grimper, puisque 39 demandes de permis étaient toujours en évaluation en 2018.
«Les consommateurs sont très intéressés à ce genre de produits, ce qui encourage de nouveaux joueurs à se lancer», souligne Jean-François Cloutier, président de l’Association des microdistilleries du Québec (AMDQ) et copropriétaire de la Distillerie du St. Laurent, qui produit le gin du même nom. «Nos ventes ont continué d’augmenter même avec l’arrivée de plusieurs nouveaux distillateurs artisanaux.»
Des irritants
L’industrie provinciale des microdistilleries est en émergence depuis à peine cinq ans, et un travail est en cours pour éliminer les irritants qui entravent sa croissance. Ainsi, depuis juillet 2018, les distillateurs locaux peuvent vendre leurs produits sur leurs lieux de production. La Société des alcools du Québec (SAQ) récolte toutefois un profit dépassant 50 % du prix d’une bouteille, contrairement à ce qui se fait dans certaines autres provinces. La Société des alcools du Nouveau-Brunswick n’exige, par exemple, aucune majoration pour les bouteilles vendues sur les lieux de production.
«Les producteurs souhaitent que davantage d’argent de leurs ventes sur place leur revienne, afin de pouvoir développer leur entreprise et viser des marchés d’exportation, affirme M. Cloutier. Présentement, c’est très difficile d’y arriver. À l’inverse, on voit apparaître sur les tablettes de la SAQ des spiritueux d’ailleurs au Canada ou des États-Unis, où les producteurs sont mieux soutenus.»
De nouvelles certifications
À l’heure actuelle, plusieurs producteurs achètent de l’alcool neutre en Ontario afin de réaliser des économies sur leurs coûts de production. D’autres préfèrent utiliser des grains ou différentes matières 100 % locales. C’est le cas des membres de l’Association des distilleries artisanales du Québec (ADAQ). «Nous travaillons avec d’autres partenaires de l’industrie et le gouvernement au développement d’une certification pour les produits entièrement composés de matières québécoises», indique Michel Goyer, conseiller de l’ADAQ.
Certains producteurs qui utilisent de l’alcool neutre ont publiquement critiqué l’idée d’une telle certification. Selon Nicolas Duvernois, PDG de PUR Vodka, et François Pouliot, fondateur du Domaine Neige, entre autres, l’alcool neutre n’ayant par définition aucun goût, son impact sur le produit final est nul et les économies que permet son utilisation sont cruciales pour demeurer rentable et se développer.
La certification ACERUM est aussi en cours de développement. Elle identifiera les spiritueux faits dans la province à partir de produits de l’érable, comme le sirop ou l’eau. «Ces alcools pourraient devenir emblématiques du Québec, comme le scotch l’est de l’Écosse, le cognac de la France ou l’agave du Mexique», espère M. Cloutier, dont la distillerie est l’un des trois membres de l’Union des distillateurs de spiritueux d’érable, aux côtés du Domaine Acer et de la Distillerie Shefford.