L'an dernier, la cohorte du programme de MBA à HEC Montréal comptait 48% de femmes. (Photo: 123RF)
MBA. Autrefois bastion masculin, la maîtrise en administration des affaires (MBA) vogue désormais lentement vers la parité, certaines cohortes comptant au moins 40 % de femmes. Directeurs du programme et diplômées discutent des avancées avec Les Affaires.
Le mode hybride fera-t-il figure de révolution dans les programmes de MBA? Son adoption a en tout cas déjà modifié le profil des étudiants de ce programme à HEC Montréal.
La formule permet d’aller au-delà des secteurs professionnels habituels, constate le directeur du programme, Kevin J. Johnson. « On va toucher des parents, en particulier des mères, qui sont en mesure de suivre le cours à la maison les lundis et jeudis soir quand les enfants vont se coucher. » De la dirigeante d’un OSBL à la médecin en passant par la directrice d’un centre de services scolaire, l’université attire ainsi des profils qui avaient auparavant moins le réflexe de terminer un MBA.
L’an dernier, la cohorte comptait 48 % de femmes. « On est à parité, c’est du jamais vu, se réjouit Kevin J. Johnson. En janvier 2023, on sera à environ 40 %-45 %. » Selon le professeur agrégé, ces chiffres sont « énormes » pour un MBA. La norme se situe autour de 30 %.
Il attribue ce succès entre autres à la flexibilité offerte par le programme. « On sait que les mères de famille se réclament plus du télétravail. Ici, elles peuvent saisir l’occasion pour décrocher un MBA, qui sera ensuite un atout majeur sur le plan professionnel. »
Les étudiants au MBA ont en moyenne de 30 à 32 ans. C’est, selon les études, le moment où la discrimination salariale s’installe dans les organisations, souligne le directeur. « Si on est capables d’offrir un titre MBA vraiment reconnu, mieux adapté au monde du travail de demain et flexible pour les mères, avance-t-il, ça donne une arme pour affronter cette discrimination. »
Les cohortes se féminisent aussi à l’Université Laval. Depuis 2017, elles sont même plus nombreuses que les hommes. « Elles représentaient 51 % des étudiants au MBA cette année-là, précise le directeur du programme, Serge Kablan. C’est resté stable jusqu’en 2021-2022, où ça a légèrement augmenté, à 53 %. »
Celui-ci ajoute qu’à l’université de Québec, 74 % des étudiants au MBA sont à temps partiel, un engagement qui a évidemment moins de répercussions sur l’horaire familial. « Je ne sais pas si ça explique le nombre de femmes, mais ça suggère que la majorité des étudiants travaille en même temps. »
Du côté de l’ESG UQAM, la proportion de femmes est restée stable avant et pendant la pandémie. Encore aujourd’hui, le MBA pour cadres compte entre 40 % et 45 % de femmes. « Je ne crois pas que la technologie ou les modes d’enseignement changent la donne, remarque le directeur Kamal Bouzinab. Du moins, les chiffres ne le démontrent pas. »
Un bébé et un diplôme
Maudeleine Myrthil n’a pas peur des défis. Celle qui est aujourd’hui directrice de l’entrepreneuriat à Groupe 3737 a décidé d’entreprendre son MBA à l’UQAM pendant son congé de maternité. « J’ai saisi l’occasion. Ça a ouvert mes horizons, m’a offert une vision plus stratégique, a élargi mon réseau et m’a permis d’apprivoiser les chiffres. »
À l’époque de sa maîtrise, entre 2009 et 2012, le programme comptait environ 30 % de femmes. Elle se sentait tout de même la bienvenue, et son bébé l’était tout autant. « Mes collègues et le corps professoral étaient très acceptants. Ma fille est d’ailleurs devenue une membre honoraire de la cohorte. Elle se retrouve même sur certaines photos d’équipe. » À voir la fierté de sa fille à sa graduation, Maudeleine Myrthil estime que l’expérience a été bénéfique pour les deux.
Dose de confiance
Pendant qu’elle faisait son MBA à HEC Montréal en 2017, Gwenaelle Thibaut faisait partie de la minorité féminine. « Les femmes représentaient 26 % de la cohorte, précise-t-elle. On était une femme par équipe, alors on était chacune seule de notre côté. »
Elle remarque néanmoins des progrès sur le plan de la parité. « Si je regarde la cohorte qui vient de graduer, il y avait autant de femmes que d’hommes », dit-elle en ajoutant que la possibilité d’étudier à temps partiel ou en mode hybride a peut-être aidé à attirer plus de femmes.
Cette dernière croit qu’on a tout à gagner à atteindre la zone de parité. « C’est bien autant pour les hommes que pour les femmes. En misant sur les forces de chacun, on peut aller plus loin. Le programme aide aussi les femmes à acquérir la confiance de monter les échelons et de défoncer certaines portes. »