Jérôme Dupras, Cowboys fringants, professeur et entrepreneur
Charles Poulin|Mis à jour le 13 juin 2024«Les Cowboys fringants, c’est une petite PME. Pendant 25 ans, il a fallu développer des marchés et des stratégies», raconte Jérôme Dupras, bassiste des Cowboys fringants. (Photo: courtoisie)
Les gens reconnaissent Jérôme Dupras assez facilement, comme bassiste des Cowboys fringants ou chercheur universitaire et professeur en économie écologique à l’Université du Québec en Outaouais. On connaît cependant moins son profil d’entrepreneur.
Avec deux collègues chercheurs, Andrew Gonzalez de l’Université McGill et Christian Messier de l’Université du Québec à Montréal, il a co-fondé en 2017 l’entreprise de conseils en génie environnemental Habitat, dans laquelle le Fonds de solidarité FTQ vient d’investir 3,5M$. Spécialisée dans l’utilisation de la biodiversité pour s’adapter aux changements climatiques, elle emploie présentement 25 personnes.
«Ce qui est au cœur de la décision de faire le saut dans l’entrepreneuriat avec mes deux associés, c’est accélérer la transition écologique, explique-t-il. Nous, on développe de la science, on fait de la science fondamentale et on va chercher de l’innovation avec de nouveaux résultats de recherche, mais un élément qui était clé au cœur de notre science, c’était la dimension appliquée.»
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Les Cowboys, une petite PME
S’il concède qu’il y a un monde de différences entre jouer de la basse et démarrer une entreprise, Jérôme Dupras estime que c’est tout de même dans le domaine artistique qu’il a pris goût à l’entrepreneuriat.
«Les Cowboys fringants, c’est une petite PME, image-t-il. Pendant 25 ans, il a fallu développer des marchés et des stratégies. Il fallait aussi travailler sur nos communications, comment bien se positionner et bien comprendre les secteurs. Il y a une fibre entrepreneuriale qui s’est développée au fil du temps.»
Du côté universitaire, avec sa formation doctorale et postdoctorale, il a bien sûr appris la science, mais lorsqu’on devient professeur, plaide-t-il, il y a un profil gestionnaire et de recherche de financement qui est nécessaire parce qu’on doit animer un laboratoire et développer la recherche.
«Même si au final il n’y a pas deux colonnes de revenus et dépenses et qu’il n’y a pas une obligation de profitabilité, il y a tout de même toute cette stratégie de l’innovation et de la gestion, avance-t-il. Derrière les laboratoires qui réussissent bien, il y a des femmes et des hommes qui ont un profil entrepreneurial. Ma philosophie, c’est de m’entourer de meilleures personnes que moi, qui fournissent une complémentarité des expertises.»
Apprendre sur le tas
Reste tout de même que, comme la majorité des entrepreneurs, certaines leçons ont dû être apprises à la dure.
«On a appris un peu sur le tas, avec des essais erreurs, raconte-t-il. Nous avons eu de premiers mandats où on a appris l’importance de livrer dans les temps avec une bonne qualité.»
Comme il s’agit en plus d’un domaine scientifique, Jérôme Dupras et ses associés ont également fait face à des défis communicationnels. Il a fallu rapidement trouver comment transposer la science dans un langage qui soit non dogmatique, applicable et digeste pour leurs collaborateurs, eux qui travaillent avec des MRC, des municipalités, des ONG et des entreprises.
«Après sept ans, je crois qu’on a bien compris ça, affirme-t-il. Notre mariage avec le Fonds de solidarité FTQ, ça veut dire que nos devoirs sont faits. On sait comment ça fonctionne, on a de bonnes idées, on a une super équipe, maintenant nous sommes dans un profil d’expansion et nous avions besoin d’un partenaire pour nous amener dans cette voie-là.»
Phase d’expansion
Habitat est désormais en phase d’expansion déclinée en trois axes.
Tout d’abord, l’entreprise veut consolider sa position au Québec. Elle a actuellement des dizaines de clients, mais en regardant ses parts de marchés dans le secteur du conseil en environnement, elle reste un joueur marginal.
«Nous voulons nous constituer une équipe de marketing et de développement des affaires pour pouvoir appliquer nos services actuels, du conseil de génie environnemental, et qu’ils soient accessibles à un plus grand nombre de partenaires.»
Le deuxième axe est de pouvoir étendre ses services au Canada et à l’international. Habitat a déjà cinq projets dans de grandes villes du pays, un projet en Europe et deux en Afrique de l’Ouest.
«Nous avons déjà une présence, mais ça se fait un peu de manière organique, et nous voulons mieux structurer notre expansion», indique Jérôme Dupras.
Le troisième axe est celui de la recherche et du développement.
«On travaille sur de nouvelles questions reliées à la biodiversité qui pour nous sont l’avenir de la gestion de la biodiversité, explique-t-il. Un de ces points-là est les biocrédits, comme les crédits carbone, mais pour la biodiversité. Il y a une tendance forte à l’échelle internationale, ça a été très vocal en 2022 à la COP15. Nous avons commencé à développer depuis environ un an des protocoles et infrastructures de biocrédits. Pour parvenir à nos objectifs, nous avons besoin de moyens autant humains que financiers pour développer ce nouveau produit.»
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