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Est-il bon d’accepter une augmentation de sa limite de crédit?

Morningstar|Mis à jour le 19 septembre 2024

Est-il bon d’accepter une augmentation de sa limite de crédit?

(Photo: 123RF)

Après avoir maintenu les taux d’intérêt à un niveau élevé pendant des années, la Banque du Canada a commencé à assouplir sa politique monétaire, avec deux baisses de taux cette année et d’autres à venir. Entre autres conséquences, la baisse des taux d’intérêt encourage les dépenses de consommation – et les emprunts. Cela inclut les cartes de crédit. Ainsi, les consommateurs peuvent se retrouver plus endettés, car ils sont plus enclins à emprunter et à dépenser qu’à épargner.

Même si les baisses de taux d’intérêt n’ont pas d’incidence directe sur les titulaires de cartes, la perspective d’une diminution des coûts d’emprunt conduit souvent à un sentiment de prudence moindre à l’égard des obligations d’endettement. Des données récentes d’Equifax Canada montrent que la dette des cartes de crédit au Canada a atteint le chiffre effarant de 122 milliards de dollars (G$), soit une augmentation de près de 14% par rapport à l’année précédente, atteignant ainsi un nouveau record historique.

Pour comprendre l’impact de la baisse des taux d’intérêt sur les finances des titulaires de cartes, faisons un rapide calcul sur la base d’une réduction de 0,75% des taux d’intérêt des cartes de crédit. Avec un solde de 5000$ et un TAP habituel de 20%, les intérêts annuels s’élèveraient à 1000$. Une réduction de 0,75% ramènerait le TAP à 19,25%, ce qui réduirait les intérêts annuels à 962,50$, soit une économie de 37,50$.

Bien que ce chiffre puisse sembler faible, il peut entraîner des économies – ou des coûts – importants au fil du temps, en particulier pour les personnes dont les soldes reportés sont élevés. Comme les intérêts des cartes de crédit sont composés, les coûts peuvent augmenter considérablement si les soldes ne sont pas remboursés rapidement.

Une limite de crédit plus élevée influence le comportement d’un titulaire de carte en matière de dépenses, en particulier dans un contexte de faibles taux d’intérêt, selon l’expert en finances personnelles et syndic d’insolvabilité Doug Hoyes de Hoyes, Michalos & Associates. «Si vous n’avez pas d’argent, vous ne pouvez pas le dépenser», explique-t-il. «Si vous avez accès à de l’argent, il est plus probable que vous le dépensiez.»

Une limite de crédit élevée crée une illusion

Si l’offre d’une limite de crédit plus élevée témoigne de la solvabilité du titulaire de la carte, Doug Hoyes précise qu’elle ne doit pas être considérée comme une médaille. «Vous ne recevez pas un prix», précise-t-il. «La banque veut gagner de l’argent et c’est pour cela qu’elle fait cette offre.»

Une augmentation de la limite de crédit crée l’illusion d’un pouvoir d’achat plus important. «Si vous payez toujours l’intégralité de votre carte de crédit chaque mois, la banque ne gagne pas d’argent sur les intérêts. En augmentant votre limite de crédit, elle peut donc vous encourager à conserver un solde, ce qui accroît ses bénéfices», explique-t-il.

Une fois que le client a démontré qu’il respectait les délais de paiement, la banque n’a rien à débourser pour augmenter sa limite de crédit. «La banque peut alors potentiellement percevoir plus d’intérêts», explique Doug Hoyes, qui ajoute que «la banque est gagnante, à condition que l’emprunteur continue à effectuer ses paiements».

Selon Doug Hoyes, il existe une autre raison pour laquelle les banques font de telles offres. Elles veulent gagner de l’argent sur la différence, ou l’écart, entre ce qu’elles paient aux déposants pour leur épargne et ce qu’elles facturent aux emprunteurs sous forme d’intérêts sur les prêts.

Étant donné que les taux d’intérêt sont encore plus élevés qu’ils ne l’étaient au plus fort de la crise de la COVID-19, les gens sont plus susceptibles de garder leur argent à la banque, ce qui donne aux banques plus de fonds à prêter. «Donc, si vous recevez une offre du prêteur, c’est probablement une combinaison de votre solvabilité et du fait que les banques ont de l’argent qu’elles veulent prêter et gagner de l’argent sur l’écart de taux», explique Doug Hoyes.

Faut-il mordre à l’hameçon?

Avec des taux d’intérêt à deux chiffres, les dettes liées aux cartes de crédit sont les plus coûteuses de tous les emprunts. Si le prêteur augmente votre limite, il y a de fortes chances que vous dépensiez plus avec votre carte et que vous payiez donc plus d’intérêts.

