Le Québec répond depuis longtemps à la demande de fromages de sa population. C'est pourquoi l'exportation est devenue une solution intéressante à ce marché saturé. (Photo: Zoé Schaeffer pour Unsplash)
TRANSFORMATION ALIMENTAIRE. L’exportation joue un rôle clé dans la croissance des transformateurs alimentaires. Or, la recherche d’autonomie alimentaire fait que la consommation locale gagne en importance. Bien qu’en apparence incompatibles, ces deux réalités peuvent toutefois très bien coexister, estiment divers acteurs de l’industrie.
Comme le marché québécois est limité, les entreprises du domaine de la transformation alimentaire n’ont pas d’autre choix que de se tourner vers l’exportation pour se développer. Martin Lavoie, PDG du Groupe Export agroalimentaire Québec-Canada, estime même que l’exportation est «extrêmement importante»pour la croissance des transformateurs.
«Dans la province, on exporte la moitié de ce qu’on produit, rappelle celui qui est à la tête de la plus grande association d’exportateurs de produits agroalimentaires du pays. Ce qui veut aussi dire que l’exportation nous permet de doubler notre volume de vente. Il est donc évident que c’est une occasion de croissance majeure.»Sans compter que l’exportation permet aux entreprises de développer leur expertise, d’innover en ramenant de nouvelles idées sur nos marchés et de diversifier le risque, poursuit-il. En effet, lorsque les occasions de vente se font plus rares dans la province, les entreprises peuvent compenser par l’exportation.
Ainsi, la valeur des exportations de produits alimentaires au Québec n’a cessé d’augmenter durant la dernière décen-nie, comme le prouve la croissance de 96 % observée entre 2010-2020 qui lui a permis d’atteindre 9,8 milliards de dollars (G $) en 2020, selon le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ).
Compatibles et complémentaires
Pour Martin Lavoie, il ne fait aucun doute que l’autonomie alimentaire peut être conjuguée avec l’exportation. «Ces deux réalités sont parfaitement compatibles, assure-t-il. L’autonomie alimentaire ne veut pas dire nécessairement qu’il faille garder plus de produits ici. Cela veut plutôt dire qu’il faut stimuler et renforcer les secteurs dans lesquels nous dépendons beaucoup des importations.»
Il mentionne par exemple les fruits et légumes, que l’on doit importer en grande quantité durant la saison froide. Selon le MAPAQ, les importations de fruits, de légumes et de leurs préparations s’élevaient à 1,6 G $dans la province en 2019, soit 21 % de toutes les importations alimentaires.
«Pourtant, il y aurait possibilité d’en faire pousser davantage au Québec, de faire plus de production en serre», croit le PDG du Groupe Export agroalimentaire. À son avis, l’expansion de ce secteur particulier pourrait non seulement aider la province à atteindre une plus grande autonomie alimentaire, mais aussi éventuellement mener à des exportations dans des marchés comme celui du Nord-Est des États-Unis. «Que les Québécois veuillent acheter des produits d’ici, c’est une excellente nouvelle, poursuit-il. On ne fera sans doute jamais pousser de bananes et d’oranges à grande échelle, mais il y a moyen de produire des aliments auparavant importés, et de continuer à exporter en même temps.»
Marchés saturés
Parfois, l’exportation constitue une réponse à un marché qui sature. C’est le cas dans le domaine fromager, entre autres.
Le PDG du Conseil des industriels laitiers du Québec, Charles Langlois, avance que son industrie permet depuis déjà longtemps à la province d’avoir une autonomie alimentaire notable dans le domaine laitier.
«Approvisionner le marché local, on fait déjà ça depuis une cinquantaine d’années», rappellet-il. Maintenant, ce que le secteur aimerait, c’est de développer les exportations pour certains produits à valeur ajoutée, comme les fromages.
«L’autonomie alimentaire est absolument une priorité pour nous, assure le directeur général de la Coop Agrilait, Jean Brodeur. Mais l’exportation, quand vous désirez prendre de l’expansion, c’est essentiel.»Il précise que si le marché québécois du fromage n’est pas encore saturé, «il s’en va dans cette direction», ce qui donne encore plus d’importance aux marchés extérieurs.
C’est d’ailleurs pour cette raison que la fromagerie St-Guillaume, qui appartient à la Coop Agrilait, s’est lancée dans l’exportation il y a environ deux ans. Pour l’instant, les ventes à l’étranger — qui sont acheminées principalement en Europe — représentent seulement entre 1 % et 2 % des ventes, mais la fromagerie aimerait augmenter cette proportion avec les années.
Actuellement, admet Jean Brodeur, ce qui ralentit l’exportation n’est pas tellement la recherche d’autonomie alimentaire, mais plutôt l’autre défi incontournable du moment, soit la pénurie de main-d’oeuvre. «Il manque de monde, alors ça freine le développement de nouveaux marchés, fait-il valoir. Il y a une certaine croissance organique des ventes à l’étranger, mais on ne peut pas explorer de nouvelles voies. On se concentre donc sur le marché du Québec, qui reste notre priorité.» Martin Lavoie PDG, Groupe Export agroalimentaire Québec-Canada «L’autonomie alimentaire ne veut pas dire nécessairement qu’il faille garder plus de produits ici.
Cela veut plutôt dire qu’il faut stimuler et renforcer les secteurs dans lesquels nous dépendons beaucoup des importations.» Reconnaissance. Danone Canada a été nommée au palmarès des 100 meilleurs employeurs du pays par Mediacorp Canada pour une troisième année consécutive. L’environnement de travail sécuritaire et stimulant, la volonté d’être inclusif et diversifié, ainsi que son modèle de gouvernance inédit figurent parmi les raisons de cette nomination.