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Des risques qui amènent des aubaines?

Stéphane Rolland|Édition de la mi‑janvier 2019

Des risques qui amènent des aubaines?

[PHOTO: Romeo Mocafico]

Un marché immobilier qui ralentit au Canada, un marché américain plus concurrentiel, un cycle économique qui semble approcher de la fin, de nombreux vents contraires se lèvent à l’horizon pour les banques canadiennes. Cependant, ces difficultés plombent-elles trop les multiples ?

Claude Boulos, vice-président et gestionnaire de portefeuille principal, Actions canadiennes – Opportunités chez Fiera Capital, croit que oui. Les titres des grandes banques ont connu une contre-performance en 2018, tandis que les bénéfices ont été au rendez-vous durant leur exercice 2018 (terminé le 31 octobre). « Dans l’ensemble, les résultats ont été bons, dit-il en entrevue. Les banques ont concentré leurs efforts sur le contrôle des coûts, ce qu’elles font très bien. Il y a eu beaucoup de travail qui a été fait du côté des investissements technologiques. »

La combinaison des bons résultats et de la contre-performance des actions fait en sorte que leurs titres s’échangent maintenant en moyenne à 9,3 fois les prévisions de bénéfices des 12 prochains mois et la majorité offrent un rendement du dividende supérieur à 4 %. « Dans un horizon de 12 mois, c’est une occasion d’achat », estime M. Boulos.

Le gestionnaire de portefeuille reconnaît que l’endettement des Canadiens représente un risque, mais il constate que les nouvelles règles hypothécaires ont contribué à stabiliser le passif des ménages. « On a réussi à faire ça sans dommages collatéraux, précise-t-il. L’économie va bien, on est en plein emploi. »

Les institutions financières ne s’étaient pas échangées à un multiple si bas depuis les inquiétudes sur le prix du baril du pétrole en 2015 et 2016, se remémore Gabriel Dechaine, de Financière Banque Nationale, dans une note datant du 12 décembre. L’analyste invite cependant les investisseurs « à la patience ». La croissance des prêts hypothécaires devrait être quasiment nulle en 2019, ce qui alimentera les inquiétudes des marchés, prédit l’analyste. « Soyons clair, nous ne pensons pas que l’effondrement du marché immobilier va se concrétiser. Nous croyons seulement que les données vont accentuer la peur que cela survienne. »

Steve Bélisle, gestionnaire de portefeuille chez Gestion d’actifs Manuvie, constate, lui aussi, que les évaluations sont plus faibles. S’il est à l’aise avec l’idée de détenir des actions de banques canadiennes, il juge que le mot « occasion » est « un peu fort ». « Tant qu’on n’a pas de récession, on est à l’aise d’avoir une bonne position, dit-il. Dans un scénario de récession, ce ne sont pas des titres à détenir, car les pertes sur prêts vont augmenter et les bénéfices vont fondre radicalement. »

Et les assureurs ?

Au moment de faire le point l’an dernier, les titres des assureurs semblaient favoris en raison des hausses des taux d’intérêt anticipés. Pour 2019, M. Bélisle pense que les banques canadiennes sont un meilleur investissement. « Il est difficile de voir comment la Banque du Canada pourra augmenter beaucoup plus son taux directeur à ce stade-ci. Je pense qu’on approche du sommet. »

Le gestionnaire de portefeuille ajoute que les assureurs sont plus vulnérables à un éventuel marché baissier. « Une bonne partie de leurs activités se trouve dans la gestion de patrimoine, explique-t-il. Avec des marchés qui vacillent, ce n’est pas une bonne nouvelle (pour les revenus facturés aux clients selon la taille de l’actif sous gestion). De plus, une partie non négligeable de leurs réserves actuarielles sont investies dans les marchés boursiers. Un recul de la Bourse pourrait entraîner des pertes actuarielles, en plus d’autres pertes liées à la baisse des taux d’intérêt. »

Pour sa part, M. Boulos croit toujours que les titres des assureurs sont attrayants et qu’ils « pourraient même mieux performer que les banques ». Il note que les multiples sont bas et que les assureurs ont fait « le ménage » après la crise de 2008. Par contre, les inquiétudes du marché, notamment en raison des difficultés des assureurs américains, font en sorte que le gestionnaire de portefeuille « n’a pas le choix de reconnaître l’inquiétude du marché », qui pourrait continuer de peser sur le secteur.

Les banques favorites

La RBC (RY) et la TD (TD) recueillent le plus fort taux de recommandations d’achat de la part des analystes. Entre les deux rivales, M. Bélisle préfère la TD. « Elle réussit à faire beaucoup de ventes croisées, tant au Canada qu’aux États-Unis. Elle n’est pas trop présente dans les marchés des capitaux, qui sont plus la force de la Royale. C’est davantage une banque de détail, un segment plus stable quand le marché vacille. »

En ce qui concerne les évaluations, la comparaison entre la TD et la Royale serait également à l’avantage de la TD, croit M. Bélisle. Fin décembre, la TD s’échange à 9,87 fois les prévisions de bénéfices de l’an prochain et la RBC à 10,3 fois. « Normalement, la TD s’échange à un multiple équivalent à la Royale ou avec une légère prime. C’est une occasion d’avoir plus de TD que de Royale. »

Si la TD fait partie de ses trois favorites, M. Bélisle a aussi un faible pour les titres malmenés de la CIBC (CM) et de la Scotia (BNS). « C’est sûr que dans les deux cas, il y a des risques, mais je pense que ceux-ci ont trop de poids dans l’évaluation. Dans le cas de la Scotia, il faudra que l’économie de l’Amérique latine se maintienne. Du côté de la CIBC, c’est sûr qu’on est surreprésenté au Canada. Si l’économie canadienne entrait en récession, mais pas les autres économies du monde, la CIBC souffrirait plus. »

À l’approche de la fin du cycle économique, Doug Young, de Desjardins Marchés des capitaux, suggère de favoriser « la taille et la qualité ». Pour cette raison, il fait passer la CIBC de son premier choix à son quatrième choix parmi les huit banques canadiennes (grandes banques et banques régionales). La TD et la RBC sont remontées au premier et deuxième rang, respectivement.

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