(Photo: Mateus Campos Felipe pour Unsplash)
PROFESSION: AVOCAT. Les avocats seraient-ils jaloux des médecins ? Alors que ces derniers voient leurs intérêts représentés par de puissantes fédérations, les avocats sont regroupés par secteur de droit (défense, immigration, famille, etc.) et peinent à parler d’une seule voix.
L’Association professionnelle des avocates et avocats du Québec (APAAQ), créée à l’automne 2018 et présentée au public un an plus tard, tente de les rassembler. « Aucun organisme ne se préoccupe des conditions de pratique et des conditions socioéconomiques des avocats, souligne Me Catia Larose, présidente de l’APAAQ. Depuis quelque temps, on sent une demande de la part de ces professionnels d’avoir un organisme qui parle en leur nom. »
L’un des principaux objectifs de l’APAAQ sera de revaloriser la profession, explique Me Catia Larose, qui déplore l’image écornée des avocats. On leur reproche d’être là pour faire de l’argent, de compliquer les procédures et d’envenimer les débats. Par exemple, dans le récent film Marriage Story, c’est lorsque les avocats se mêlent du divorce des deux personnages principaux que celui-ci devient acrimonieux.
« Pourtant, le rôle des avocats est d’aider les gens, de défendre leurs droits et de protéger leur patrimoine, fait valoir Me Larose. Ils sont là pour trouver des solutions et agissent surtout en prévention. À peine 15 % des quelque 27 000 membres du Barreau plaident devant la cour. Les autres appuient leurs clients d’autres manières. »
Interlocuteur du gouvernement
L’APAAQ aimerait aussi intervenir dans des dossiers chauds, comme celui des tarifs offerts à l’aide juridique aux avocats en pratique privée, qui oppose le gouvernement provincial et le Barreau du Québec depuis 2017. Me Catia Larose admet qu’elle verrait bien son organisation se substituer à ce dernier comme interlocuteur du gouvernement dans ce conflit. « Le rôle du Barreau est de protéger le public, rappelle-t-elle. Il a donc peu de recours dans une telle négociation. S’il invite les avocats à faire des moyens de pression, il nuit au public. C’est à une association comme la nôtre d’agir. »
Le bâtonnier du Québec, Me Paul-Matthieu Grondin, juge que les avocats ont le droit d’exercer leur liberté d’association. Il admet que le rôle du Barreau est de former ces professionnels, de les inspecter et d’imposer la discipline et non de défendre leurs intérêts. « Ils ont le droit de s’associer et de militer comme ils l’entendent », dit-il.
La jeune association compte environ 1 500 membres. Elle a été rejointe en décembre dernier par l’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI). Cette dernière a inscrit ses quelque 300 membres en bloc à l’APAAQ et leur a payé les frais d’inscription pour la première année, tout en laissant à ceux qui désirent s’en retirer la liberté de le faire.
« Nos membres étaient assez enthousiastes envers l’APAAQ, confirme Me Stéphanie Valois, membre du conseil d’administration de l’AQAADI. Nous voyons un intérêt à avoir une association qui parle au nom des avocats, revalorise leur profession et intervient dans certains dossiers, comme celui des tarifs à l’aide juridique. »
L’APAAQ s’efforcera maintenant d’augmenter son nombre de membres, afin d’atteindre une masse critique suffisante pour devenir le porte-parole des avocats. Le recrutement a officiellement débuté en octobre dernier. « Nous souhaitons fédérer les membres des différentes associations sectorielles », précise Me Catia Larose.