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Le 1er juillet de plus en plus tranquille

Charles Poulin|11 juillet 2024

Le 1er juillet de plus en plus tranquille

Le loyer moyen a grimpé de 24% pour les gens qui ont dû déménager en 2024. (Photo: Robert Macleod pour Unsplash)

IL ÉTAIT UNE FOIS… VOS FINANCES, la rubrique où ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’argent… ou presque!

Le 1er juillet vous semble moins occupé depuis quelques années? Ce n’est pas qu’une impression. Il devient de plus en plus périlleux de déménager en raison du coût du logement qui a explosé ces dernières années.

Le nombre de Québécois qui déménagent d’année en année ne cesse de diminuer, soulignait l’économiste du marché immobilier pour la Société d’hypothèques et logement (SCHL), Francis Cortellino, dans une récente publication LinkedIn.

Entre 2002 et 2023, ce sont environ 300 000 personnes de moins qui ont changé d’adresse. Elles sont passées de 944 600 à seulement 658 300, selon les données colligées par l’Institut de la statistique du Québec par l’entremise du fichier des personnes assurées à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).

C’est donc seulement 7,8% de la population totale du Québec qui a changé d’adresse l’an dernier, comparativement à 12,9% en 2022.

«Difficile de ne pas penser à la situation difficile sur le marché de l’habitation comme étant l’une des causes importantes expliquant ces chiffres», mentionne-t-il dans sa publication.

Explosion des loyers au déménagement

Ceux qui osent déménager sont confrontés à une dure réalité. Leur nouveau logement sera accompagné d’une hausse fulgurante du loyer mensuel.

Vivre en ville vient de rendre public un sondage mené par la firme Léger Marketing dans laquelle on apprend que le loyer augmente, en moyenne, de 24% (ou 259,30$ de plus par mois) pour les personnes qui ont déménagé en 2024 à Montréal.

«Pour à peu près tout le monde au Québec, déménager, ça veut dire reculer sur la qualité des services qu’on reçoit pour le prix qu’on paye, tranche le directeur habitation pour Vivre en Ville, Adam Mongrain. Alors les gens repoussent le plus possible leur déménagement, parce que c’est à ce moment que leur situation va dégénérer.»

Et pourtant, tous n’ont pas le luxe de décider du moment précis où ils quitteront leur logement. Arrivée d’un nouvel enfant, rupture, nouvelle opportunité professionnelle, les raisons sont nombreuses pour devoir partir plus rapidement que prévu et se heurter à une échelle de loyers de plus en plus coûteuse.

L’étude de Léger révèle que le loyer moyen, pour les répondants qui ont déménagé en 2024, est passé de 1081,90$ à 1332,80$ à Montréal. Tous ne sont toutefois pas touchés de la même manière.

La proportion de répondants qui ont un loyer mensuel sous la barre de 500$ est passée de 9% à 3%, et celle dans la fourchette entre 500$ et 749$ est passée de 24% à 18%. Conséquence: les gens qui payent 750$ ou plus par mois représentent désormais de 78% du total, avec 50% qui doivent composer avec un loyer de 1250$ et plus.

Propriétaires occupants

Cette inabordabilité a également des répercussions du côté des propriétaires occupants détachées, mentionne Adam Mongrain.

«Le marché est sclérosé dans la majorité des régions du Québec, laisse-t-il tomber. Des personnes ont d’immenses maisons alors que les enfants sont partis, mais ils restent dedans parce que ce n’est pas intéressant de vendre leur propriété de 3000 pieds carrés pour aller dans un condo de 800 pieds carrés, si adéquat soit-il, si ça leur coûte plus cher mensuellement.»

Il voit là un signal que le marché immobilier au Québec est extrêmement malade. Il souligne la progression de répondants qui déclarent avoir eu des épisodes d’itinérance, dont le nombre est passé à 15%.

Solutions

Il n’y a aucune raison de penser, selon lui, que les tendances actuelles se renverseront par elles-mêmes.

Quelles sont alors les solutions?

Du côté de l’Institut économique de Montréal, qui a dévoilé son étude intitulée «Comment la réglementation a rendu Montréal inabordable», l’auteur de l’étude Vincent Geloso estime que «la crise de l’abordabilité du logement à Montréal n’est pas due à une défaillance du marché, mais à la réglementation excessive qui freine l’offre et augmente les coûts, pénalisant les ménages moins nantis et ceux qui aimeraient accéder à la propriété».

«Au lieu d’accuser les acteurs du marché de ne pas livrer la marchandise, la mairesse Valérie Plante devrait arrêter de leur mettre des bâtons dans les roues, afin de libérer l’offre de logements», soumet-il.

Vivre en Ville propose une autre piste de solution. Son directeur habitation croit qu’il faut offrir du financement distinct réservé à la construction neuve qui ne viendraient pas contribuer à la surenchère dans le marché existant.

«C’est ce qu’on devrait favoriser, plaide-t-il. Nous avons quelque chose du genre avec le programme APH Sélect de la SCHL, mais ce programme n’est pas en mesure de viabiliser tous les projets dont nous avons dans le marché.»