Zone de Sherbrooke: une nouvelle révolution quantique en Estrie
Maxime Bilodeau|Publié le 09 Décembre 2020(Illustration: Saucier+Perrotte Architectes)
SPÉCIAL INNOVATION. La connaissance des lois fondamentales en ce qui a trait aux électrons et aux atomes a déjà rendu possibles les nombreux objets électroniques qui peuplent aujourd’hui notre quotidien. C’est ce qu’on appelle la première révolution quantique.
La deuxième permettra quant à elle de tirer profit des concepts les plus contre-intuitifs de la mécanique quantique, accélérant ainsi la vitesse de calcul des données. Imminente, elle pourrait en partie se dérouler à Sherbrooke, qui a fait de la science quantique sa spécialité en vue d’être désignée zone d’innovation par le gouvernement du Québec.
« Le Saint-Graal, c’est l’ordinateur quantique qui ouvre la porte à des analyses autrement irréalistes. La question n’est toutefois plus de savoir si cela est possible, mais bien quand, où et comment », explique Christian Sarra-Bournet, directeur exécutif de l’Institut quantique de l’Université de Sherbrooke (IQ).
Outil de relance économique
L’institut de recherche disposera d’ailleurs de ses propres locaux sur le campus de l’établissement d’enseignement d’ici août 2021. Le projet, évalué à 10 millions de dollars, réunira 200 spécialistes en matériaux quantiques, en information quantique et en ingénierie quantique. L’IQ est associée depuis juin dernier avec IBM, qui lui fournira un accès exclusif à ses systèmes informatiques quantiques.
Les retombées de cette seconde révolution sont à l’image de son potentiel : énormes. Le Conseil national de recherches Canada prévoit que le secteur des technologies quantiques générera des revenus annuels de l’ordre de 142,4 milliards de dollars et fournira un gagne-pain à 229 000 Canadiens en 2040. « Les applications sont nombreuses ; elles vont du lidar à la cryptographie sécurisée en passant par la mise au point de nouvelles molécules pharmaceutiques », souligne Christian Sarra-Bournet.
Grâce aux divers investissements stratégiques en science quantique qui y ont été réalisés dans les 40 dernières années, Sherbrooke est en bonne position pour tirer son épingle du jeu. Et la pandémie de COVID-19 ne change rien à cela, bien au contraire. « Des pays comme la France et l’Allemagne ont déterminé le quantique comme un des fers de lance de leur relance économique », indique le scientifique.
La confiance règne
La reine des Cantons-de-l’Est compte bien tabler sur son expertise dans le domaine. Dans un document déposé auprès de Québec à la fin 2019, l’administration municipale détaille sa vision de zone d’innovation. Celle-ci se décline en trois secteurs distincts : celui de l’Université de Sherbrooke, consacré à la recherche fondamentale, celui des abords de la rivière Magog et du lac des Nations, destiné aux transferts technologiques, ainsi que celui du centre-ville, voué à l’entrepreneuriat.
On retrouve tous les partenaires clés du projet le long de cette trame, soit Sherbrooke Innopole, le cégep de Sherbrooke, le centre collégial de transfert de technologie Productique Québec et le Centre de services scolaire de la Région-de-Sherbrooke.
« Nous avons été parmi les premiers à soumettre notre projet auprès du gouvernement, avec qui nous entretenons depuis un dialogue constant, affirme Marie-France Delage, directrice générale adjointe au développement et aux partenariats à la Ville de Sherbrooke. Nous avons créé les conditions gagnantes à l’attraction, à l’accompagnement et à la rétention d’entreprises dans le secteur quantique. »
De fait, Qubic, Nord Quantique et SB Quantum, trois jeunes pousses incubées à l’Accélérateur de créations d’entreprises technologiques de Sherbrooke, ont déjà obtenu du financement du ministère de l’Économie et de l’Innovation. « Nous sommes très convaincus quant à nos chances d’être reconnus comme zone d’innovation », déclare-t-elle.