En lançant son projet entrepreneurial en pleine pandémie, la microbrasserie Verso a appris « à la dure » l’art de réduire ses coûts d’opération. (Photo: site web Verso)
PME. Les PME font face à une tempête parfaite, avec des ventes qui déclinent et des coûts qui augmentent. Dans ce contexte, elles n’ont d’autres choix que de travailler sur la « colonne des dépenses » pour s’aider à traverser la période de ralentissement économique actuel.
En lançant son projet entrepreneurial en pleine pandémie, la microbrasserie Verso a appris « à la dure » l’art de réduire ses coûts d’opération. En six mois, entre le moment où les fondateurs basés à Lac-Etchemin ont fait leur première demande de financement et la signature du prêt, le prix des équipements a augmenté de « plusieurs milliers de dollars », la chaudière à vapeur ayant bondi le 40 %. L’entreprise a donc été forcée de remanier son budget. « Nous devions acheter une canneuse, mais, en fin de compte, nous avons décidé de louer les services d’une personne qui vient faire le cannage à intervalle régulier », raconte Alexis Bertrand, un des cofondateurs.
Par la suite, le coût des matières premières — notamment celui du houblon — a grimpé à coups de 20 %. Pour naviguer à travers de telles fluctuations, l’entreprise s’est dotée d’un outil important d’aide à la décision : le calcul du « prix de revient ». Verso a entamé ce projet avec l’aide de la Société d’aide au développement des collectivités (SADC) de Bellechasse-Etchemin. « Pour réduire ses coûts, il faut d’abord les connaître, rappelle Katie Fortier, CPE, directrice générale de cette SADC. Souvent, les petites entreprises connaissent bien leurs coûts directs, mais lorsqu’on parle de coût complet, incluant le coût de la main-d’œuvre, de l’entreposage, des assurances, de l’emprunt et ainsi de suite, c’est moins évident », constate-t-elle.
En calculant le « prix de revient » de chacune de ses bières, la microbrasserie de Lac-Etchemin a vu plus clairement les options qui s’offraient à elle. « Nos bières fruitées coûtent cher à produire et se vendent peu, alors que, par exemple, notre bière mexicaine blonde au maïs est très populaire auprès de notre clientèle de skieurs et de plaisanciers, et coûte peu cher à faire. » Après avoir brassé 34 sortes de bières différentes lors de la première année, l’entreprise a ramené son offre à une sélection de 16 à 18 bières.
Ensuite, calculer le prix de revient a permis à Verso de mieux lire son marché. Depuis la fin de la pandémie, le marché de la bière artisanale offerte « en cannette » à l’épicerie s’est saturé. « C’est beaucoup plus profitable pour nous de vendre nos bières au verre dans notre pub, reconnaît Alexis Bertrand. Nous avons donc décidé d’orienter nos efforts marketing vers la création d’événements ayant pour le but d’attirer les gens dans nos installations. »
Ouvrir ses livres
Lorsqu’une entreprise a fait du ménage dans son offre de produits ou de services, et qu’elle s’est attaquée aux pertes financières les plus évidentes, elle doit par la suite adopter une démarche beaucoup plus « systématique » pour continuer de réduire ses frais de production. Éric Trudeau, conseiller d’affaires principal à la Banque de développement du Canada (BDC), suggère alors de se doter d’indicateurs de performance pour se guider dans la démarche.
« Dans la vie, on ne peut améliorer que ce qu’on mesure, assure-t-il. D’une part, l’entreprise doit choisir des indicateurs alignés sur ses objectifs d’affaires. Ensuite, elle doit accompagner ses indicateurs financiers — généralement sur une base trimestrielle ou annuelle — d’indicateurs de processus opérationnels, qui se mesurent au quotidien. Autrement, c’est très difficile de savoir si la nouvelle technologie ou la nouvelle manière de faire que l’on a implantée fonctionne. »
Créée par la fusion de Xpedigo et Tecor Transport en 2020, Obibox fait justement parti des entreprises qui ont établi une « culture de tests et d’amélioration des processus », basée sur des indicateurs de performance. « D’un côté, nous avons demandé à chaque département quels étaient leurs indicateurs opérationnels les plus importants, explique le cofondateur Jordan Arshinoff Foss. De l’autre, nous comptabilisons nos états financiers d’une manière très granulaire et précise afin de contrôler nos coûts. »
L’entreprise organise fréquemment des tests « A-B » pour comparer différentes manières de mener ses opérations. Ce faisant, Jordan Arshinoff Foss insiste sur l’importance d’être transparent avec ses employés, en communiquant aussi bien les objectifs à atteindre que les résultats financiers obtenus. « Certaines entreprises n’aiment pas montrer leurs états financiers ; nous, nous croyons qu’il faut partager cette information. La réalité sur le terrain, ce sont les employés qui la connaissent. Ce sont eux qui savent où on peut économiser de l’argent. Il faut leur faire confiance et les impliquer dans le processus. » Voilà de sages paroles.