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Les banques alimentaires du Québec veulent sauver chaque miette

Maxime Bilodeau|Édition de la mi‑novembre 2022

Les banques alimentaires du Québec veulent sauver chaque miette

Moisson Sud-Ouest a vu la demande augmenté de 30% entre 2019 et aujourd'hui. (Photo: Joel Muniz pour Unsplash)

PHILANTHROPIE. Intégrer des pratiques socialement responsables est un passage obligé pour les organismes qui assurent la sécurité alimentaire au Québec.

Les banques alimentaires du Québec croulent sous les demandes. En cause : l’augmentation généralisée du coût de la vie subséquente à la pandémie de COVID-19. Parlez-en à Stéphane Spisak, directeur général de Moisson Sud-Ouest, la principale banque alimentaire du Suroît. « En 2019, nous venions en aide à 7500 personnes par mois ; aujourd’hui, ce chiffre est plutôt de 11 350, soit une augmentation de plus de 30 % », illustre celui qui qualifie l’organisme de bienfaisance de « garde-manger de la région ». Parmi les nouvelles clientèles desservies figurent entre autres des travailleurs à faible revenu.

Paradoxalement, s’approvisionner en nourriture pour ensuite la redistribuer aux plus démunis a gagné en complexité. « Comme les chaînes d’approvisionnement des supermarchés sont plus tendues que jamais, nous récupérons moins de surplus de produits invendus toujours comestibles. Qui plus est, la multiplication des applications de lutte au gaspillage alimentaire ajoute une étape supplémentaire avant qu’ils nous parviennent », raconte Stéphane Spisak, qui raconte devoir désormais sortir le portefeuille pour acheter des aliments frais, du jamais vu.

Ces contraintes inédites forcent Moisson Sud-Ouest à agrandir ses installations — un projet de nouvel entrepôt de 20 000 pieds carrés est actuellement sur la table. L’objectif : accroître ses capacités de stockage de denrées qui auront été préalablement transformées, puis congelées. « Augmenter la durée de vie des aliments périssables est un jeu récurrent, affirme Martin Munger, directeur général des Banques alimentaires du Québec, qui regroupe les 32 organismes régionaux d’aide alimentaire. Derrière cette réflexion, il y a aussi bien un souci de mener à bien sa mission que de durabilité. »

 

Lutte tous azimuts

Comme il arrive parfois que certains aliments parviennent aux banques alimentaires impropres à la consommation, ces dernières doivent réfléchir à la bonne manière d’en disposer. Moisson Sud-Ouest a par exemple mis sur pied le programme de dons Mange tes croûtes. Plutôt que de générer des déchets, les surplus de pains, fruits et légumes sont envoyés à des agriculteurs de Beauharnois-Salaberry, Haut-Saint-Laurent et Vaudreuil-Soulanges, qui peuvent ensuite les utiliser pour nourrir leurs animaux d’élevage. En 2021, 18 300 kg de nourriture ont ainsi été récupérés et donnés dans la cadre de ce projet.

Moisson Mauricie/Centre-du-Québec a quant à elle acquis un déshydrateur industriel pour transformer les aliments impropres à la consommation en compost, lit-on dans son plus récent rapport annuel. « Pour nos membres, ces initiatives sont autant de manières d’éviter des frais d’enfouissement », précise Martin Munger. « Mentionner que nous faisons du compostage auprès de nos donateurs est le bienvenu. Sans en faire une priorité absolue, ces derniers sont sensibles aux initiatives de lutte au gaspillage alimentaire », souligne pour sa part Sam Watts, président-directeur général de Mission Bon Accueil.

Toujours dans le domaine de la sécurité alimentaire, les organismes qui produisent et distribuent des repas bénéficient depuis peu d’une plateforme numérique pour mutualiser gratuitement leurs ressources. Nommée MutuAli, celle-ci a été mise sur pied par La Cantine pour tous, un réseau de traiteurs sociaux présent dans 10 régions du Québec. « Se procurer des équipements neufs coûte très cher et a des répercussions considérables sur l’environnement », fait remarquer Mai Lan Nguyen Duy, qui était jusqu’à tout récemment responsable de la mutualisation des équipements à La Cantine pour tous.

Cette dépense est d’autant plus injustifiée qu’il existe, ici et là, des cuisines commerciales, espaces d’entreposage et autres camions de livraison qui ne sont pas utilisés à leur pleine capacité. « Nous nous sommes dit que tous pouvaient y trouver leur compte. D’un côté, les propriétaires d’infrastructures et d’équipements alimentaires disponibles les rentabilisent ; de l’autre, les organismes communautaires réalisent des économies considérables », détaille-t-elle. Lancée en décembre 2021, MutuAli revendique depuis « quelques centaines » d’utilisateurs.

 

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1,2 million de tonnes

C’est la quantité de nourriture perdue ou gaspillée chaque année, selon l’« Étude de quantification des pertes et gaspillages alimentaires au Québec » de Recyc-Québec, parue en juin dernier. Cela englobe toute partie comestible des aliments destinée à la consommation humaine qui en est détournée ou qui est dégradée, perdue ou jetée, à n’importe quelle étape du système bioalimentaire, incluant celles de la récupération et de la redistribution alimentaire.