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Le «vrai» coût des garderies non subventionnées, sans oeillères

Le courrier des lecteurs|Publié le 09 février 2024

Le «vrai» coût des garderies non subventionnées, sans oeillères

Cette chronique et ses affirmations posent plusieurs problèmes. (Photo: 123RF)

Un texte d’Oriane Couchoux, Ph.D., CPA, Professeure de comptabilité, Université Carleton et Présidente du conseil d’administration de Ma place au travail

Le 7 février dernier, on «apprenait» dans une chronique qu’une place en garderie privée non subventionnée serait à peine plus chère pour les familles du Québec qu’une place subventionnée en Centre de la petite enfance (CPE) ou en garderie privée. Calculs, scénarios et graphiques à l’appui, on nous disait que l’écart est «de l’ordre de 5,00 $ par jour, donc environ 1 000 $ par année». Cette chronique et ses affirmations posent plusieurs problèmes.

Premièrement, minimiser l’importance de cet écart est, au mieux, ignorant et, au pire, condescendant. Au Québec, les besoins en aide alimentaire ont explosé ces derniers mois et l’inflation galopante met une pression immense sur les finances des familles. Dans ce contexte, ce 1 000 $ est loin d’être anodin. En 2024, selon le Rapport sur les prix alimentaires au Canada, une famille de quatre personnes devra débourser 701,79 $ de plus qu’en 2023 pour se nourrir. Ce 1 000 $ de frais de garde supplémentaire forcera peut-être de nouvelles familles à pousser les portes des banques alimentaires en 2024.

Deuxièmement, si les calculs présentés dans cette chronique sont exacts d’un point de vue fiscal, les variables avec lesquelles ils ont été effectués sont malheureusement erronées. La chronique met l’emphase sur l’écart minime obtenu pour des places en garderie non subventionnée à 40,00 $ et 50,00 $ par jour. La naïveté derrière ces données aura le mérite de faire sourire (ou grincer des dents) les parents des 65 458 enfants ayant des places en garderies non subventionnées au 31 décembre 2023 au Québec: les places à 40,00 $ font figure de licornes dans le réseau et les places à 50,00 $ sont malheureusement de plus en plus rares. De plus, les parents payent pour 262 jours de garde, peu importe le nombre de jours de présence de leur enfant.

Il aurait été bien plus représentatif de mettre l’emphase sur l’écart annuel pour une place à 60 $: près de 4 000 $ de PLUS par an, pour UN enfant*. Pour une famille ayant deux enfants de moins de cinq ans, on parle d’un écart de 8 000 $ par année. 8 000 $, ça en fait des épiceries, des factures d’électricité et des habits de neige. Et si ces deux enfants vont à la garderie pendant quatre ans chacun, on parle de 32 000 $ supplémentaires dépensés en frais de garde.

En plus de consulter le simulateur du gouvernement comme le suggère la chronique, j’encouragerais donc les sceptiques à appeler les garderies privées non subventionnées autour de chez eux pour s’informer du coût quotidien pour une place poupon et une place 18 mois et plus, ils risquent d’être surpris. Peut-être seront-ils même tentés, comme le Protecteur du citoyen en 2023, de dénoncer le «fardeau financier plus élevé [imposé aux] parents contraints de choisir une place en milieu non subventionné» (Protecteur du citoyen, 2023).

 

* En reprenant la même hypothèse de revenu familial que dans la chronique.


 

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