« Nous avons complètement revu le processus d’accès au permis des candidats formés à l’étranger afin de le rendre plus efficace. » – Kathy Baig, présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec (photo: courtoisie)
LES GRANDS DE L’INGÉNIERIE. Depuis le 1er avril, les demandeurs de permis d’ingénieur doivent satisfaire aux exigences d’un nouveau programme de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ). Dans trois ans, celui-ci aura complètement remplacé l’actuel programme de «juniorat».
«Nous souhaitons mieux accompagner les candidats et leur permettre d’arriver les plus prêts possible en vue de l’obtention de leur permis de pratique», explique la présidente de l’Ordre, Kathy Baig.
Le nouveau programme comporte plusieurs changements. Il vise d’abord à renforcer les liens entre le stagiaire et la personne chargée de sa supervision, car il semble que ceux-ci étaient parfois un peu trop distendus, ce qui ne permettait pas un transfert des connaissances aussi efficace que souhaité. La nouvelle mouture du programme prévoit donc davantage de rencontres et d’échanges entre les deux parties.
En vue de l’examen professionnel obligatoire à l’obtention du permis, les candidats devront désormais suivre une formation théorique en ligne d’environ 30 heures. Celle-ci est interactive et peut être suivie au moment qui convient le mieux aux candidats.
Le volet pratique n’échappe pas non plus à cette réforme majeure. Les candidats devront désormais acquérir six compétences précises, dont celles de communiquer efficacement, de résoudre des problèmes et de gérer les risques, en au moins 24 mois d’expérience pratique. Ces compétences seront évaluées par un ingénieur cumulant au moins trois ans d’expérience. Comme les candidats auparavant disposaient de trois ans pour les acquérir, ce changement pourrait accélérer l’accession de certains à la profession, et ce, dans un contexte où les firmes s’arrachent les ingénieurs à cause de leur rareté. «La modification n’a pas été faite pour cette raison, mais elle pourrait effectivement avoir un effet positif en ce sens», admet Mme Baig.
Autre grand changement : les candidats ont désormais un maximum de cinq ans après l’obtention de leur diplôme en génie pour s’inscrire au programme d’accès à la profession, et de cinq ans pour le réussir. La version antérieure ne comportait aucune limite de temps.
Formations à l’étranger à reconnaître
Devant la rareté de la main-d’oeuvre, les firmes d’ici sont tentées de recruter à l’étranger. Des ingénieurs venus d’autres pays décident aussi volontairement de venir s’établir au Québec. Dans les deux cas, toutefois, il n’est pas toujours facile d’obtenir un permis de pratique québécois.
Depuis mai 2018, l’OIQ applique un nouveau règlement concernant l’équivalence de diplôme et de formation, qui prend davantage en compte le parcours professionnel individuel de chaque candidat. Auparavant, l’Ordre se basait surtout sur les études réussies dans d’autres pays pour établir les compétences supplémentaires que le candidat devait acquérir pour pratiquer dans la province. Or, dans certains cas, les candidats ont acquis ces compétences pendant leur parcours professionnel. Ils ont désormais la chance de le démontrer au moment de leur demande de permis.
Avant les changements réglementaires, lorsque des lacunes étaient repérées à la suite de l’étude de son dossier, le candidat se faisait essentiellement demander de réussir un examen dans le domaine concerné. Il aura maintenant accès à de nouveaux outils, tels un cours universitaire ou un stage supervisé. «Nous avons complètement revu le processus d’accès au permis des candidats formés à l’étranger afin de le rendre plus efficace», résume Mme Baig. Plus d’un an après ces modifications, la présidente constate que le nombre d’examens a diminué de moitié, comme l’OIQ a tenu compte du parcours professionnel des candidats dans de nombreux cas. Le temps nécessaire pour l’obtention d’un permis de pratique a lui aussi diminué de moitié.
Bien d’autres dossiers occuperont l’OIQ au cours des prochains mois. La consultation parlementaire sur le projet de loi 29 qui modifie le Code des professions et la Loi sur les ingénieurs, laquelle date de 1964, en constitue un gros morceau. Ce projet propose notamment une meilleure reconnaissance des spécialisations qui n’existaient pas à l’époque, que ce soit les génies logiciel, informatique ou biomédical.
Quant aux membres de l’Ordre, ils s’attendent à ce que ce dernier continue de batailler pour redorer le blason de la profession d’ingénieur. Après presque quatre ans, les effets de la commission Charbonneau se font moins sentir, mais certains dossiers sont encore devant les tribunaux. Il n’est pas rare de voir l’un d’entre eux refaire surface dans les manchettes. En juillet dernier, par exemple, lorsque André Mathieu, ex-cadre supérieur de CIMA+, a plaidé coupable à des accusations de collusion dans l’octroi de contrats publics à Gatineau entre 2003 et 2009.
Tout de même, après avoir atteint un creux historique en 2013 (49 %), le degré de confiance du public à l’égard des ingénieurs est remonté à 73 % en 2017. Soit 4 % de plus qu’à la création de la commission Charbonneau, en 2011.