Patrick Doyle est propriétaire commun dans les 23 succursales du réseau d’optométristes et d’opticiens Doyle, qui sont dirigées par différents propriétaires. Il accompagne ses futurs partenaires dans la reprise de ses succursales. (Photo: courtoisie)
REPRENEURIAT. Patrick Doyle, qui préside le réseau d’optométristes et d’opticiens Doyle, est un oiseau rare en matière de repreneuriat.
Il s’y connaît vraiment, car en plus d’avoir repris en 2015 l’entreprise fondée par son père en 1978, il accompagne ses futurs partenaires dans la reprise de succursales qui seront conjointement détenues. Il pratique donc le corepreneuriat.
« Je suis propriétaire commun dans mes 23 succursales, qui sont dirigées par différents propriétaires opérant à chaque endroit, explique-t-il en entrevue téléphonique. C’est un modèle plutôt rare. »
Le groupe Doyle, dont il est actionnaire avec son père et son partenaire d’affaires, Karl Brousseau, gère le développement des affaires, le marketing, la finance, la comptabilité, etc., pour l’ensemble des succursales détenues par la maison mère. De leur côté, les opticiens et optométristes propriétaires de chacune des boutiques se chargent du volet clinique, de la relation avec les clients ainsi que de la sélection des montures et autres produits.
Depuis 2015, le groupe Doyle a ainsi repris une douzaine d’établissements au Québec afin de s’étendre. « Normalement, on se fait contacter par un cédant, explique l’homme d’affaires. Souvent, il y a une personne sur place qui souhaite prendre la relève. Le profil type, ce sont des gens avec la fibre entrepreneuriale, mais qui veulent la sécurité de partager les décisions. »
Doyle offre ce genre d’entrepreneuriat hybride puisqu’une grande partie des tâches sont assumées par la maison mère, poursuit-il. « C’est rare les opticiens qui sont passionnés par la comptabilité. Ils sont contents de servir la clientèle tandis qu’on s’occupe des baux, du marketing, etc. »
Patrick Doyle note qu’il arrive souvent que son groupe achète entièrement un propriétaire de lunetterie indépendante, avant de trouver la bonne personne pour diriger la boutique qui deviendra son associée localement. L’acheteur se finance de son côté, mais le partenariat avec Doyle aide grandement.
« Ils ont accès à nos banquiers avec qui on a bâti une relation, explique-t-il. On est des facilitateurs même si l’acquéreur est indépendant pour son financement. »
Dans ces transactions repreneuriales, Doyle sert donc à la fois au cédant et à l’acquéreur. « On appuie le repreneur, qui se sent mieux parce qu’on agit comme courroie de transmission, donc cela va sécuriser le vendeur. »
Coup de foudre
Avant de conclure une entente de partenariat localement, Patrick Doyle s’assure de partager les mêmes valeurs et visions que la personne intéressée. « Cela prend une philosophie alignée et des personnalités qui correspondent. Une fois, on s’est retiré d’une négociation parce qu’on n’arrivait pas à parler au vendeur. On s’adressait seulement aux avocats. Le dialogue était trop rigide. »
Le courant est cependant très bien passé avec Vanessa Sansregret, une opticienne qui travaillait chez Joly Optométriste, un commerce de Joliette qui est entré dans le giron de Doyle avec elle comme copropriétaire en novembre 2018.
« C’était un coup de foudre professionnel lorsque j’ai rencontré Patrick, explique celle qui avait toujours voulu diriger cette boutique depuis son embauche en 2014. Le contact humain a fait la différence. »
« Au début, j’avais peur d’être avec quelqu’un d’autre, car je craignais d’être freinée dans mes idées, mais avec Doyle, je pouvais participer à ma manière au renouveau de ce groupe dynamique et avant-gardiste, ajoute-t-elle. Je me rends compte que j’étais faite pour œuvrer en équipe. C’est la meilleure décision que j’ai prise. »
La femme dans la mi-trentaine explique que l’appui de son partenaire pour informatiser ses opérations et même trouver de la main-d’œuvre a contribué au succès de sa boutique. « J’ai remercié la vie plusieurs fois d’être accompagnée par le groupe Doyle durant la pandémie ! » souligne-t-elle.
La beauté de ce modèle d’affaires, d’après Patrick Doyle, c’est un service beaucoup plus attentionné pour le client, car les partenaires sur place sont très engagés. Le partage des décisions vient cependant avec une certaine lourdeur. « Cela nous oblige à communiquer et à être très présents, note le président. On ne peut pas prendre une décision sans bien l’expliquer. »
L’entrepreneur estime que la démarche de son entreprise l’amène sur un chemin où sa croissance ne sera pas exponentielle. Deux acquisitions sont prévues cette année.
« Notre croissance est soutenue, mais disciplinée, car je ne veux pas mettre une pression indue sur notre équipe de gestion, déclare-t-il. Toutefois, notre industrie a vécu une énorme vague d’entrepreneuriat dans les années 1990. On constate un essoufflement des propriétaires indépendants qui commencent à chercher une relève. Il y aura donc beaucoup d’occasions pour notre entreprise dans les années à venir. »