L’agence Nicely, fondée par Salomé Drapeau et Louis Gerecht, est une jeune entreprise de Montréal qui se spécialise dans la création de sites web écoresponsables. (Photo: courtoisie)
TRANSFORMATION NUMÉRIQUE. Des entreprises intègrent désormais des préoccupations environnementales dans leurs projets de transformation numérique.
Facile à utiliser, dotée de nombreuses fonctionnalités, relativement peu coûteuse : l’éditeur de sites web Wix possède de nombreux atouts, ce qui en fait un des plus populaires sur le marché – 250 millions d’utilisateurs dans le monde, selon la société israélienne. Cela dit, l’empreinte carbone des sites web créés grâce à cet outil peut laisser à désirer, pense Valérie Vedrines, fondatrice et présidente de Groupe Écomarque, une agence montréalaise de marketing durable.
« Les plateformes du genre ne permettent pas forcément de choisir où ni comment est hébergé un site, indique celle qui a aussi fondé Masse Critique, un organisme à but non lucratif qui travaille à réduire l’empreinte sociale et environnementale de l’industrie de la communication et du marketing au Québec. Difficile donc de faire de l’éco-socio-conception. » C’est pourquoi Groupe Écomarque réalise cet automne une mue vers un nouveau site vitrine, l’ancien conçu à ses débuts en 2022 étant justement signé Wix.
Cette transformation est réalisée par l’agence Nicely, une jeune entreprise de Montréal qui se spécialise dans la création de sites web écoresponsables. D’ici quelques mois, le nouveau site web de Groupe Écomarque sera donc hébergé sur des serveurs alimentés par de l’énergie renouvelable, comme ceux de Web Hosting Canada, situés dans la métropole. Qui plus est, son design léger et l’utilisation d’un code optimisé garantiront une meilleure expérience utilisateur et amélioreront son référencement naturel.
« À titre d’agence de marketing durable, il vaut mieux appliquer ce que l’on prône. Nous avons une responsabilité morale d’être un acteur positif de changement », affirme Valérie Vedrines. Cette recherche de cohérence sert en outre les objectifs d’affaires de l’entreprise. « Notre clientèle intègre de plus en plus les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance dans ses stratégies d’approvisionnement. Nous devons démontrer que nous sommes des fournisseurs crédibles, donc conscients de ces réalités. »
Empreinte carbone considérable
L’agence Nicely est née en 2023 à la suite de la rencontre des cofondateurs, Salomé Drapeau, directrice artistique, et Louis Gerecht, directeur du numérique. Les vingtenaires constatent alors que le Québec accuse du retard en matière de numérique responsable, notamment par rapport à la France, où il existe depuis 2021 une loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique. « Nous nous sommes dit qu’il y aurait une opportunité à saisir, tôt ou tard », raconte Salomé Drapeau.
Les chiffres leur donnent raison. Un rapport diffusé en 2020 par Les Shifters Montréal, une association à but non lucratif qui a pour mission d’informer la population sur les enjeux énergétiques et climatiques, a par exemple estimé que les usages numériques sont responsables de 5 % des émissions annuels de gaz à effet de serre du Québec. Cela ne tient toutefois pas compte de l’empreinte carbone considérable de l’intelligence artificielle générative, une technologie dont la popularité a explosé en 2022.
« Même si l’énergie produite au Québec est considérée comme propre et renouvelable, on ne peut pas faire l’économie de cette réflexion, souligne Louis Gerecht. Dans les faits, plusieurs de nos usages du numérique reposent sur des centres de données situés à l’extérieur de la province, où les mix énergétiques sont moins optimaux. » Dans son plus récent avis, la Commission de l’éthique en science et en technologie presse d’ailleurs le gouvernement du Québec de tracer la voie en faisant preuve d’exemplarité en la matière.
Quoi qu’il en soit, Groupe Écomarque n’a pas attendu que le contexte réglementaire se resserre pour faire preuve de sobriété numérique. « Pour être honnête, je ne m’attends pas à ce que tous nos clients remarquent l’empreinte carbone moindre de notre nouveau site web, avoue Valérie Vedrines. Mais, dans la mesure où ce dernier ne nous coûte pas plus cher à mettre en ligne et livre la marchandise, je vois difficilement pourquoi il faudrait nous croiser les bras. »