La firme de Québec Styl&Tech a remporté la distinction Innovation au Gala Les Mérites STIQ 2019, un prix décerné pour le développement de son minibus électrique avec structure en aluminium. (Photo: Courtoisie)
SECTEUR MANUFACTURIER. Nombreux sont ceux qui parlent d’innovation, mais plus rares sont ceux qui en font. Innover se révèle pourtant aujourd’hui souvent comme un avantage concurrentiel important. Comment exceller dans le domaine ? Deux fabricants québécois primés vous exposent leur stratégie.
Miralis, un fabricant de meubles, est l’un d’entre eux. L’entreprise de Saint-Anaclet-de-Lessard, près de Rimouski, a reçu en avril dernier le Mercure Manufacturiers innovants. Que lui a valu cet honneur ?
La Fédération des chambres de commerce du Québec, qui organise les Mercuriades, récompensait son Programme 36-2-1, lancé vers 2012, qui a, selon elle, catalysé le succès de l’organisation. Daniel Drapeau, PDG de Miralis, explique que ce programme vise un objectif triple : réaliser 36 évolutions et 2 innovations par année, et générer une innovation d’envergure aux deux ou trois ans.
«Les 36 évolutions sont des améliorations de produits issues de demandes de nos détaillants et de notre clientèle, comme des changements de fini, dit M. Drapeau. Les deux innovations sont des améliorations de produit qui existent déjà dans le monde, mais qu’on réalise avec notre touche personnelle.»
Quant à l’innovation d’envergure, il s’agit de la création d’un produit qui n’existe pas encore dans les marchés dans lesquels Miralis est présente. L’entreprise a par exemple lancé l’an dernier le Curio, un meuble vitré d’inspiration italienne qui, affirme l’entreprise, va à contre-courant de la tendance du marché.
Structurer l’innovation
L’entreprise ne veut cependant pas faire différent pour faire différent. M. Drapeau explique qu’il cherche à déceler la logique qui génère les tendances de sorte à ne pas tomber dans l’éphémère. Il vise plutôt à découvrir des modes qui vont perdurer.
«Depuis quelques années, par exemple, les gens cachaient leurs choses, remarque M. Drapeau. Les styles étaient épurés. Il y avait peu de verre. Maintenant, l’économie va bien, les gens prospèrent, et on veut de nouveau montrer nos choses. Nous avons donc noté la tendance, et nous avons lancé le Curio.»
Un des avantages d’un programme comme celui de Miralis est notamment de structurer l’innovation. Car innover ou faire de la qualité pour un seul produit, une seule fois, c’est facile, estime M. Drapeau. «C’est de le faire tous les jours qui est difficile, dit-il. Le programme permet donc d’éviter de faire de l’innovation pendant trois mois pour l’oublier ensuite pendant trois ans.»
Cette structure comprend notamment des réunions tous les mois pour voir quelles innovations sont en développement, et quelles sont celles qui seront développées spécifiquement au cours du mois actuel.
«Le programme amène discipline et constance à notre innovation, dit M. Drapeau. C’est notre promesse aux clients. Et ils l’apprécient : ils savent qu’ils auront 36 améliorations par année, et ils savent qu’ils seront surpris aux deux ou trois ans. Ça devient en quelque sorte un programme de fidélisation.»
Mieux collaborer
L’hiver dernier, la firme de Québec Styl&Tech remportait la distinction Innovation au Gala Les Mérites STIQ 2019, un prix décerné pour le développement de son minibus électrique avec structure en aluminium.
«C’est un design novateur parce que depuis les années 1990-2000, les fabricants de bus utilisent généralement plutôt l’acier inoxydable, dit le président Roch Champagne. Notre bus est la première structure complètement en aluminium qui va rouler sur les routes d’Amérique du Nord. On a déposé le brevet.»
Les avantages : 30 % plus léger, 30 % de réduction de la consommation énergétique et 30 % de réduction du coût d’entretien.
Maintenant, fabriquer un bus en aluminium ne va pas de soi. Souder l’aluminium affaiblit le métal, et pour redonner à la structure sa rigidité, l’entreprise aurait dû la tremper entièrement. Pour contourner ce défi, l’entreprise a plutôt décidé de fixer les différentes composantes du châssis par attache mécanique, soit par ancrage («clippage»), collage et rivetage. Pas que cela soit simple non plus. Mais en faisant beaucoup de simulations, l’entreprise a réussi à développer une solution novatrice qui marche.
Styl&Tech, qui emploie douze employés, a également collaboré avec le Centre de recherche sur l’aluminium REGAL, de l’Université Laval. «On a étudié notre châssis joint par joint avec eux pour nous assurer qu’il était solide et qu’il répondait aux normes, dit M. Champagne. Comme nous ne sommes pas une grande entreprise, cette forme de collaboration était la meilleure façon de faire.»
La PME compte également collaborer avec le Centre des technologies de l’aluminium, à Chicoutimi, pour améliorer davantage son véhicule.
Pour le moment, Styl&Tech réalise des tests internes en vue de l’homologation de son minibus. «En 2020, on pourra faire des tests sur la route, avec des passagers, pour des sociétés de transport au Québec. Déjà, à ce jour, deux sociétés sont intéressées à notre bus», explique M. Champagne.
Pas besoin de réinventer la roue pour innover : parfois, le châssis seulement, c’est bien assez.