Certains cabinets offrent du mentorat et de l’encadrement à leurs avocates afin de maintenir la progression de leur carrière et les aider à réintégrer leur poste après un congé de maternité. [Photo: 123RF]
Les cabinets d’avocat québécois s’efforcent de faire une plus grande place à la diversité et à la parité dans leur personnel et leur gouvernance. La participation à des initiatives d’organismes externes y contribue, tout comme des changements organisationnels.
« À l’époque, les femmes étaient très nombreuses dans les facultés de droit, mais peu faisaient carrière dans les grands cabinets, se rappelle Me Natalie Bussière, avocate associée chez Blakes. Il y avait des ghettos roses, comme le droit de la famille, plus populaire auprès des femmes que le droit des affaires », dit celle qui constate une évolution quant à la place des femmes dans les grands cabinets depuis ses débuts comme avocate en 1994.
Si le déséquilibre est moins prononcé aujourd’hui, les femmes affrontent toujours le défi de la maternité. Me Bussière note que plusieurs avocates mères éprouvent du stress, ayant l’impression de n’être ni pleinement au travail, ni pleinement à la maison. « Le cabinet doit créer des conditions propices à leur maintien dans la pratique et à la progression de leur carrière », poursuit-elle.
Conscient de cet enjeu, Blakes offre du mentorat et de l’encadrement pour aider les avocates à réintégrer leur poste après un tel congé. Le cabinet favorise également le perfectionnement professionnel par ses séminaires Classes affaires sur les compétences personnelles, le leadership, le coaching et le rendement. Blakes est par ailleurs engagé envers le Club 30 % (qui vise la présence d’au moins 30 % de femmes sur les conseils d’administration et les comités de direction) et compte actuellement 30 % de femmes dans son comité de direction.
Une décision réfléchie
Langlois avocats compte quant à lui 42 % de femmes parmi ses associés, en plus d’un conseil d’administration et d’un conseil exécutif paritaires. On y trouve plus de femmes que d’hommes chez les avocats non associés (81 c. 67).
La culture du cabinet favorise l’égalité parmi tout son personnel, sans égard au statut ni au genre. « Il y a 15 ans, les femmes quittaient souvent la pratique privée après quelques années, précise Me Jean-François Gagnon, chef de la direction. Les cabinets payaient pour les former, puis les perdaient. »
Il y a environ cinq ans, le cabinet a demandé à certaines de ses avocates les plus chevronnées de devenir mentors pour les plus jeunes. Elles montrent comment elles ont réussi leur carrière et leur vie de famille.
Le cabinet a aussi consulté pour comprendre les besoins des femmes. Cela a mené à du soutien technologique ou de gestion d’horaire. Le cabinet a instauré le programme Parents pressés, qui permet de commander à l’avance un repas et de le recevoir tout prêt au moment de quitter le travail.
Me Gagnon a récemment reçu le prix Alter Ego de l’Association des femmes en finance du Québec. Il est habitué d’entendre l’argument selon lequel il faut d’abord et avant tout nommer les gens au mérite sur les conseils et dans les directions. Un argument qui oublie trop facilement que les préjugés inconscients existent bel et bien.
« Ça ne se fait pas naturellement, croit-il. Nous avons pris la décision de nommer plus de femmes au conseil et d’en avoir plus dans la relève de la gouvernance. Nous n’avons fait aucun compromis sur la qualité, puisque ces femmes comptaient parmi les avocats les plus crédibles du bureau. »
Question de culture
Lavery a été le premier cabinet québécois à s’engager dans le programme de parité de La Gouvernance au féminin, dont il a obtenu la certification Bronze. Il compte 45 % de femmes dans son comité de direction et sur son conseil d’administration. En 2017, la moitié des nouveaux associés étaient des femmes, une proportion augmentée à 80 % en 2018. Par ailleurs, 68 % des professionnels du cabinet sont des femmes.
« La culture interne permet de devenir un cabinet attractif et mobilisateur et la parité fait certainement partie de cette culture, affirme Anik Trudel, chef de la direction du cabinet. L’exercice de certification de La Gouvernance au féminin permet de déterminer nos points forts et nos faiblesses à cet égard et d’ajuster le tir. »
Amélie Journet, chef, Ressources humaines et transformation organisationnelle, explique que le cabinet a mené plusieurs initiatives de mobilisation, notamment un sondage visant à cerner les éléments susceptibles d’améliorer la rétention des avocates. L’exercice a permis de déboulonner plusieurs mythes.
« Certaines femmes pensaient que prendre un congé de maternité d’une année était mal vu, alors que c’est ce que font la plupart des femmes chez nous, illustre-t-elle. D’autres croyaient qu’il serait difficile de prendre un tel congé si elles devenaient associées, ou encore qu’elles ne pourraient pas faire un retour au travail progressif. Nous faisons un effort de communication pour dissiper ces doutes. »
Me Trudel constate que la différence homme/femme n’est pas tellement un enjeu dans la génération montante. « Peut-être que dans quelques années, ce ne sera même plus un sujet de discussion », conclut-elle.
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