Le Centre de recherche industrielle du Québec joue ce rôle d'accompagnement des entreprises pour découvrir et adopter ces technologies de rupture peu offertes sur le marché. «En dehors du monde universitaire, on a été les premiers à s'équiper d'une imprimante 3D métallique en 2014», se remémore François Gingras, son directeur du développement et de l'accompagnement technologique. (Photo: courtoisie)
MATÉRIAUX AVANCÉS. Développer des pièces plus légères et qui permettent de réduire le bruit des moteurs d’avion : c’est l’un des objectifs de la Chaire industrielle Safran de fabrication additive des composites à matrice organique (FACMO), créée au sein de Polytechnique Montréal en 2018. «Cela nous permet de faire une recherche centrée sur le besoin des industriels et de viser une application finale concrète, ce qui est très formateur pour les jeunes qui travaillent sur le projet», témoigne Daniel Therriault, professeur et titulaire de la Chaire.
Ce type de collaboration entre industrie et monde universitaire est en effet un facteur clé de succès dans le développement des uns et des autres. «On pourrait faire sans, mais cela serait un frein très important à l’innovation et à l’essor de la fabrication additive au Québec», constate Andro Vachon, enseignant au cégep de Thetford et chercheur au Centre de technologie minérale et de plasturgie. «Ne pas travailler avec des universités ou des centres de recherche, c’est rester dans un «statu quo» technologique», confirme Stéphane Goulet, responsable de l’innovation pour la fabrication additive chez Bombardier Transport.
Ce dernier a par exemple collaboré avec l’Université McGill pendant six mois et a réussi à créer en impression 3D une pièce, potentiellement destinée au métro de Montréal, qui remplace un assemblage de sept composants différents. «Nous n’aurions jamais pu le faire à l’interne, car cela a nécessité des connaissances de recherche fondamentale dans plusieurs domaines et un accès aux imprimantes», admet-il. «Ces centres et laboratoires viennent pallier le manque de ressources et de connaissances de l’industrie, car nous disposons d’équipements qu’il ne serait pas rentable d’acheter pour la majorité d’entre eux,» indique Andro Vachon.
Un vrai modèle gagnant-gagnant : l’organisme de recherche et de formation dispose de moyens supplémentaires pour accroître ses équipes et ses équipements et l’entreprise bénéficie du transfert technologique en minimisant ses risques. D’autant que des financements gouvernementaux sont accordés dans ce cadre d’innovation collaborative. L’engouement se fait sentir. «Il y a quatre ou cinq ans, c’est nous qui devions aller sur la route pour chercher des contrats, alors qu’aujourd’hui, on laisse le téléphone sonner», plaisante Andro Vachon.
La question des compétences
Le Centre de recherche industrielle du Québec, rattaché à Investissement Québec, en 2019, joue aussi ce rôle d’accompagnement des entreprises pour découvrir et adopter ces technologies de rupture peu offertes sur le marché. «En dehors du monde universitaire, on a été les premiers à s’équiper d’une imprimante 3D métallique en 2014», se remémore François Gingras, son directeur du développement et de l’accompagnement technologique. L’organisme en compte trois aujourd’hui et a signé un partenariat avec le CHU de Québec-Université Laval pour réaliser d’ici l’an prochain le premier laboratoire médical en impression 3D au Canada.
«On ne se rend pas toujours compte, mais quand on achète une imprimante 3D métallique, cela peut prendre entre six et douze mois pour la comprendre, former ses équipes et concevoir ses premières pièces. Il faut avoir les reins solides», ajoute Luc Dionne, PDG de Tekna, pour qui le nerf de la guerre sera l’accès à une main-d’oeuvre compétente. Une mission primordiale, là encore, confiée aux universités et aux organismes de formation. «Le design d’un produit sera différent s’il doit être fait en impression 3D ou en injection. Or, la majorité des ingénieurs et des techniciens connaissent encore peu la fabrication additive, car ce n’est pas intégré dans leur formation», indique Andro Vachon.
Ce dernier travaille justement sur une nouvelle attestation d’études collégiales entièrement consacrée à la fabrication additive, une première au Québec. Ce programme de 900 heures offert à temps partiel sur deux ans devait débuter en avril. Avec la COVID-19, cependant, le démarrage a été repoussé au 2 novembre prochain. «On avait déjà un bon signal, l’intérêt était là», relate celui qui espère une vingtaine d’étudiants pour cette première cohorte.