Prolonger son hypothèque pour limiter la hausse des paiements
La Presse Canadienne|Publié le 21 juin 2022La période d’amortissement est la période pendant laquelle on rembourse le prêt. (Photo: La Presse Canadienne)
Ottawa — Les propriétaires canadiens pourraient être sous le choc lorsqu’il sera temps de renouveler leur prêt hypothécaire, car la hausse des taux d’intérêt entraînera probablement aussi des augmentations de mensualités.
Ces hausses de paiements sont particulièrement malvenues puisque l’augmentation des prix de l’essence, des produits d’épicerie et d’autres produits de base grignote déjà le budget des ménages.
Des experts estiment que prolonger la période d’amortissement d’un prêt hypothécaire pourrait permettre de contrôler les paiements mensuels, même si les taux d’intérêt sont plus élevés. Mais attention: une telle décision a un coût puisqu’elle fait grimper les frais d’intérêt, qui sont payés sur une plus longue période.
Mike Rocha, directeur de l’expérience hypothécaire à la Banque Scotia, souligne que les clients qui renouvellent aujourd’hui et qui ont peut-être obtenu par le passé des taux d’intérêt à moins de 3%, voire 2%, sont confrontés à des taux pouvant potentiellement atteindre plus de 4%.
«Il va certainement y avoir un choc de paiement potentiel avec certains clients», souligne-t-il.
La période d’amortissement est la période pendant laquelle on rembourse le prêt. Cela signifie que pour une hypothèque contractée il y a cinq ans pour acheter une maison avec une période d’amortissement de 25 ans, il reste 20 ans de paiements.
En prolongeant cette période d’amortissement au renouvellement du prêt hypothécaire, il est possible de prendre le solde restant sur le prêt et de le rembourser sur une nouvelle période de 25 ans, voire plus longtemps, selon la situation. Cette décision réduirait le paiement mensuel, mais en raison du temps supplémentaire nécessaire pour rembourser le prêt, les intérêts seront payés sur une plus longue période.
Les emprunteurs qui ont effectué des paiements supplémentaires dans le passé et qui sont en avance sur leur calendrier de paiement initial devraient pouvoir revenir à leur calendrier d’amortissement initial, note Mike Rocha. Cependant, pour prolonger la période d’amortissement au-delà de la période initialement contractée, le processus est un peu plus compliqué.
«Il faut se qualifier, il faut vérifier le crédit. Il peut y avoir une évaluation, cela dépend du prêteur. C’est un processus plus long, c’est certain», dit-il.
Les scénarios de la banque centrale
Alors que ceux qui ont un prêt hypothécaire à taux variable ont déjà vu leurs taux grimper lorsque la Banque du Canada a commencé à augmenter son taux directeur, ceux qui ont des prêts à taux fixe ne verront pas d’augmentation du taux qu’ils paient jusqu’au moment du renouvellement.
Selon les données compilées par Ratehub.ca, les taux hypothécaires fixes actualisés sur cinq ans en juillet 2017 étaient en moyenne de 2,24%. Et même si certains ont pu signer des hypothèques fixes de cinq ans à des taux inférieurs à 2,0% l’an dernier, les offres des grandes banques canadiennes se situent maintenant au-dessus de 4,5%.
Dans son examen du système financier la semaine dernière, la Banque du Canada a noté que la hausse des taux pourrait entraîner un resserrement du budget des ménages.
La banque centrale a lancé un scénario hypothétique dans lequel les prêts hypothécaires à taux variable et fixe de cinq ans souscrits en 2020 et 2021 se renouvelaient à des taux médians de 4,4% et 4,5%, respectivement, en 2025 et 2026.
Dans sa simulation, la Banque du Canada indique que les ménages qui ont contracté un prêt hypothécaire en 2020-2021 verraient une augmentation médiane de 420 $ ou 30% de leurs versements hypothécaires mensuels au renouvellement.
Cependant, la courtière hypothécaire Kelly Wilson, d’Ottawa, note que même si les taux sont aujourd’hui plus élevés qu’ils ne l’ont été ces dernières années, ils restent encore faibles dans un contexte à plus long terme.
«J’ai acheté ma première maison à 21 ans et j’ai payé 8,3%, c’était mon premier taux d’intérêt», se souvient Kelly Wilson, associée directrice de l’équipe Wilson.
Un emprunt moins coûteux que les autres
Kelly Wilson souligne que si le prolongement de la période d’amortissement force à payer des intérêts pendant une plus longue période, il peut aussi permettre de libérer de l’argent maintenant pour aider à rembourser d’autres dettes plus coûteuses, ou épargner pour la retraite, ce qui peut générer un rendement plus élevé que le montant payé en intérêts.
«C’est toujours un emprunt moins coûteux que n’importe quel autre emprunt», rappelle-t-elle.
Mike Rocha ajoute que si la période d’amortissement a déjà été prolongée, il est toujours possible de consolider d’autres dettes à intérêt plus élevé dans son prêt hypothécaire.
«Si on est, de toute façon, pour ouvrir le capot et faire un refinancement, autant en profiter et faire une consolidation de dettes, s’il y a d’autres choses et qu’on a les fonds propres pour le faire», note-t-il.
Mike Rocha souligne qu’il est toujours utile de parler à un conseiller financier qui peut examiner l’ensemble de la situation.
«Un conseiller financier sera en mesure d’examiner de manière holistique la situation financière de la personne, de l’individu, et de pouvoir ensuite appliquer un jugement (qui) a du sens», indique-t-il.