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Du génie au service de l’environnement

Jean-François Venne|Publié le 23 septembre 2019

Du génie au service de l’environnement

La plage de galets de la Ville de Percé, conçue par Tetra Tech. (Photo: courtoisie)

LES GRANDS DE L’INGÉNIERIE. Chaque année, les grandes firmes de génie du Québec sont appelées à réaliser des projets pour préserver l’environnement, réduire les émissions de polluants ou protéger le territoire des déchaînements de la nature. En voici deux exemples.

À Percé, le mur de béton qui protégeait depuis les années 1960 le littoral de l’anse du Sud était arrivé en fin de vie, et les infrastructures temporaires ne permettaient plus de bien protéger le littoral. Il fallait ériger un nouvel ouvrage pour combattre l’érosion des côtes gaspésiennes. 

Plutôt que rebâtir un nouveau mur de béton, la firme Tetra Tech a exploré des possibilités plus novatrices. Elle a opté pour la recharge de plage avec des galets. «Il s’agit d’un site très touristique, et cette approche s’intégrait mieux à l’environnement visuel », précise l’ingénieur Jean Gauthier, directeur de la division Ressources Eau de l’entreprise. Cette méthode s’inspire d’ailleurs grandement de la nature: des photos d’archives du début du siècle dernier montrent des plages de galets à Percé. 

La manœuvre a nécessité le transport de près de 120 000 tonnes de gravier vers l’anse du Sud. Le projet a été réalisé en 18 mois, entre janvier 2017 et juin 2018. 

Les ingénieurs disposaient de modèles partiels pour caractériser les vagues, le vent et les tempêtes, et donc déterminer les volumes et l’emplacement du gravier. Il fallait aussi choisir des galets de la bonne taille. Trop gros, ils empêcheraient les gens de marcher sur les plages. Trop petits, ils se déplaceraient trop facilement sous l’effet des éléments.

«L’ouvrage a démontré son efficacité, notamment lors du passage de l’ouragan Dorian, se réjouit M. Gauthier. Il faudra apporter des ajustements ponctuels et ajouter des galets aux cinq ou dix ans, mais il a une durée de vie d’une bonne cinquantaine d’années.»

 

Un voisinage fructueux

De son côté, la firme BBA s’est attaquée aux émissions de dioxyde de carbone (CO2) de l’usine de Produits forestiers Résolu (PFR), à Saint-Félicien, au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Pour les réduire, elle a mis à contribution une enzyme, l’anhydrase carbonique, ainsi que l’entreprise voisine de l’usine, les Serres Toundra.

«Le ‘poumon industriel’ installé à l’usine de PFR capte les émissions de dioxyde de carbone des cheminées industrielles, avant de les purifier à un très haut niveau dans une usine à l’aide de l’enzyme», explique Pierre-Olivier Vincent, directeur de projet pétrole, gaz et biocarburants chez BBA. Les Serres Toundra peuvent ensuite utiliser ce CO2 «de grade alimentaire» pour nourrir ses plants de concombres. L’entreprise n’a donc plus à brûler du méthane pour produire du CO2.

«C’est le premier projet du genre, et sa conception a exigé une grande collaboration entre la science pure et la science appliquée, explique Lyne Ricard, directrice exécutive, pratique de gestion de projet chez BBA. Adapter les concepts développés en laboratoire à une échelle industrielle a nécessité beaucoup de patience et d’ingéniosité.»

Il fallait notamment maximiser la durée de vie des enzymes, ce qui est beaucoup plus difficile à faire dans des équipements industriels que dans un bécher de laboratoire. Les opérations devaient aussi être adaptées au rythme des plantes, qui ne consomment pas toujours la même quantité de CO2 au cours d’un cycle de 24 heures. L’usine de PFR s’arrête donc la nuit et redémarre chaque matin, ce qui est très inhabituel. 

«Ces défis étaient très stimulants pour l’équipe de BBA, souligne Mme Ricard. Nous aimons les projets qui demandent d’être très innovants.»