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FORMATION. Les entreprises ont tout intérêt à profiter de la timide reprise de leurs activités pour accroître les compétences de leur main-d’oeuvre, et ainsi être prêtes pour la relance à venir. C’est pourquoi nous vous proposons des pistes de réflexion en matière de formation.
Déstabilisées par la crise sanitaire, les entreprises québécoises ont d’abord orienté leurs choix de formation vers leurs besoins les plus pressants. Les commerces et les usines se sont rués vers des formations en hygiène et en salubrité. Les équipes à distance se sont initiées aux meilleures pratiques de télétravail. Ainsi de suite.
Ces choix peuvent toutefois être réévalués, au fur et à mesure que les entreprises trouvent leur rythme de croisière et apprivoisent le «nouveau normal». Comment déterminer, en date d’aujourd’hui, quelles sont les formations les plus profitables pour les organisations à court et à moyen terme ?
Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, voit une première nécessité qui devrait perdurer : celle d’investir dans le développement des compétences en littératie numérique des travailleurs.
«La pandémie a forcé les entreprises à réfléchir à de nouvelles manières de virtualiser leurs services et d’automatiser leur production, explique-t-elle. Plusieurs postes seront appelés à changer. Les entreprises qui refusent de développer les compétences numériques de leurs employés feront tôt ou tard face à une pénurie de main-d’oeuvre.»
Inversement, l’essor de la technologie pourrait aussi redonner de la valeur à des compétences profondément humaines. «Lorsqu’on automatise des tâches, c’est un peu comme si on sortait le robot de l’humain», explique Manon Poirier. La directrice générale fait remarquer que les organisations qui traversent la crise avec succès sont celles qui ont misé sur des compétences de collaboration. Elle évoque la bienveillance, l’écoute et l’empathie démontrée par les gestionnaires. «La nouvelle normalité devra se centrer sur l’être humain», selon elle.
Bonnes pratiques RH
En temps de crise, une majorité d’entreprises ont sélectionné leurs formations sans réel processus de diagnostic et d’analyse. «C’est la principale lacune que nous remarquons, note Manon Poirier. C’est pourquoi nous espérons, à l’Ordre, que le gouvernement proposera une nouvelle édition du Programme actions concertées pour le maintien en emploi (PACME), afin d’aider les entreprises à faire des choix de formation éclairés.»
Le point de départ : un diagnostic organisationnel établi par l’entremise d’une évaluation de rendement. C’est du moins la démarche proposée par Danielle Gagnon, consultante en ressources humaines et en formation. «J’utilise l’évaluation de rendement pour relever les forces et les faiblesses de chaque employé. Je peux ensuite proposer des formations pour aider la personne à s’améliorer dans son poste.»
L’évaluation de rendement sert aussi bien à mesurer des compétences techniques que des attitudes et des comportements, précise la conseillère RH. «Lorsque je détecte des tensions dans une équipe, je peux proposer une formation sur la gestion de conflit.»
Lorsqu’on désire développer un programme de formation, on doit accorder une attention particulière au transfert des connaissances. «Le gestionnaire doit donner l’occasion à l’employé formé de consolider ses acquis en lui proposant des projets, des actions ou des responsa- bilités lui permettant de transposer des connaissances théoriques dans la pratique», explique Katherine Ouellet, stratège en développement organisationnel et fondatrice de la firme KO et compagnie.
Une démarche de formation implique un contrat d’engagement mutuel entre le gestionnaire et l’employé. «C’est une conversation qui se fait à deux, explique la conseillère RH. D’une part, on regarde comment la formation permet à l’organisation d’accomplir son plan d’affaires. D’autre part, on s’assure que l’employé y voit une valeur ajoutée.»
Contraintes budgétaires
La crise a vidé les coffres de plusieurs entreprises. Des stratégies existent toutefois pour réaliser un programme de formation sans y engloutir des sommes astronomiques.
Tout d’abord, rien n’oblige les entreprises à offrir des formations tous azimuts, en toutes circonstances. «On peut cibler nos supers utilisateurs, suggère Katherine Ouellet. Ce sont des employés qui connaissaient bien leur métier et qui ont de bonnes aptitudes relationnelles. Une fois formés, ces employés soutiennent leurs collègues en devenant mentors ou formateurs internes.»
Un autre moyen d’économiser sur les coûts de formation est de s’initier à l’approche de codéveloppement créée par Adrien Payette et Claude Champagne, où des groupes de professionnels partagent leur savoir dans le but d’améliorer leur pratique respective. «C’est un outil de formation peu coûteux, qui ne demande pas de grands moyens technologiques, explique Katherine Ouellet. Il suffit d’avoir une plateforme de communication collaborative, des fiches de contenu préparées par les participants et une personne dûment formée pour animer les rencontres.»
Un succès fou
22 000
C’est le nombre d’entreprises québécoises comptant au total quelque 127 000 travailleurs qui ont pu profiter du PACME. Créé en avril, il devait être disponible jusqu’au 30 septembre, mais l’enveloppe de 150 M $ s’est épuisée fin mai.