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Un fleuron des résidences pour aînés sous contrôle américain

La Presse Canadienne|Publié le 04 juin 2019

Un fleuron des résidences pour aînés sous contrôle américain

Il était minuit moins une. En fait, il était 5 h 21 lundi matin lorsque 38 avocats répartis dans trois villes en sont finalement arrivés à un accord après avoir négocié toute la nuit. L’important gestionnaire québécois de résidences pour aînés Le Groupe Maurice est ainsi passé aux mains du fonds immobilier américain Ventas.

Le fleuron québécois, qui exploite 31 résidences où logent 10 000 aînés, était confronté à un dilemme qui aurait pu sceller son existence: vivre ou mourir, racheter près d’un milliard $ à son bailleur de fonds ou se faire racheter et risquer de disparaître.

Il a finalement remporté son pari. L’entente prévoit que Ventas écrira un chèque de près de 2 milliards $ pour acquérir 85 pour cent de la division immobilière du Groupe Maurice. De cette somme, 987 millions $ permettront de racheter les parts d’Ipso Facto. Luc Maurice conservera la majorité des 15 pour cent restants.

C’est qu’il y a deux mois, l’entreprise se voyait imposer cette forme d’ultimatum par Ipso Facto, le fonds immobilier de la famille Bourgie, avec qui prenait fin une entente financière de 15 ans. La clause, dite «shotgun» ou «roulette russe», avait été déclenchée.

Il fallait réagir rapidement, a raconté fondateur et président, Luc Maurice, en entrevue avec La Presse canadienne. «L’alternative, c’était qu’il n’y avait plus de Groupe Maurice, a-t-il lancé. Les bâtisses auraient été vendues ou disposées à un, deux ou trois groupes, je n’en sais rien, mais je sais que la bannière Groupe Maurice n’aurait plus existé.»

«On parle de deux mois, mais dans les faits on parle de cinq semaines, a précisé M. Maurice. Puis dans les vrais faits, on parle de trois semaines parce qu’il faut se préparer à recevoir des investisseurs.»

S’en est suivi ce qu’il a qualifié de «speed dating», une recherche effrénée d’investisseurs. Deux mois difficiles, émotifs et excitants à la fois, a reconnu Luc Maurice qui ne connaissait pas l’univers de la haute finance.

M. Maurice a raconté s’être rendu compte rapidement qu’il faisait fausse route en recevant un grand nombre d’investisseurs intéressés. «On a donc décidé de mettre l’accent sur cinq ou six entités stratégiques, des organisations qui connaissaient notre industrie et qui nous connaissaient.»

«Les négociations n’ont jamais porté sur le prix, a-t-il assuré. Le prix était déjà bien clair. Ce n’était pas le plus offrant en termes de prix. C’était l’entité avec laquelle je pouvais mettre sur papier pendant les prochains 10 ans des montants suffisamment importants qui me permettent d’exceller dans mon secteur d’activité.»

Ventas a ainsi garanti sur papier des ressources financières dans certains champs qui étaient chers au fondateur. « C’est bien beau de dire que vous avez une bannière qui est plus humaine, qui innove davantage que les autres, mais on ne peut pas dire ça si les fonds ne suivent pas », a-t-il résumé.

Le Groupe Maurice précise que ses opérations ne seront pas affectées par le changement de contrôle. De même, l’équipe de direction restera en place.

«Des fonds d’investissement de la sorte, ça achète des parts de différents bâtiments que ça garde trois ans, cinq ans, dix ans, quinze ans, que ça dispose ensuite à un autre fonds d’investissement», a expliqué M. Maurice en réagissant au fait que c’est une entreprise de Chicago qui aura désormais le contrôle de l’entreprise.

La compagnie de gestion et la compagnie de développement ne sont pas touchées par la transaction.

Le Groupe Maurice estime posséder près de 9 pour cent des parts du marché des résidences pour aînés au Québec. M. Maurice a soutenu qu’il compte ouvrir de deux à quatre nouveaux complexes par année au cours des dix prochaines années sur l’axe Ottawa-Québec.

Ventas, pour sa part, possède plus de 1200 propriétés aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni.