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Gildan en quête d’«avancées significatives»

Philippe Jean Poirier|Édition d'avril 2023

Gildan en quête d’«avancées significatives»

Peter Iliopoulos, vice-président principal à la fiscalité, au développement durable et aux affaires gouvernementales de Gildan.

SPÉCIAL CLIMAT: ADAPTEZ VOTRE ENTREPRISE. Deux décennies après l’adoption d’une première politique environnementale explicite et assumée, le fabricant de vêtements Gildan a senti le besoin de redéfinir sa démarche en matière de développement durable, en publiant sa stratégie ESG (environnementale, sociale et de gouvernance) de nouvelle génération et ses cibles futures en 2022. Retour sur une décision qui positionne l’entreprise montréalaise fondée en 1984 à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques.

Dès 2009, Gildan a amorcé une transition énergétique salutaire dans ses usines du Honduras et de la République dominicaine. L’entreprise y a substitué de la biomasse issue de déchets agricoles à une portion du très polluant bunker fuel utilisé pour produire la vapeur requise dans la fabrication de vêtement. De 2010 à 2015, le fabricant « verticalement intégré » est ainsi parvenu à pulvériser sa cible initiale de réduction des émissions de 20% en atteignant un impressionnant 45% par rapport à l’année de référence. Après ce grand coup de barre, le chemin a été plus ardu. Pour la période de 2015 à 2020, l’entreprise a plafonné à 1% de réduction, ratant ainsi sa cible de 10%.

Mentionner cette stagnation périodique n’enlève rien à l’engagement global de Gildan, présente dans l’indice de développement durable Dow Jones depuis 2013 et classée 32e des 100 sociétés les mieux gérées du point de vue du développement durable par le Wall Street Journal (2020) et 60e du Global 100 des entreprises les plus durables par l’organisme Corporate Knights (2022). Au total, 39% de l’énergie qu’elle consomme provient de sources renouvelables (rapport ESG 2021).

Le fait d’attirer l’attention sur ce point montre plutôt le défi que représente la durabilité pour une entreprise de la taille de Gildan — qui compte 50 000 employés —, passé un certain seuil d’engagement. «Aujourd’hui, les décisions qui permettent des avancées significatives ne sont plus aussi évidentes», reconnaissait d’ailleurs Peter Iliopoulos, vice-président principal à la fiscalité, au développement durable et aux affaires gouvernementales de Gildan, lors du lancement de la Stratégie ESG de nouvelle génération, en janvier 2020.

 

Vers une démarche « holistique »

La nouvelle stratégie de Gildan se veut «holistique», nous explique le vice-président principal. Elle résulte d’une «analyse de matérialité» prenant en compte le point de vue de toutes les parties prenantes internes et externes à l’entreprise. «Pour nous aider à définir notre stratégie et à établir nos cibles, nous nous sommes assis avec les investisseurs, les clients, les fournisseurs et les organisations non gouvernementales; nous avons rencontré le comité de direction et nous avons interviewé plus de 300 employés», explique Peter Iliopoulos.

Gildan a aussi fait un changement important au chapitre de la gouvernance. Plutôt que de remettre la responsabilité des engagements ESG entre les mains d’une direction nommée à cet effet, l’entreprise a créé un «comité de pilotage» («steering committee») composé de membres de la direction couvrant tous les aspects de l’entreprise : les opérations, les ventes, le marketing, les finances, la distribution et ainsi de suite. «Nous ne voulions pas que cette stratégie soit développée en silo et que, par la suite, une direction ESG communique les cibles au reste de l’organisation. Nous avons pris soin d’obtenir la contribution de toutes les unités d’affaires et de toutes les fonctions de l’organisation.»

L’objectif: obtenir une «adhésion complète» au projet.

A résulté de l’exercice l’adoption de cibles environnementales ambitieuses en accord avec le «Science Based Targets initiative» (SBTi), soit une réduction des émissions de gaz à effet de serre de portée 1 et 2 de 30% d’ici 2030, une réduction de l’intensité de sa consommation d’eau de 20% d’ici 2030 et l’utilisation de 75% d’emballages recyclés d’ici 2027, tout cela par rapport à l’année de référence de 2018. 

Pour atteindre ces cibles, Gildan mise sur le fait d’être une entreprise «verticalement intégrée», signifiant qu’elle possède et opère ses propres usines. «Nous sommes convaincus d’avoir une visibilité et un contrôle de notre chaîne d’approvisionnement sans équivalent dans notre industrie, dit le VP. Ce qui, ultimement, nous donne l’habilité d’implanter les meilleures pratiques environnementales.»

Au programme, Gildan compte augmenter «son efficacité opérationnelle», étendre l’utilisation de la biomasse à l’ensemble de sa production et augmenter la circularité des intrants servant à la fabrication des vêtements, y compris l’utilisation d’un coton provenant de fournisseurs continentaux. «Nous reconnaissons qu’il y a encore beaucoup de travail, et nous demeurons humbles face à cet enjeu, dit Peter Iliopoulos. Nous allons continuer de pousser de l’avant notre stratégie tout en améliorant et en renforçant nos pratiques ESG.

Car une chose est sûre: le développement durable demeura toujours au cœur de l’identité de Gildan.»