D’un côté, l’inflation montre des signes d’apaisement qui sont assez encourageants pour que la BdC ait décidé de conserver le taux directeur à 4,5%. Mais... (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Je ne compte plus le nombre de personnes qui me réclament des prédictions sur l’avenir des taux d’intérêt pour les mois et les années à venir.
Vous aussi voulez mon avis? Vous allez être déçus.
Je peux par contre déjà prévoir comment la majorité d’entre vous va réagir dans les prochaines semaines si vous devez renouveler votre prêt ou en contracter un nouveau. Soit en cherchant un peu de stabilité dans tout ce bordel.
Le chaos et l’imprévisibilité
Les dernières années ont été, tant sur le plan économique que social, un laboratoire en temps réel où nous avons dû composer avec quantité de nouveautés. Pour ne pas dire de chaos.
La confusion qui transpire de cette époque se traduit par une quantité de messages contradictoires. En février, le gouverneur de la Banque du Canada (BdC) y faisait écho par ses réponses évasives sur l’avenir du taux directeur. Montera, montera pas? Probablement pas (on a effectivement opté pour la stabilité), mais ça pourrait changer (les prochains mois nous le diront, surtout avec le chaos supplémentaire qu’apporte aux États-Unis la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) et une inflation toujours galopante là-bas).
Les prédicateurs économiques ne sont pas en reste.
Un jour, un expert vient à la télé nous annoncer l’apocalypse et le lendemain, un autre avance que les choses vont dans le bon sens et qu’on évitera peut-être la crise. Ou pas. Mais ça dépend…
Je sais, c’est mêlant. Comme le sont nouvelles qui alternent entre bonnes et mauvaises pour l’avenir des taux et pour les propriétaires qui devront renouveler leurs hypothèques dans les prochains mois.
L’inflation ralentit… ou pas?
D’un côté, l’inflation montre des signes d’apaisement qui sont assez encourageants pour que la BdC ait décidé de conserver le taux directeur à 4,5%.
Mais…
Cette baisse de l’inflation est plus lente et pénible que le déroulement du récit d’un film d’auteur suédois en noir et blanc. Tiff Macklem, le gouverneur de la BdC martèle donc sur toutes les tribunes qu’il faudra des mois, peut-être jusqu’à deux années, pour que les politiques monétaires de la BdC obtiennent l’effet escompté.
L’emploi fonce et l’immobilier ralentit
Le marché de l’emploi est en pleine ébullition, ce qui tire les salaires vers le haut. De quoi alimenter le statu quo inflationniste (et des taux élevés).
Sauf que…
En dehors des milieux plus effervescents comme Vancouver, Toronto et Montréal, le marché de l’immobilier connaît une baisse de frénésie marquée. Donc si les hypothèques sont plus coûteuses, le prix d’achat des résidences, dopé par la surenchère, lui, s’apaise.
Un marché de l’emprunt en quête de sécurité
Il va peut-être falloir que le choc de la hausse de taux se fasse un peu mieux sentir afin que le coût d’emprunt hypothécaire finisse par retomber. Il faudra peut-être même une véritable récession afin de corriger la situation.
Il est aussi très plausible de croire que les taux ne reviendront peut-être jamais à ce qu’ils ont déjà été.
En attendant, les emprunteurs ont commencé à réagir en cherchant la sécurité où ils peuvent la trouver. C’est du moins ce que nous indiquent les plus récentes données.
Ainsi, tandis que la BdC opérait ses premières hausses, le marché penchait en faveur de prêts à courte échéance et à taux variables. D’abord parce qu’on imaginait que les taux redescendraient dès 2023, mais aussi parce que les pénalités liées à la terminaison hâtive de ces ententes sont nettement moins importantes pour ces prêts.
En février 2022, avant les tout premiers hoquets du taux directeur, 77% des emprunteurs canadiens optaient pour un taux variable. Ce chiffre est passé à 60% en septembre, après avoir connu déjà 2,25% de hausse.
Un an plus tard, le balancier s’est mis à revenir à toute vapeur: en février 2023, 89% des emprunteurs canadiens ont choisi un taux fixe et 95% de ceux-ci se sont tournés vers un prêt de cinq ans fermé.
Tant de chaos a par contre ébranlé la croyance voulant que les taux redescendent de sitôt. Comme les prêts de cinq ans fermés sont ceux qui ont les plus bas taux et que l’économie menace de faire des cabrioles, les consommateurs cherchent la seule certitude qu’ils peuvent obtenir en ce moment: un paiement d’hypothèque stable à l’issue certaine.
Quand l’avenir devient trop flou, je comprends facilement que l’on cherche un minimum de clarté comme vous le faites en ce moment. Même si cela peut s’avérer plus coûteux au final.
Voilà pour la seule prédiction que je m’avance à faire: les risques que l’économie continue de s’agiter sont passablement élevés, si bien que celles et ceux qui préfèrent le risque à la stabilité dans leurs prêts hypothécaires auront probablement droit à un sacré beau tour de montagnes russes.
Mais peut-être pas non plus…
Bon, ça y’est, je suis en train de devenir aussi vague que le gouverneur de la Banque du Canada dans mes prévisions.
À noter : ce qui précède sont mes opinions et expériences personnelles et non la position de nesto Expert hypothécaire. Je ne suis pas un courtier hypothécaire ou immobilier agréé.