Léa Audet, 32 ans, a ouvert la chocolaterie végétalienne Choco de Léa en avril 2020, après deux ans de démarches. Elle a participé à des séances de mentorat de groupe en ligne offertes par le Réseau Mentorat. (Photo: Roxanne Chagnon)
MENTORAT ET COACHING. On l’entend sur toutes les tribunes depuis le début de la pandémie — l’heure est à la réinvention. Pour de nombreuses personnes, particulièrement celles qui ont perdu un emploi au cours de la dernière année, cette réinvention passe par l’entrepreneuriat.
Selon le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, presque 89 000 nouvelles entreprises ont été créées dans la province en 2020-2021, soit près de 15 000 de plus que les deux années précédentes.
Cette tendance a créé une demande additionnelle pour les services d’accompagnement en lancement d’entreprise. « Les entrepreneurs ont perçu des occasions pendant les premiers mois de la pandémie. Particulièrement depuis l’automne passé, on voit de nombreux nouveaux venus, surtout dans le commerce en ligne », observe Maryse Gingras, vice-présidente pour le Québec, la Colombie-Britannique et les provinces de l’Atlantique de Futurpreneur, un organisme à but non lucratif pancanadien qui offre du financement et des services de soutien aux entrepreneurs de 18-39 ans.
Selon l’Indice entrepreneurial québécois 2020, produit par le Réseau Mentorat (RM) de la Fondation de l’entrepreneurship, l’accompagnement par des entrepreneurs d’expérience est le soutien prioritaire souhaité par les propriétaires pour les aider à réussir leur projet d’innovation. Les femmes et les jeunes entrepreneurs sont ceux qui le souhaitent davantage.
Crise sanitaire oblige, les logiciels de vidéoconférence ont toutefois remplacé les salles de conférence pour les séances de mentorat et de coaching de groupe, et la demande pour des outils de mentorat à distance — comme la plateforme en ligne Élo — explose.
Différences subtiles
L’accompagnement peut prendre plusieurs formes, dont le mentorat et le coaching. Les différences entre ces deux méthodes sont « subtiles », affirme Gisèle Aubin, présidente de ICF Québec, la branche québécoise de l’International Coaching Federation. « Les deux sont des stratégies de développement ; le mentor partage son expérience, tandis que le coach agit comme un catalyseur qui amène l’autre à trouver la réponse à sa question. » Elle souligne également que le coaching est un métier en soi, contrairement au mentorat, qui est habituellement pratiqué par des bénévoles.
Rina Marchand, directrice principale du contenu et du marketing du RM, précise que les mentors bénévoles qui s’impliquent avec son organisation doivent avoir de cinq à dix ans d’expérience en affaires. « Un mentor est une personne qui offre une oreille attentive et s’appuie sur son expérience afin d’aider le mentoré, alors qu’un coach s’appuie sur son expertise pour répondre à une demande précise de son client. »
Se lancer en temps de pandémie
Léa Audet, 32 ans, a ouvert la chocolaterie végétalienne Choco de Léa en avril 2020, après deux ans de démarches. Au cours de ce premier printemps d’opération, elle a participé à des séances de mentorat de groupe en ligne offertes par le Réseau Mentorat, animées par Johanne Fondrouge, une entrepreneure et experte en marketing. « Démarrer une entreprise en temps de pandémie, ç’a été horrible ! affirme Léa Audet sans hésiter. Psychologiquement, ça a été très dur. Il est là aussi, l’apport du mentorat : non seulement une mentore donne de bons conseils, mais elle te permet de prendre un pas de recul, de voir la forêt quand ta face est collée contre ton arbre. » Parfois, sa mentore l’épaule en « posant la question qui tue ». D’autres fois, c’est son oreille attentive qui l’aide.
Le coup de main d’un mentor peut aussi être utile lorsqu’il faut rapidement et radicalement modifier son concept. Cédric Ngenzi et Daniel Asfaha, deux entrepreneurs dans la trentaine de la région de Montréal, croyaient avoir une stratégie solide pour la distribution de leurs suppléments énergisants dérivés des plantes par le biais de leur entreprise, Keevo Nutrition. « On avait des plans pour amener notre produit de l’avant avec des évènements, de la démonstration, mais évidemment, tout ça a été annulé ! » se souvient Daniel Asfaha.
Daniel Asfaha (Photo: courtoisie)
Du jour au lendemain, ils ont dû se tourner vers le commerce en ligne. Déjà encadré par Futurpreneur, le duo a sollicité l’aide de Sarah-Eden Dadoun, mentore et PDG de MTL+Ecommerce. « On est débrouillards et créatifs, mais on n’a pas la même expérience qu’elle, et elle nous avertit des pièges à éviter », note Daniel Asfaha.
Alexandre Boucher-Doddridge, 28 ans, est cofondateur de HerbiaEra, une entreprise basée à Saint-Antoine-de-Tilly, dans la région de Lotbinière, qui fabrique et vend des jardinières qui permettent aux plantes de s’autoalimenter en eau. Au cours du développement des produits, lui et son partenaire d’affaires, Anthony Bisson, ont eu recours aux programmes de l’incubateur technologique de Québec LE CAMP et de Futurpreneur, qui allient tous deux le mentorat et le coaching.
Tout comme Cédric Ngenzi et Daniel Asfaha, les dirigeants d’HerbiaEra croient à l’importance de se faire accompagner. Selon Alexandre Boucher-Doddridge, recevoir l’aide d’un mentor facilite l’introspection et la réflexion, ce qui permet de mieux s’ajuster aux conditions changeantes et aux besoins de son entreprise. Quant à l’aide d’un coach, elle donne aux partenaires un temps dédié pour se focaliser sur leurs objectifs et comment « s’améliorer comme personnes » pour mieux réaliser ceux-ci. En somme, selon le jeune entrepreneur, l’accompagnement « aide à faire face à des tempêtes », même à distance.