Les paiements se multiplient à la rentrée, ce qui exacerbe les pressions sur les finances des gens. (Photo: 123RF)
IL ÉTAIT UNE FOIS… VOS FINANCES. En cette période de rentrée scolaire, une vague de paiements déferle sur les consommateurs. Frais de scolarité, cahiers, livres et fournitures scolaires, service de garde, vêtements, retour d’achat de titres de transport en commun… en plus de devoir payer les vacances estivales. L’automne financier revient en force pour soutirer les dollars des portefeuilles des gens après un été souvent plus tranquille. Et si vous devez renouveler votre prêt hypothécaire en plus, la pression est au maximum. Attention: l’asphyxie financière vous guette peut-être!
L’asphyxie financière, c’est cette impression d’étouffer sous le poids de ses dettes, explique Sophie Desautels, Première directrice principale et syndic autorisée en insolvabilité, Raymond Chabot, filiale de Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT).
« Ce qui est accablant, c’est surtout lorsqu’on nage dans les dettes, souligne-t-elle. Je le vois toutes les semaines dans nos bureaux, des gens qui étirent l’élastique. Ça crée vraiment un gros stress financier, particulièrement en septembre. »
Ces gens au budget individuel ou familial est serré jonglent tous les mois pour joindre les deux bouts, mais quand septembre arrivent, une couche supplémentaire s’ajoute.
Sans oublier que près de 50% des propriétaires devront renouveler leur prêt hypothécaire au cours des deux prochaines années, rappelle Sophie Desautels.
« Si en plus on se sépare, on est malade ou on subit une perte d’emploi temporaire, c’est souvent la goutte qui fait déborder le vase, tranche-t-elle. Les gens vivent beaucoup de pression et ont l’impression d’étouffer sous le poids de leurs dettes. Ils se sentent complètement submergés, au point de me dire qu’ils ont de la difficulté à respirer. C’est presque physique. »
Au bout des liquidités
Si la pandémie a permis un certain répit pour plusieurs Québécois, le coussin qu’ils s’étaient fabriqué semble avoir fondu.
Le taux d’épargne des ménages québécois a progressivement fondu depuis 2020, passant de 18,5% lors de cette première année de pandémie à 14,7% en 2021 et à 12,6% en 2022, selon les données de statistiques Canada.
La hausse des taux d’intérêt et de l’inflation font de plus en plus mal au fil du temps.
« Pour plusieurs personnes, les liquidités sont épuisées, raconte Sophie Desautels. L’endettement refait surface, les comptes de cartes de crédit montent. On voit de plus en plus de gens qui doivent remettre leur voiture, et la firme JLR indique que les délaissements de maison ont bondit de 27% pour les six premiers mois de 2024 par rapport à la même période l’an dernier. »
Faire face à ses dettes
La spécialiste en insolvabilité n’y va pas par quatre chemins. Pour combattre l’asphyxie financière, il faut faire face à ses dettes le plus rapidement possible.
Faire face à ses dettes ne veut par contre pas dire les régler avec des solutions qui peuvent sembler faciles on magiques.
« Il faut éviter ce genre de solutions comme les prêts alternatifs, laisse tomber Sophie Desautels. Par exemple, ceux qui offrent zéro intérêt le premier mois mais qui demandent 30% par la suite. Il faut être vigilant. »
Boule de neige ou avalanche?
Si vos dettes vous semblent avoir augmenté quelque peu, que vous sentez l’étau se resserrer ou que le choc du renouvellement hypothécaire vous fait bondir, contactez votre planificateur financier immédiatement, affirme Sophie Desautels. Celui-ci pourra vous donner un bon coup de pouce au chapitre de votre budget et à l’analyse de vos postes de dépenses.
Il y a des stratégies de remboursement de dettes qu’on peut mettre de l’avant par soi-même », remarque-t-elle.
Selon le confort de chacun et l’effort qu’on est capable de fournir, elle suggère deux techniques.
La première, celle de la « boule de neige », est de démarrer en remboursant une plus petite dette, pour ceux qui ne se sentent pas capables de donner un grand coup dès le départ. Cela procure un sentiment d’accomplissement qui a tendance à pousser les gens à poursuivre leurs efforts.
La seconde est celle de l’avalanche. On frappe fort en s’attaquant à la dette avec le plus haut taux d’intérêt ou le paiement d’intérêt mensuel le plus élevé pour en payer le moins possible.
Si le problème est plus sérieux, elle rappelle qu’il existe le dépôt volontaire au palais de justice.
« Il y a beaucoup de conditions, mentionne-t-elle. C’est très réglementé. Les gens peuvent téléphoner à leur palais de justice, demander pour le dépôt volontaire si on a plusieurs petites dettes. Sinon, il y a aussi la consolidation bancaire, qui est lorsqu’on va voir son institution financière et qu’on demande un prêt qui va venir englober toutes nos dettes. »
Oui oui, un syndic
Si vos dettes sont insoutenables, elle suggère fortement de consulter un syndic en insolvabilité.
Elle convient que ce type d’intervenant fait peur aux gens parce qu’on pense immédiatement à la faillite. « Mais il existe d’autres alternatives que la faillite lorsqu’on va rencontrer un syndic », observe-t-elle.
Parmi celles-ci, elle souligne la proposition de consommateur. La personne fait donc ainsi une offre à ses créanciers pour une durée maximale de cinq ans en fonction de sa capacité de payer. Cette proposition a l’avantage de permettre de conserver ses biens et de tout canaliser dans un seul paiement mensuel.
Le processus est réglementé et administré par un syndic autorisé en insolvabilité et protège le consommateur de saisies ou recouvrements.
Pour ce qui est de la faillite, Sophie Desautels juge qu’il ne s’agit pas là d’une mort financière, mais bien d’un renouveau.
« Pour certains, ce sera la bonne solution pour leur permettre de redémarrer », croit-elle.