Former son équipe en vue d’une transformation (précipitée)
Philippe Jean Poirier|Édition de la mi‑juin 2020Gabrielle La Rue, fondatrice et PDG de Locketgo: «L’objectif du pivot était clair dans ma tête, mais la marche à suivre, elle, l’était moins. Le formateur en gestion nous a aidés à mettre de l’ordre dans nos priorités et à formuler un plan d’action concret.» (Photo: courtoisie)
FORMATION. Combien d’entreprises et de start-ups ont été forcées de faire un pivot en raison de la crise sanitaire ? Plusieurs, assurément.
En restauration, l’industrie entière est en train de revoir son modèle d’affaires. «La fermeture des salles à manger a forcé les restaurants à trouver d’autres sources de revenus, explique François Meunier, vice-président aux affaires publiques à l’Association restauration Québec (ARQ). Pour survivre, plusieurs ont mis en place des services de livraison, des mets à emporter et des prêts-à-manger, alors que ça ne faisait pas du tout partie de leurs services avant la crise.»
Dans le secteur événementiel, plusieurs entreprises tentent de rebondir en offrant leurs services dans un autre secteur d’activité. C’est le pivot qu’a fait la start-up montréalaise Locketgo. Sa dirigeante Gabrielle La Rue a décidé de prendre les casiers connectés qu’elle louait pour des festivals et de les proposer à de petits commerces comme solution de ramassage autonome pour leurs clients.
«On réfléchissait à cette option depuis l’automne, précise la fondatrice. On ne l’envisageait pas comme un pivot, mais plutôt comme un autre marché à développer après l’événementiel. Quand on a perdu tous nos contrats, c’est rapidement devenu notre plan A.»
Premier arrêt : former la direction
Dans un contexte de pivot, la première personne à former est l’entrepreneur lui-même. Il aura d’ailleurs beaucoup de matière à assimiler en très peu de temps. «Il doit comprendre l’impact de ses décisions d’affaires à la fois sur ses investissements, ses états financiers, sa rentabilité, ses employés, sa clientèle et ses services», résume Nadia Bellehumeur, directrice générale de la Société de développement du Témiscamingue.
Consciente du défi que représentait un pivot en temps de crise, Gabrielle La Rue s’est inscrite au Programme actions concertées pour le maintien en emploi (PACME) dès l’annonce du programme et a obtenu des fonds pour embaucher un formateur en gestion et une formatrice en finance.
«L’objectif du pivot était clair dans ma tête, mais la marche à suivre, elle, l’était moins. Le formateur en gestion nous a aidés à mettre de l’ordre dans nos priorités et à formuler un plan d’action concret.»
Pour ajouter un degré de difficulté, Locketgo terminait une ronde de financement au moment du pivot. «J’ai dû prendre des décisions financières en très peu de temps, dit Gabrielle La Rue. La formation en finance m’a aidée à comprendre l’impact de chacune de ces décisions. Elle nous a aussi donné des conseils pour suivre nos dépenses et abaisser notre burn rate.»
Les restaurateurs qui pivotent vers un nouveau modèle d’affaires font face au même défi. «Plusieurs propriétaires peinent à payer leurs frais fixes», rappelle François Meunier. D’ailleurs, ce n’est sans doute pas un hasard si, des sept nouvelles formations lancées par l’ARQ, le webinaire «Sachez gérer votre flux de trésorerie» ouvre le bal en juin prochain.
Plusieurs fronts de formation
Les dirigeants ne sont bien sûr pas les seuls à bénéficier d’une formation lors d’un pivot. «La formation est nécessaire autant pour les gestionnaires d’entreprise que pour les employés, insiste Nadia Bellehumeur. Dans un contexte de COVID-19, les formations devraient aborder la réorganisation du travail, la sécurité des employés et la relation avec les clients.»
À Locketgo, le formateur en gestion s’est impliqué dans la réorganisation du travail. «Toute l’équipe s’est retrouvée en télétravail, alors que ce n’était pas dans nos habitudes, dit Gabrielle La Rue. Le formateur nous a aidés à structurer nos horaires de travail et à choisir nos outils de communication. Il nous a aussi montré à utiliser notre plateforme collaborative à son plein potentiel.»
En restauration, les propriétaires qui effectuent un pivot doivent eux aussi se familiariser avec de nouveaux outils technologiques. «Il y a des restaurants qui utilisaient le papier et qui se tournent maintenant vers la commande en ligne et les solutions de paiement sans contact», note François Meunier. Des formations sur les stratégies web et le marketing numérique sont alors à prévoir.
Un autre sujet crucial est celui du service à la clientèle. «Dans le contexte sanitaire actuel, il y a toute une réflexion à faire sur l’optimisation de l’expérience client, dit François Meunier. Le port de masque, le respect de la distanciation physique, l’encadrement de la clientèle… tout cela peut être extrêmement rébarbatif pour la clientèle. On veut la rassurer, mais on veut aussi qu’elle revienne.»
Les restaurants qui veulent conserver leur clientèle tout en pivotant vers un nouveau modèle d’affaires ont ainsi intérêt à investir dans une formation sur le service à la clientèle !