Les spectacles pour entreprises permettent aux humoristes comme Michelle Desrochers de comber la période creuse entre la création et le lancement d’un spectacle, soutient Véronique Bigras, associée et directrice du marketing chez Groupe Phaneuf. (Photo: courtoisie)
TOURISME ET ÉVÉNEMENTIEL D’AFFAIRES. C’est connu, les Québécois adorent s’asseoir dans la pénombre d’une salle de spectacle pour écouter des blagues. Un aspect moins connu de l’industrie de l’humour est la possibilité d’engager des artistes de stand-up dans le cadre d’événements d’affaires. Pour en savoir plus, Les Affaires s’est entretenu avec Groupe Phaneuf, une agence de production deux fois nommée Producteur de spectacles de l’année au gala des Oliviers (2019 et 2022).
Groupe Phaneuf a été fondé il y a 53 ans par Luc Phaneuf. À l’époque, ce jeune rêveur de 17 ans voulait représenter les artistes phares de la musique de la décennie 1970, tels que Plume Latraverse (le seul musicien à faire partie de l’agence aujourd’hui) et Offenbach. En 2002, le fils du fondateur et président actuel, Benjamin Phaneuf, devenu agent au sein de Groupe Phaneuf, commence à ajouter des humoristes à la liste des artistes représentés par l’agence. Plus de 20 ans plus tard, cette dernière est un incontournable de la scène comique francophone, comptant une douzaine d’artistes, autant ceux qui sont bien établis que ceux qui sont issus de la relève, comme Louis-José Houde, Rosalie Vaillancourt, Patrick Groulx ou Maude Landry. Si l’organisation et la production d’une dizaine de tournées annuelles pour ses artistes occupent en priorité l’entreprise familiale basée à Longueuil, les spectacles privés représentent pour celle-ci une plus-value non négligeable.
Un bon rodage
Les spectacles pour entreprises se révèlent fort utiles pour les artistes, soutient Véronique Bigras, associée et directrice du marketing chez Groupe Phaneuf. « Les “corpos” permettent de combler une espèce de période creuse entre la création et le lancement du spectacle, dit-elle. Cela agit comme une sorte de rodage, ça permet de tester les eaux. Même si notre principale raison d’être est d’organiser des tournées en salle, tous nos artistes font des événements corporatifs, et ce, parce qu’ils le veulent bien. »
Si, à une époque pas si lointaine, les artistes considéraient comme moins prestigieux de jouer pour un public d’affaires, Groupe Phaneuf croit que les perceptions ont changé. « Je dirais qu’il y a plus de ce type de contrat qu’avant chez nos artistes, justement parce qu’ils ont compris combien ils peuvent apprendre dans ce cadre-là », dit Julie-Anne St-Amand, directrice du volet d’agence de spectacles de l’entreprise.
Plus précisément, se produire sur scène lors d’un congrès, d’un gala ou d’un party d’employés permet aux artistes de travailler leurs interactions avec le public. « Dans un show classique, on connaît l’heure où les gens arrivent, ils sont venus exprès pour ça, le bar est fermé pendant le spectacle : on contrôle les paramètres, dit Julie-Anne St-Amand. Dans les événements privés, c’est souvent plus festif et ça entraîne plusieurs données qu’on ne peut pas contrôler. Pour un artiste, ça devient un passage nécessaire pour mieux se connaître et pour son évolution, d’apprendre à interagir avec ces publics-là. »
Le bon artiste pour le bon public
Cela dit, un travail important est mené en amont pour que toutes les parties impliquées soient satisfaites. L’entreprise préfère s’abstenir si le public et l’humoriste ne semblent pas faits l’un pour l’autre, affirment les deux membres de la direction. « Notre agent qui s’occupe des contrats d’affaires pose énormément de questions avant de faire des propositions de noms, dit Véronique Bigras. On veut bien saisir la personnalité du client et ses attentes pour connaître le type de gags qu’ils veulent entendre. Certains de nos artistes sont plus crus, d’autres plus absurdes. Ce n’est pas tous les humoristes qui sont pour tout le monde. Avec le temps, on a su développer un savoir-faire là-dedans pour cibler les besoins. »
Les publics d’affaires ont accès à différentes formules qui ne se prêtent pas à la tournée classique. Le crowdwork, notamment, est un type de spectacle dans lequel l’humoriste intègre l’improvisation et l’interaction spontanée avec la foule à ses numéros écrits, une touche très appréciée dans les événements privés, disent Véronique Bigras et Julie-Anne St-Amand. « Ça peut être vraiment cool pour des employés ou des clients d’entendre des blagues sur le grand patron ou sur l’histoire de l’entreprise, dit Véronique Bigras. Nos artistes s’amusent beaucoup avec ça. »
La formule gala d’humour gagne également en popularité, disent les deux directrices. « De nombreux clients veulent s’offrir un gros nom pour faire plaisir aux participants à l’événement, un Louis-José ou un Simon Leblanc, dit Véronique Bigras. L’avantage du gala d’humour, c’est qu’on peut venir ajouter deux ou trois humoristes moins connus, qui font chacun un numéro de 15 ou 20 minutes, à ce gros nom. Ça permet de ratisser plus large, et souvent les gens vont découvrir un coup de cœur là-dedans. Pour nous, c’est aussi une super belle façon de faire découvrir notre relève. »