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Malik Yacoubi

L'immobilier simplifié

Malik Yacoubi

Expert(e) invité(e)

Le bon moment pour acheter?

Malik Yacoubi|Publié le 10 mai 2023

Le bon moment pour acheter?

La baisse de prix des propriétés ne durera pas. Parce que la pénurie de logements locatifs tire le marché de l’immobilier vers le haut. (Photo: 123RF)

EXPERT INVITÉ. Comme entrepreneur, père de famille et propriétaire, je sais trop bien que, peu importe la nature du projet de vie dans lequel on se lance, le moment idéal pour le faire n’existe pas.

Il y a toujours quelque chose qui constitue un frein, qui nous fait peur, qui souligne à gros trait le risque qui se cache derrière le grand saut qu’on s’apprête à exécuter. Peu importe lequel. 

Donc, si vous guettez toujours ce fameux moment idéal pour prendre une décision importante, il y a de bonnes chances que vous ne fassiez pas grand-chose. À part attendre.

Cela vaut pour l’achat d’une résidence, qui comprend toujours sa part de risque, peu importe la situation économique. Mais un risque calculé, si on fait bien les choses.

Si bien que la première pensée qui m’est venue en consultant les plus récents chiffres concernant la pente descendante du prix médian des habitations à Montréal, malgré les taux d’intérêt actuels qui peuvent faire peur et freiner notre élan, ce moment est peut-être aussi bon qu’un autre pour acheter.

 

L’offre et la demande du logement

Permettez que je remonte le fil de mes pensées pour vous expliquer comment j’en viens à cette conclusion.

D’abord, il existe bel et bien une pénurie de logements au Québec et ailleurs au Canada. Elle se manifeste plus cruellement chez les personnes à faible revenu, en quête d’un appartement abordable, mais elle a des répercussions sur l’ensemble des marchés résidentiels.

À Montréal, par exemple, le loyer mensuel pour un appartement avec une seule chambre à coucher a augmenté de 7,5% entre avril 2022 et avril 2023. Le prix médian pour tout type d’appartements est désormais de 1876$ par mois. C’est. Beaucoup. D’argent.

Pendant ce temps, l’immobilier dans la métropole affiche une baisse marquée. Le prix médian d’une maison unifamiliale est 5% moins élevé que l’an dernier à pareille date. Même chose pour le prix des condos. Les plex affichent une baisse de 8%.

Mais ça ne durera pas. Parce que cette pénurie de logements locatifs tire le marché de l’immobilier vers le haut.

Forcément, à ce prix, les locataires ont plus envie d’investir dans leur logis que d’y engloutir leur paye. (Surtout quand les rendements de leurs produits financiers sont passablement décevants, comme c’est présentement le cas). Cela crée une demande que l’actuel parc de résidences ne peut soutenir. C’est une situation nationale, mais clairement plus criante dans certaines localités.

Donc, non, les taux ne sont pas très favorables en ce moment. Mais le marché connaît une accalmie qui rend les prix un peu plus abordables… en attendant que la pénurie ne les repousse à la hausse. Surtout lorsque les taux redescendront. Le ralentissement économique qu’on observe en ce moment et le surplace de la Banque du Canada concernant le taux directeur indiquent que ça s’en vient. Lentement, mais assez sûrement.

Et puis bon, puisqu’il faut bien se loger et que les prix des loyers sont prohibitifs, je suis plutôt du genre à dire: choisissez un produit hypothécaire qui convient à votre tolérance au risque, évaluez les coûts à long terme, et vous verrez que ce n’est sans doute pas une mauvaise décision.

 

En attendant la prochaine fièvre

Acheter est encore un peu trop cher à votre goût? Peut-être, mais ça pourrait être pire. Les taux ne sont pas très commodes? J’en conviens.

Pour le plaisir, je suis allé revoir les chiffres concernant la dernière fois où ceux-ci ont été dans le même registre qu’aujourd’hui, soit en 2008. Ils se situaient alors à un peu plus de 5% (en juillet). Le prix moyen d’une résidence au Canada était de 343 700$ et de 227 000$ au Québec. Les prix mensuels d’une hypothèque étaient respectivement de 1736$ et 1148$.

Si on compare avec aujourd’hui, la moyenne du prix d’une résidence au Canada est de 662 437$. Au Québec: 458 676$.

Dans les deux cas, le coût d’une propriété a plus ou moins doublé en 15 ans. En comparaison, l’inflation pour l’ensemble des biens et services entre 2008 et 2023, elle, se situe à 37,92% (selon l’outil de calcul de la Banque du Canada).

Donc, même en ajoutant le coût annuel des taxes et de l’entretien, il n’y a pas grand monde qui doit regretter d’avoir acheté en 2008 -malgré que les premières années leur ont coûté cher en intérêts- puisque la valeur au marché de leur résidence a subi une hausse plus de trois fois supérieure à celle de l’inflation.

Un placement dans lequel ils ont pu vivre, inviter leurs amis, voir leurs enfants grandir, vieillir, s’aimer. De quel autre placement, peut-être plus rentable, peut-on jouir de la sorte?

Oui, les taux ont ensuite chuté de manière significative. Non, on ne peut pas compter sur un scénario analogue. Du moins, rien ne l’indique pour l’instant. Mais dans un contexte où les pouvoirs publics paraissent avoir de la difficulté à trouver une solution pour faire débloquer l’impasse concernant la pénurie des logements, avec une hausse marquée des salaires dopés par la pénurie de main-d’œuvre, il y a fort à parier que le coût des loyers et des propriétés va continuer de grimper.

Et dès que les taux vont redescendre, on pourrait bien assister à une nouvelle fièvre immobilière. Donc ici, la crainte de subir des taux élevés devrait bien plus effrayer les personnes qui ont acheté en pleine fureur des marchés, à très bas taux, à très haut prix.

À l’inverse, le redoux actuel dans les prix des résidences et des taux élevés dès le départ peuvent constituer une bonne manière de prendre un risque calculé, motivé par l’historique des marchés et une situation immobilière en faveur d’un achat, plus tôt que tard.

 

À noter : ce qui précède sont mes opinions et expériences personnelles et non la position de nesto Expert hypothécaire. Je ne suis pas un courtier hypothécaire ou immobilier agréé.