L’Université de Sherbrooke offre désormais un cours obligatoire sur les habiletés de collaboration. (Photo: 123RF)
MBA. L’art de travailler en équipe et de réseauter est-il moins maîtrisé depuis la pandémie? Bien au contraire, constatent les écoles de gestion de la province. Les nouveaux outils de communication favorisent la collaboration.
L’Université Laval n’a pas attendu la crise sanitaire pour adopter le mode hybride. Depuis ses débuts, son programme de MBA pour cadres en exercice mêle cours à distance et jours en classe. «La seule différence, c’est que les logiciels se sont améliorés», estime le directeur du programme, Charles-Olivier Amédée-Manesme.
«L’utilisation des technologies a favorisé les échanges, ajoute-t-il. Chaque cours possède son équipe Teams et on a un [groupe Teams] général pour l’ensemble des MBA, en plus d’un groupe LinkedIn. Les étudiants communiquent plus, plus souvent. La collaboration intercohortes est aussi plus forte.»
Il faut dire qu’à Québec, les cohortes se chevauchent. Les étudiants qui en sont à leur dernière année croisent ainsi tous les samedis ceux qui commencent leur maîtrise. «C’est le moment où tout le monde se retrouve. Il y a du covoiturage, des verres qui se prennent en groupe après le cours. La pandémie n’a qu’amplifié cela.»
La théorie se voit en amont afin que la journée en personne se consacre à l’application. «En ressources humaines, par exemple, ils font des simulations d’entretien d’embauche ou de licenciement. Même chose pour la gestion de crise ou la comptabilité. Le but, c’est vraiment d’échanger avec les camarades», assure Charles-Olivier Amédée-Manesme.
(Ré)apprendre à communiquer
L’Université de Sherbrooke offre désormais un cours obligatoire sur les habiletés de collaboration. «C’est un succès, se réjouit le directeur du programme de MBA, Yves Trudel. Ça rejoint l’idée que les gens ont perdu, au fil du temps, une chose qui semble de prime abord évidente: l’art de communiquer.»
Le cours s’échelonne sur les deux premières sessions. «Les étudiants ont d’abord leur expérience en équipe, puis ils reçoivent de la rétroaction. Ça facilite justement la collaboration.»
Yves Trudel admet que ce cours a été ajouté de façon préventive. «Nos étudiants n’ont peut-être pas perdu leurs repères comme c’est le cas des enfants, qui peinent aujourd’hui souvent à résoudre les conflits, mais on croit que ce cours est important.»
Le directeur ajoute que les travaux d’équipe sont favorisés pendant tout le programme. Le nouveau cours outille donc les étudiants à travailler ensemble pour le reste de leur maîtrise.
Kevin J. Johnson, directeur du programme de MBA de HEC Montréal, croit pour sa part que la gestion d’une équipe après la pandémie requiert une segmentation des habiletés, surtout dans un contexte de plus en plus complexe.
«Avec la flexibilité, le télétravail, mais aussi avec toutes les questions de stress, d’engagement et de désengagement, il y a plusieurs compétences à développer. Nos étudiants ne sont pas moins habiles qu’avant, mais la gestion d’une équipe demande maintenant une formation beaucoup plus professionnelle et précise», avance-t-il.
Maîtriser l’art oratoire
L’EMBA McGill-HEC comprend pour sa part deux séances consacrées à la présentation orale. «L’une explique comment structurer notre communication pour exposer un problème. L’autre se concentre sur la présence. La posture, la communication orale et ce qu’on dégage lorsqu’on parle en public sont abordés en ateliers par une experte en classe», détaille le codirecteur du programme, Alain Pinsonneault.
Les étudiants sont également séparés en petits groupes, qui se suivent tout au long de la maîtrise. «Ils partagent leurs papiers et se donnent des commentaires, tant sur le contenu que sur le contenant. Un professeur accompagne chaque équipe pour organiser leur pensée.» Étudiants et diplômés de l’EMBA peuvent en outre se joindre à un club d’art oratoire exclusif.
Un groupe tissé serré
Contrairement à l’Université Laval, le MBA pour cadres de l’Université Concordia se donne en présentiel depuis 1985, sauf durant la pandémie. «Il y a une énergie en classe qui ne se retrouve pas ailleurs», remarque la directrice adjointe du programme, Sharon May Nelson.
Selon elle, l’objectif du MBA est de travailler ensemble. «On fait en sorte de varier les groupes chaque session pour stimuler les échanges pendant les travaux d’équipe.» L’école de gestion comprend en outre un espace consacré à ses étudiants, ouvert de jour comme de nuit. Les petites salles leur permettent de travailler seul ou en groupe quand bon leur semble.
La taille réduite des cohortes aide aussi grandement la communication. «On veut une petite classe d’une vingtaine de personnes, explique Sharon May Nelson. Ils peuvent ainsi apprendre à se connaître plus facilement. Notre approche crée une atmosphère amicale, accueillante, où chaque individu se sent reconnu et à l’aise de discuter avec ses collègues et les professeurs. Tout le monde a sa place.»