«Telle une girouette qui tourne au gré du vent, la promesse de jours meilleurs pour nous tous n’est-elle pas uniquement une promesse électorale pour plaire à sa base militante en région?» (Photo: Adobe Stock)
EXPERT INVITÉ. La répartition de la carte électorale, à la suite du scrutin de 2022, montre que la Coalition avenir Québec (CAQ) est partout sauf à Montréal.
Nonobstant ses efforts, la CAQ peut difficilement escompter percer sur l’île de Montréal, et peut aussi difficilement espérer conserver ses assises dans la région de la capitale nationale.
Legault et ses stratèges le savent très bien. Les élections partielles de mars 2023 et d’octobre 2023 confirment ces difficultés.
Même minoritaire, le premier ministre François Legault doit alors miser sur les régions s’il veut espérer demeurer au pouvoir lors des prochaines élections générales en 2026.
La chose ne sera toutefois pas facile puisque même si nous avons tous oublié la COVID-19, les gens des régions, ces grands oubliés des mesures sanitaires et des couvre-feux, ont encore une dent contre le premier ministre.
Il y a à peine deux semaines, lors du 82e congrès de la Fédération québécoise des municipalités, Legault, derrière son lutrin et tentant de nous convaincre qu’il avait encore les deux mains sur le volant de la destinée du Québec, nous disait que les Québécois, qui étaient à la recherche de «jobs payantes», devaient se préparer à déménager en région dans les prochaines années pour profiter de la «renaissance industrielle».
François Legault mise le tout pour le tout sur la capacité de production d’Hydro-Québec qui doit absolument doubler ces prochaines années.
Harnachons les cours d’eau et défrichons nos forêts afin de faire miroiter des salaires qui ne seront jamais capables de supporter et de réparer les dégâts anticipés.
N’oublions pas que Legault mise d’autant plus sur l’ajout d’un parc éolien en Gaspésie et au Bas-Saint-Laurent.
Détruisons tout pour créer un peu de valeur et espérons que le Québécois moyen embarquera dans la danse.
Pour Legault, la solution est simple: taxer tout le monde et espérer que ces carnages naturels auront des retombées économiques positives pour ces régions avec un partage des revenus entre toutes les municipalités.
La part du gâteau
Même s’il est fier d’être le premier ministre, Legault ne doit pas perdre de vue que le Québec est petit et que nous nous partageons déjà tous la part du gâteau. Donner une plus grande part à quelqu’un se fait au détriment d’une autre personne.
Bien évidemment, Legault veut se départir des emplois à 18$ pour en créer de nouveau à 50$. Les futurs candidats de ces emplois qui n’existent pas encore auront-ils les compétences et les connaissances pour combler ces postes ou bien devront-ils retourner sur les bancs d’école, payer des droits de scolarités qui subventionneront éventuellement les futurs titulaires de ces postes dont nous ignorons s’ils existeront ou non et s’ils seront aussi payants qu’il nous le laisse croire?
Personne ne le sait, surtout pas Legault.
À moins bien évidemment que Legault mise sur les travailleurs immigrants, mais ça c’est un autre débat qui semble déjà perdu à la CAQ.
Le poids des mots est important et le choix des mots l’est tout autant. Legault devrait commencer à le comprendre après plus de six ans au pouvoir. Autant les journalistes que les spécialistes, sans oublier le citoyen lambda, scrutent ses promesses, ses réalisations, et ses excuses.
Donc, si vous habitez Montréal ou Québec, ne vous attendez pas à trouver des emplois payants. Si vous avez fait l’erreur de croire ses dernières promesses et que vous avez contracté une hypothèque ailleurs que dans les régions, eh bien ne vous attendez pas à avoir une «job payante». Inversement, si vous désirez déménager à Saint Clin-Clin-des-Mauls, vous allez devenir riche.
Ce n’est pas le préfet de cette région qui le dit. Ce ne sont ni le maire ni les employeurs qui le disent. C’est François Legault qui le promet, et nous devons le croire.
De quels emplois parle-t-il? Nous ne le savons pas encore. Lui non plus. Il se défend bien évidemment en nous disant que le Québec et les régions n’arriveront à rien s’ils ne prennent pas des risques et si ne pouvons pas gérer les risques.
Tente-t-il de nous convaincre ou bien de justifier son lamentable échec avec Northvolt? À vous de choisir!
Les mairies, les partis d’opposition, les spécialistes et même France-Élaine Duranceau, sa ministre des Affaires municipales et de l’habitation sont unanimes sur l’incapacité des régions à satisfaire à la future demande.
Ces régions n’ont pas de logements et n’ont pas d’écoles. Elles n’ont ni les infrastructures ni les budgets, mais ce n’est pas grave puisque la pensée magique: c’est puissant!
C’est sûr que nous pouvons toujours faire la navette entre les centres urbains et les régions.
Mais, le temps passé dans votre véhicule, l’augmentation des gaz à effets de serre, l’augmentation des risques de collisions et d’accidents, les répercussions négatives que peut avoir sur votre couple le fait de vivre dans votre voiture, les problèmes de congestion, et ne pas valoriser ou mettre en place des structures pour faire profiter les résidants actuels de ces régions sont-ils pris en considération dans les calculs boiteux et improvisés de Legault?
Le merveilleux monde du travail semble totalement incompris par Legault.
Rappelons qu’en 2021, Legault disait à qui voulait bien l’entendre que la pandémie avait permis de démontrer que le télétravail était possible et représentait une opportunité pour le gouvernement d’offrir des emplois de qualité à toutes les régions.
Peut-être que les emplois payants dont il fait la promotion seront en Gaspésie et pourront être faits par les résidents de Kirkland ou de Westmount dans le confort de leur salon.
Telle une girouette qui tourne au gré du vent, la promesse de jours meilleurs pour nous tous n’est-elle pas uniquement une promesse électorale pour plaire à sa base militante en région?
Puisqu’il n’y a que nos plaques minéralogiques qui ont encore un peu de mémoire, soulignons qu’à quelques mois du scrutin de 2022, Legault ne cessait de marteler que les régions étaient l’un des chevaux de bataille pour les mois à venir.
Rien n’a changé dans les régions, si ce n’est que la chute de sa cote de popularité, et puisqu’il mise sur nos pertes de mémoire, pourquoi ne pas continuer de promettre les mêmes choses en ne changeant que la date du communiqué?
La majorité de la CAQ « passe par les régions », lançait François Legault le 24 septembre 2018, une semaine avant les élections.
Plus ça change, plus c’est pareil, et plus c’est pareil, moins que les choses changent!