Le port de Montréal perd des volumes en raison de sa mauvaise réputation
François Normand|Mis à jour le 11 novembre 2024Des navires en train de charger des conteneurs au port de Montréal. (Photo: AdobeStock)
La perte de volumes au port de Montréal en raison des grèves successives n’est plus un risque, c’est devenu une réalité. Des armateurs internationaux choisissent désormais d’autres ports nord-américains parce qu’ils estiment que le service n’est plus fiable dans le principal port de l’est du Canada, affirme la PDG de l’Administration portuaire de Montréal (APM), Julie Gascon.
«Il faut qu’on fasse quelque chose, parce qu’on est en train de perdre notre réputation, que ce soit avec les marchés dans l’Asie, que ce soit avec l’Europe», déclare-t-elle à Les Affaires, en marge d’une allocution prononcée ce jeudi devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, au cours de laquelle elle a expliqué que la situation est critique au port.
«En 2021, quand il y a eu la grève, ç’a fait très, très mal. Ç’a pris du temps à récupérer, ce volume-là. On était en train de remonter. Mais dès que les négociations ont recommencé et que les gens ont vu la tension, puis comment ça évoluait… Depuis 2024, je suis en baisse. Entre 2022 et 2024, j’ai perdu 24% de volume. C’est énorme», souligne-t-elle en entrevue.
Quand on lui demande si on ne peut pas attribuer ce recul à d’autres facteurs que celui de la mauvaise réputation du port de Montréal dans l’industrie maritime mondiale, sa réponse est sans équivoque.
«Mais à quoi d’autre puis-je l’attribuer? C’est sûr qu’il y a d’autres facteurs. Il y a peut-être l’inflation, il y a peut-être le coût des marchandises. Mais essentiellement, les lignes maritimes ont besoin de certitude. Mon bateau va-t-il accoster? Va-t-il décharger? Va-t-il être rechargé? Va-t-il repartir?», explique-t-elle.
La PDG de de l’Administration portuaire de Montréal (APM), Julie Gascon (Photo: APM)
Les armateurs choisissent des ports fiables
Julie Gascon rappelle que les contrats portuaires fonctionnent avec une facturation qui repose sur le temps de chargement et de déchargement.
Par conséquent, les transporteurs maritimes ne peuvent pas faire autrement que de choisir un port «où il y a de la certitude que le service va être donné», insiste-t-elle, en précisant que le port de Montréal «paie le prix tous les jours» pour ce manque de certitude.
L’Administration portuaire de Montréal (APM) gère les opérations du port.
En revanche, elle n’est pas l’employeur des débardeurs qui sont en processus de renouvellement du contrat de travail depuis plus d’un an avec les employeurs maritimes, et dont les nombreux moyens de pression perturbent les opérations dans le port depuis quelques semaines.
Depuis 2020, quatre grèves ont perturbé le service au port de Montréal.
Ottawa doit intervenir pour régler le conflit
Lors de son allocution, Julie Gascon a expliqué que la situation au port de Montréal est à ce point critique qu’il faut qu’Ottawa – les ports sont de juridiction fédérale – intervienne pour mettre fin à ce conflit qui persiste depuis des années et qui entraîne des répercussions majeures sur l’économie, les entreprises et la communauté.
Elle n’a toutefois pas indiqué à l’auditoire de 450 gens d’affaires les moyens concrets que le gouvernement fédéral pourrait pendre pour ramener une paix dans les relations de travail au port de Montréal.
En entrevue, Julie Gascon n’a pas non plus voulu se prononcer davantage à ce sujet.
«Le gouvernement du Canada, avec son service de médiation fédérale, est au fait des négociations entre les employeurs maritimes et les débardeurs. Ils les appuient depuis le début des négociations. C’est eux qui connaissent la situation beaucoup plus profondément que moi, je la connais. C’est sûr que je reçois des exposés, que je suis en contact, mais c’est vraiment le gouvernement fédéral qui a en main l’information pour choisir le meilleur mécanisme pour agir», dit-elle.