Alex Brisson, président et chef de la direction de Norda Stelo, voit quatre grandes tendances génératrices de nouveaux besoins: la résilience des infrastructures, les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), la transformation numérique et la transition énergétique. (Photo: courtoisie)
MOIS DU GÉNIE. Les tendances qui influeront sur l’offre et la demande de main-d’œuvre d’ici dix ans, comme la transition énergétique et le développement de l’IA, auront également une incidence sur l’ensemble de l’industrie, qui devra s’adapter pour servir adéquatement son marché. Que font les firmes en vue de rester en phase avec les besoins de la société québécoise ?
« Nous, on voit quatre grandes tendances génératrices de nouveaux besoins : la résilience des infrastructures, les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), la transformation numérique et la transition énergétique », résume Alex Brisson, président et chef de la direction de Norda Stelo.
Pour rester en phase avec les besoins du marché dans un contexte de transformations sociales et économiques, la firme québécoise de génie-conseil basée à Québec travaille sur différents tableaux. La transformation numérique, par exemple, tient ses équipes particulièrement occupées. Le grand patron de l’entreprise espère d’ailleurs que ce grand chantier aidera à faire de son entreprise un leader mondial de la durabilité des actifs.
« On fait le pari qu’en rendant les infrastructures plus durables, on freinera les changements climatiques, dit-il. Pourquoi ? Parce qu’en prolongeant la vie d’une structure, on ne consomme pas l’énergie nécessaire à rebâtir en neuf. Et on veut le faire en combinant l’IA à l’expertise de nos ingénieurs. »
L’IA pour l’environnement
En 2019, Norda Stelo s’est lancée dans le développement d’une plateforme qui intègre l’IA et l’apprentissage machine. Commercialisée depuis 2022 sous le nom de Stelar, celle-ci permet de prédire le vieillissement des actifs, qu’il s’agisse de routes, de ponts et de ports, ou encore de cheminées industrielles et de chemins de fer, par exemple.
« La plateforme détermine combien d’années de vie il reste à une infrastructure en fonction de son état et de ce que l’on fait comme entretien, explique Alex Brisson. Notre client, lui, voit toute cette information-là présentée sous forme d’un tableau de bord. »
Aujourd’hui, 35 programmeurs spécialisés en IA travaillent à développer la plateforme pour la bonifier en fonction des besoins des clients. L’entreprise veut maintenant mettre davantage d’efforts pour en faire la promotion.
Efficacité, données, cybersécurité
À BBA, une firme de génie-conseil de Mont-Saint-Hilaire employant 1500 travailleurs au pays, l’IA sera également un levier important qui lui permettra de mieux répondre aux besoins changeants de ses clients. Pour déterminer quel usage sera le meilleur, l’entreprise se lance donc, cette année, dans une grande période de réflexion sur le sujet.
« L’expertise humaine sera toujours nécessaire. Cela dit, on doit s’adapter aux nouvelles technologies. Cette année, on focalisera donc sur l’IA. C’est une période d’essai, de tests, de projets pilotes. On analyse les différents usages que l’on pourrait en faire afin de déterminer les plus pertinents pour nous », explique Renée-Claude Turgeon, cheffe des talents et du développement durable.
BBA examine par exemple comment l’IA pourrait l’amener à réaliser des gains d’efficacité, notamment sur le plan des opérations et des services partagés.
« Bien sûr, quand on parle d’IA, on pense à la cybersécurité, alors on prendra également le temps de bien réfléchir à la manière dont on peut l’encadrer pour protéger les données de nos clients, dit Renée-Claude Turgeon. On veut intégrer les technologies de façon responsable. »
Décarboner pour mieux recruter
Renée-Claude Turgeon reconnaît que les entreprises doivent réduire leurs émissions de GES.
« Dans notre cas, nous ne fabriquons pas de produits, alors on travaille sur le plan du transport de nos employés », dit-elle. BBA les incite par exemple à travailler en mode hybride et offre un programme à ses travailleurs qui leur permet de se faire rembourser leurs titres de transport en commun. L’entreprise favorise également le transport actif en mettant des douches et des stationnements pour vélos à la disposition de son personnel.
« On sonde nos gens depuis deux ans pour comprendre leurs habitudes et décisions de transport, dit la cheffe des talents. Ça nous aide à comprendre les irritants qui freinent l’usage des modes plus verts, et donc à développer des solutions. »
Ces sondages s’inscrivent d’ailleurs dans le contexte plus large de pénurie, qui force l’entreprise et beaucoup d’autres du secteur à mieux répondre aux besoins des travailleurs.
« On est en mode “charme”, il faut un wow factor, dit Renée-Claude Turgeon. On ne parle plus seulement d’expérience employé, mais aussi d’expérience candidat, pour les employés potentiels, et d’expérience loyauté, pour les anciens employés. »
Pour attirer du personnel, les entreprises ne peuvent plus seulement vanter leurs projets, remarque la cheffe des talents. Elles doivent se vendre auprès des employés en tant qu’employeurs et dirigeants citoyens. Que font-elles pour la planète ? Pour la diversité et l’inclusion ? Pour les facteurs ESG ?
« Les étudiants reçoivent de cinq à sept offres en sortant de l’école. Il faut comprendre leurs valeurs et y faire correspondre les nôtres. On sonde donc nos employés annuellement, et 98 % des gens y répondent. On reçoit 200 pages de commentaires, et on lit tout pour proposer des actions concrètes », dit Renée-Claude Turgeon.