Basé à Lac-Mégantic, Bestar est un fabricant de meubles qui a le vent dans les voiles. (Photo: Bestar)
SECTEUR MANUFACTURIER. Propulsée par les vents favorables d’une économie en croissance, mais aussi entraînée par les efforts soutenus des entreprises qui la composent, l’industrie du meuble vient de connaître une poignée d’années d’expansion. Et avec le confinement, les gens pourraient bien avoir envie de changer de décor, ce qui augure bien pour l’industrie.
Basé à Lac-Mégantic, Bestar est un fabricant de meubles qui a le vent dans les voiles. L’entreprise, qui fait affaires des deux côtés de la frontière, avalait en janvier dernier un concurrent américain, Bush Industries, portant le total de ses employés à 600. Leur fusion devait consolider des ventes d’environ 260 M$. Et peu avant, en novembre 2019, Bestar ouvrait une deuxième usine – celle-là de 50 000 pieds carrés – à Sherbrooke.
Les choses n’ont toutefois pas toujours été si roses, rappelle Martin Tardif, le vice-président du développement des affaires et des produits. « Le début des années 2000, et les dix années qui ont suivi, ont été très difficiles », dit-il. La hausse du dollar, la percée des produits abordables venus d’Asie et la Grande récession sont tous des facteurs qui, pris ensemble, se sont avérés une tempête parfaite qui a considérablement nui au secteur. Heureusement, les dernières années ont vu la vapeur s’inverser. Bien qu’il ne veuille pas dévoiler de chiffres plus précis, M. Tardif révèle que Bestar a connu une croissance dans les deux chiffres depuis trois ou quatre ans.
Les causes sont diverses. De façon générale, le meuble allaient bien jusqu’à la crise parce que l’économie se portait bien, reconnaît Martin Tardif. Mais force est d’admettre que l’entreprise a aussi bien joué ses cartes. « Nous, on s’est retiré des marchands de meubles parce que ça n’allait pas bien », explique-t-il. Bestar mise maintenant plutôt sur un modèle d’affaire qui se base principalement sur l’achat par Internet : le consommateur achète son meuble en magasinant sur un site web, comme walmart.com, et Bestar le lui livre directement.
« Et ça, c’est une business qui va bien », dit M. Tardif. Même durant la crise. CNBC rapportait par exemple que le titre de Wayfair, une entreprise de ventes de meuble en ligne, avait bondit de 37 % lundi le 6 avril. C’est que la croissance de ses revenus avait atteint presque 20 % au début du mois de mars, une croissance similaire à celle observée en janvier et février, et que ce chiffre avait doublé vers la fin du mois. La tendance avait même persisté au début d’avril. La cause? Les gens ont profité de la crise pour redécorer ou se créer un bureau à la maison.
Bestar considère être en bonne posture pour connaître encore la croissance au cours des années à venir, une fois passée la crise du COVID-19. Car selon M. Tardif, la prochaine génération d’acheteurs, les adolescents qui achètent aujourd’hui presque tout en ligne, risquent fort de continuer de tout acheter sur le web quand ils grandiront. « Par défaut, un jeune de 16 ans qui achète sa musique et ses vêtements sur Internet va continuer va faire pareille plus tard avec ses meubles. »
Confluence de facteurs favorables
La Grande récession a été une véritable « hécatombe », raconte Gilles Pelletier, le pdg de l’Association des fabricants de meubles du Québec. Depuis, il note que l’industrie s’est toutefois relevée. Beaucoup d’entreprises ont développé de nouveaux modèles d’affaires et ont migré vers l’Internet. Cela leur a permis de profiter de l’avantage d’être basé près du marché nord-américain, qui est hyper important pour le secteur, et de mieux concurrencer l’Asie : les entreprises sont alors mieux positionnées pour livrer plus rapidement une plus grande variété de produits. Un choix payant durant la crise du coronavirus.
« Les Chinois font de la production de masse, dit M. Pelletier. Ils conçoivent un modèle, d’une couleur, puis le produisent en quantité industrielle et le livrent partout. » Mais les consommateurs veulent aujourd’hui de la variété et de la flexibilité. Surtout la clientèle plus jeune qui suit les tendances, qui elles, changent rapidement. D’être si prêt du marché confère donc aux entreprises québécoises une certaine agilité, reconnaît Gilles Pelletier. « Il y a également beaucoup d’entreprises, comme Huppé, Mobican ou Canadel, qui ont opté pour un modèle de personnalisation. C’est ce que les Chinois sont incapables de faire. »
Une reprise claire et nette
Le sous-secteur du meuble résidentiel n’est pas le seul à avoir le vent dans les voiles. « Grâce à de bons investissements et à leur capacité d’innovation, des joueurs du mobilier commercial, comme Artopex dans le mobilier de bureau, ou Foliot dans le meuble pour les hôtels, ont aussi connu une belle croissance », raconte Gilles Pelletier.
Et pour l’industrie dans l’ensemble, l’avenir à long terme risque fort d’être fait de croissance, dit Gilles Pelletier, avec confiance. « La crise du COVID-19 pourrait nous amener à revaloriser l’achat local. Les gens auront passé beaucoup de temps à la maison sans aller en voyage ou au restaurant, alors ils seront peut-être tentés de refaire leur cuisine. Mais quoi qu’il en soit, une chose en sûr, ça va repartir. C’est clair et net. »