L’aggravation du niveau d’endettement des consommateurs canadiens le confirme. Selon un rapport d’Equifax Canada, l’endettement total des consommateurs canadiens a dépassé les 2500 milliards de dollars au dernier trimestre, soit une hausse de 4,2% par rapport à l’année précédente.

Les emprunts par carte de crédit ont largement contribué à cette augmentation, les soldes impayés atteignant 122 milliards de dollars. En moyenne, les détenteurs de cartes de crédit au Canada ont maintenant une dette de plus de 4300$, un niveau jamais atteint depuis 2007. Pire encore, les Canadiens mettent plus de temps que jamais à rembourser ces dettes.

Doug Hoyes fait remarquer que si un emprunteur n’est pas suffisamment discipliné pour payer intégralement chaque mois, le crédit supplémentaire pourrait l’inciter à dépenser et à payer des intérêts excessifs, ce qui nuirait à sa situation financière. «Le risque d’accepter une offre est d’emprunter plus d’argent et de devoir payer des intérêts plus élevés chaque mois», ajoute-t-il.

Il peut être judicieux d’accepter l’offre si vous avez vraiment besoin de l’argent à court terme et que vous pouvez vous permettre de le rembourser. «Souvent, la bonne réponse est: merci, mais non merci», déclare Doug Hoyes.

Une carte de crédit n’est pas de l’argent gratuit. En fin de compte, la décision d’accepter ou de refuser un crédit supplémentaire dépend de votre capacité financière et de votre discipline à gérer l’utilisation de votre carte et à payer l’intégralité du solde chaque mois. N’empruntez que si vous le faites pour un besoin spécifique et que vous pouvez rembourser à temps. «Si vous savez que vous recevrez un remboursement d’impôt important dans trois mois, il peut être acceptable d’emprunter maintenant, car vous savez que vous aurez les fonds nécessaires pour rembourser le prêt», explique Doug Hoyes.

Une limite de crédit plus élevée nuit à votre score

Un autre inconvénient de l’acceptation d’une augmentation de la limite de crédit est l’impact potentiel sur votre cote de crédit, ce qui pourrait nuire à votre capacité à obtenir d’autres types de prêts.

«Si vous prévoyez d’emprunter à d’autres fins, réfléchissez à l’impact qu’aura l’acceptation d’une augmentation de la limite de votre carte de crédit sur votre capacité future à emprunter », explique M. Hoyes. Par exemple, si vous acceptez d’augmenter votre limite de crédit et que vous demandez ensuite un prêt automobile ou un prêt hypothécaire, votre demande pourrait être refusée en raison d’un endettement total excessif.

Même s’il est sous-utilisé, le fait d’avoir un crédit disponible élevé peut avoir un impact négatif sur la cote de crédit d’une personne. Les prêteurs peuvent y voir un risque, étant donné que l’emprunteur peut potentiellement utiliser tout ce crédit à tout moment.

Planifier l’imprévisible

La plupart d’entre nous n’ont ni le temps ni la patience de lire attentivement chaque clause et condition enfouies dans les petits caractères des conditions de prêt. Il est donc prudent pour les emprunteurs d’évaluer la possibilité de changements soudains et inattendus de ces conditions.

Une carte de crédit est essentiellement un prêt à vue. Si vous n’effectuez pas vos paiements, si vous êtes en retard sur d’autres dettes ou si votre cote de crédit diminue, l’émetteur de la carte peut exiger que vous remboursiez immédiatement l’intégralité de votre solde.

Des événements financiers extrêmes et des défaillances systémiques peuvent également entraîner des changements radicaux dans les contrats d’emprunt. Parmi ces changements, on peut citer le fait que les banques réduisent soudainement les limites des cartes de crédit, augmentent les taux d’intérêt ou exigent des consommateurs qu’ils remboursent intégralement les soldes impayés de leurs cartes de crédit.

«Les cartes de crédit et les lignes de crédit sont des prêts « ouverts », ce qui signifie que la banque peut les réduire ou les annuler à tout moment», avertit Doug Hoyes. «Si le prêteur estime que vous présentez un risque plus élevé ou s’il s’inquiète de la situation économique, il peut réduire votre ligne de crédit. Ne considérez jamais votre carte de crédit comme un fonds d’urgence. Ce n’est pas le cas. Elle peut disparaître à tout moment, il ne faut donc pas compter dessus», ajoute-t-il.

D’après un texte de Vikram Bharat, de Morningstar