Les dons en ligne ont subi une croissance accélérée et représentent maintenant près de 12 % de toutes les transactions. (Photo: 123RF)
PHILANTHROPIE. C’est un lieu commun : les gestionnaires d’organismes de bienfaisance sont tellement pris dans les opérations quotidiennes qu’ils négligent de développer de nouvelles compétences. À plus ou moins long terme, cela peut compromettre la pérennité financière — donc la survie — de leur organisme. Pourtant, relativement à l’adversité, les gestionnaires d’organismes caritatifs disposent de plusieurs stratégies pour se sortir la tête de l’eau.
Bien consciente de cette lacune, Mission inclusion offre du soutien en accompagnement organisationnel pour la combler. Une formule unique en son genre qui, depuis plus de deux décennies, a bénéficié à environ 200 organismes au Québec. « L’idée est d’aider les organismes bénéficiaires à s’outiller afin d’être plus à même de remplir leur mission. Plusieurs ne pourraient s’offrir ce luxe autrement, faute de ressources », explique Danielle Filion, directrice des programmes au Québec à Mission inclusion. La diversification de ses bailleurs de fonds fait partie des sujets fréquemment abordés. « C’est le nerf de la guerre ! Il faut savoir rayonner en dehors de son écosystème traditionnel et explorer d’autres sources de financement que celles de nature publique. »
« C’est comme apprendre à quelqu’un à pêcher », renchérit Isabelle Morin, directrice principale du développement et des communications à Mission inclusion. Ces services offerts en partenariat avec des firmes externes autonomisent en effet le milieu caritatif dans sa recherche de nouvel argent. « Il existe une quarantaine de techniques différentes pour aller chercher de nouveaux donateurs. On touche aussi bien aux nouvelles tendances en philanthropie, comme les activités pair à pair, qu’à la sollicitation par courriel ou par papier », raconte-t-elle.
La nature même des échanges a changé dans les dernières années. « Il y a dix ans encore, on envoyait une lettre pour solliciter des dons, dans une logique transactionnelle, se souvient Isabelle Morin. Aujourd’hui, les gens exigent des rapports d’évaluation d’impact et veulent sentir qu’ils ont la possibilité de faire une différence. » Grâce au soutien en accompagnement organisationnel offert par Mission inclusion, l’organisme montréalais voué au cirque social Cirque Hors Piste a par exemple été en mesure de s’offrir une première planification stratégique, avec des orientations de nature financière.
Des encans numériques
La pandémie de COVID-19 est venue modifier nombre d’habitudes bien établies en matière de philanthropie. Les événements de type gala et en hommage à une personne décédée sont par exemple moins populaires. Le nombre de donateurs qui les fréquentent a chuté radicalement entre 2019 et 2020, peut-on lire dans un rapport sur l’évolution de la philanthropie au Québec publié en juin dernier. En contrepartie, les dons en ligne ont subi une croissance accélérée et représentent maintenant près de 12 % de toutes les transactions, selon cette même étude sectorielle.
La plateforme Followmybid, lancée à l’automne 2020 par l’entreprise québécoise Nmédia, fait écho à cette tendance. Grâce à cette dernière, des organismes tels que Centraide du Grand Montréal et Opération Enfant Soleil organisent de manière autonome des encans en ligne entièrement personnalisables. Ainsi, il est par exemple possible de modifier en temps réel les descriptions de lots afin de relancer l’engouement. En comparaison avec un encan silencieux traditionnel, Followmybid générerait 25 % plus de bénéfices. En cause : une plus grande participation combinée à un encan plus interactif.
Les organismes sans but lucratif représentent 85 % des utilisateurs de Followmybid. L’autre 15 % est composé de PME qui cherchent à redonner de manière ludique, et économique. « Nous ne taxons pas leur succès, c’est-à-dire que nous ne conservons aucun pourcentage de leurs ventes », indique Yannick Sawyer, directeur de la commercialisation à Followmybid. La plateforme permet en ce sens d’« inverser le cycle de la philanthropie ». « Au lieu de confier leur levée de fond à une tierce partie, les entreprises la réalisent en interne, puis remettent l’argent à la cause de leur choix », détaille-t-il.
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Des amendements salués
Les organismes de bienfaisance du pays peuvent désormais nouer des partenariats équitables avec les donataires non reconnus par l’Agence du revenu du Canada. Cela résulte d’amendements au projet de loi d’exécution du budget adoptés le printemps dernier. « La formulation de l’ancienne politique compliquait de telles collaborations, ce qui pénalisait l’ensemble du secteur de la bienfaisance », souligne Pascal Lépine, vice-président au conseil d’administration d’Imagine Canada. Ces amendements ont plus spécifiquement trait à l’élimination de mesures de contrôle et de direction décrites comme « paternalistes » par Imagine Canada.