«Le coeur de notre écosystème, l’ADN de Premier Tech est à Rivière-du-Loup, et cet ADN est structuré et conditionné par le fait que nous sommes en région», dit Jean Bélanger, président et chef de la direction.
SPÉCIAL 300 PLUS GRANDES ENTREPRISES. Des revenus de 1 milliard de dollars (G$), 5200 employés situés dans 28 pays, un siège social à Rivière-du-Loup… Premier Tech est l’archétype de l’entreprise dite «glocale»— à la fois globale (mondiale) et locale — qui dynamise sa région et qui ne voudrait pour rien au monde déménager ses pénates dans une grande ville.
«Être située en région donne une couleur à notre entreprise, tout comme le fait d’être née en région, d’avoir su s’internationaliser sans se “dérégionaliser”, puis d’y croire encore, aujourd’hui, après 100 ans d’existence», insiste le président et chef de la direction de l’entreprise familiale, Jean Bélanger. À la tête de Premier Tech depuis 1999, l’ingénieur industriel a occupé diverses fonctions au sein de l’organisation depuis 1988.
Fait méconnu, Premier Tech a été fondée en 1923 à New York, par deux frères allemands. L’entreprise s’est ensuite implantée dans le Bas-Saint-Laurent dix ans plus tard, en 1933, alors à la recherche de tourbières de qualité.
Bernard Bélanger, le père de Jean Bélanger, l’a achetée en 1978; il est aujourd’hui président du conseil d’administration de Premier Tech. Un siècle après sa fondation, la multinationale de Rivière-du-Loup, une ville de 20 000 habitants, deuxième pôle économique de la région après Rimouski, est devenue une société très diversifiée.
Elle évolue dans cinq domaines d’activité:l’horticulture et l’agriculture (bonification des rendements des cultures); la maison et le jardin (produits pour embellir et entretenir les propriétés); les systèmes automatisés (optimisation des installations manufacturières); l’eau et l’environnement (meilleure gestion de l’eau et des déchets solides); le numérique (solutions numériques et de visualisation 3D pour le secteur manufacturier).
Des clients un peu partout
Les revenus de l’entreprise (1,1 G$ en 2022) sont également bien diversifiés sur une base géographique. Son principal marché est réparti entre les États-Unis (39% des ventes), le Canada (27%), l’Europe (24 %) et l’Asie/Océanie (7 %).
Au total, la multinationale a 48 installations manufacturières dans 16 pays. De ce nombre, 20 sont situées au Canada, dont neuf au Québec. Premier Tech affiche aussi une bonne croissance de son chiffre d’affaires. Ce dernier a par exemple crû de 372 millions de dollars (M$) au cours des cinq dernières années, principalement grâce à de la croissance interne.
«Au cours des 33 dernières années, on a réussi à maintenir un taux de croissance moyen annualisé de 10%», souligne Jean Bélanger. Étant donné la taille de l’entreprise, ses revenus réalisés dans le Bas-Saint-Laurent sont relativement modestes par rapport aux ventes totales, admet l’entrepreneur.
En revanche, la société a un effet important à l’échelle régionale. Dans le Bas-Saint-Laurent, elle compte 2963 employés, incluant des emplois «induits». Par exemple, si Premier Tech fabrique des équipements, elle aura besoin de camionneurs pour les transporter.
Les approvisionnements locaux de la multinationale sont aussi très importants.
En 2022, ses achats de biens et de services dans l’ensemble du Québec ont totalisé 260 M$. De ces achats, 60 M$ ont été réalisés dans le Bas-Saint-Laurent, dont 40 M$ uniquement dans la MRC de Rivière-du-Loup. La multinationale représente donc un client intéressant pour des dizaines de fournisseurs, incluant pour la cafétéria du siège social, qui fait vivre une expérience aux visiteurs, en mettant notamment en valeur des produits locaux, des saveurs et des recettes du Bas-Saint-Laurent.
Recruter
Par ailleurs, même si recruter des travailleurs spécialisés dans le Bas-Saint-Laurent «peut représenter un défi», Premier Tech n’a pas de problème particulier à recruter du personnel, affirme Jean Bélanger. À ses yeux, la raison est simple: comme l’entreprise est un leader mondial dans plusieurs domaines, les meilleurs talents n’hésitent pas à déménager dans la région pour y faire carrière.
«Imaginons que tu es un Québécois, un Ontarien ou quelqu’un du Nouveau-Brunswick, et que tu veux travailler pour le leader mondial du traitement des eaux usées des résidences, eh bien le leader mondial est à Rivièredu-Loup!» dit-il.
L’entreprise recrute aussi des employés à l’étranger qui souhaitent travailler dans leur domaine d’expertise. Comme environ 80% de la recherche et développement mondial de Premier Tech se fait à Rivière-du-Loup, le siège social représente un pôle d’attraction naturel.
Cela dit, l’entreprise doit aussi faire des tournées d’embauche dans d’autres régions du Québec afin d’y recruter des talents. Par exemple, l’automne dernier, des représentants de Premier Tech sont allés à Montréal, Trois-Rivières, Longueuil, Sherbrooke et Québec. Jean Bélanger croit qu’il serait «facile d’abdiquer» et d’ouvrir un bureau à Montréal, Toronto ou Boston pour faciliter le recrutement. Malgré tout, il persiste: on peut très bien être une multinationale dynamique en région. «Le coeur de notre écosystème, l’ADN de Premier Tech est à Rivière-du-Loup, et cet ADN est structuré et conditionné par le fait que nous sommes en région.»
Jean Bélanger est très optimiste pour les prochaines années, voire décennies. Il dit que plusieurs «métiers» de Premier Tech sont alignés sur les grandes tendances mondiales, et ce, de la protection de l’environnement à l’approvisionnement en nourriture de la planète. Aussi, si le premier siècle d’existence de l’entreprise a été excitant, ce qui s’en vient le sera encore bien davantage, selon l’entrepreneur.