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Olivier Laquinte

Transformation numérique

Olivier Laquinte

Expert(e) invité(e)

La montée du développeur citoyen

Olivier Laquinte|Publié le 18 septembre 2023

La montée du développeur citoyen

Des IA comme ChatGPT sont en mesure de générer du code à partir d’un dialogue en langage naturel. (Photo: Getty Images)

EXPERT INVITÉ. Dans les années 1970, le mouvement «faites-le vous-mêmes» a révolutionné le monde de la construction et de la rénovation. Les bricoleurs, qui n’étaient pas nécessairement des professionnels, ont commencé à réaliser eux-mêmes des projets qui étaient auparavant réservés aux experts. Aujourd’hui, le «faites-le vous-mêmes» représente une source de revenus importante pour les Home Depot, Rona, Canadian Tires et autres bannières du genre. Nous sommes nombreux à envahir les quincailleries le samedi matin.

Aujourd’hui, un nouveau mouvement est en train de prendre forme : le développement citoyen, l’équivalent digital du «faites-le vous-même». Ce mouvement permet aux personnes non techniques de créer des applications et des solutions logicielles sans avoir besoin d’être des développeurs professionnels.

 

Un parallèle intéressant

Il existe un parallèle intéressant entre le mouvement «faites-le vous-mêmes» et le développement citoyen. Dans les deux cas, il s’agit de donner aux gens les moyens de réaliser eux-mêmes des choses qu’ils pensaient impossibles.

Dans le cas du développeur citoyen, ou «citizen developer» en anglais, les outils de développement sans code (low code, no code) rendent le processus de création de logiciels plus accessible et plus facile. Ces outils permettent aux employés de créer des applications et des solutions qui répondent à leurs besoins spécifiques, sans avoir besoin d’apprendre à coder.

Si les applications «sans code» on permit l’émergence de ce nouveau persona, l’IA générative facilite encore davantage la création d’application et l’intégration de différentes technologies. Non seulement il aide les développeurs citoyens à réaliser leurs projets plus facilement, en leur fournissant des suggestions de code, des résumés de modifications, de la documentation ou des tests automatisés. Des IA comme ChatGPT sont en mesure de générer du code à partir d’un dialogue en langage naturel.

Nous avons d’ailleurs eu un exemple récent de ce qu’un développeur citoyen peut faire, lorsqu’un étudiant en ingénierie a développé une application qui permet de recharger sa carte opus, alors que l’ARTM peine à le faire. Bon, je serais très surpris qu’il n’ait pas de connaissance en programmation, ça reste un très bel exemple de ce que des développeurs citoyens peuvent accomplir et de ce qu’il est possible de faire quand on lance une problématique au plus grand nombre.

Lors d’une récente conférence, j’ai raconté l’histoire d’un collègue qui a réussi à développer un prototype de reconnaissance vidéo pour empêcher un chat d’entrer par la chatière lorsque ce dernier a une proie dans la gueule. Il a réussi en utilisant ChatGPT pour générer du code Python et intégrer les différentes composantes du système. Sans l’IA génératif, il n’aurait pas réussi.

Et c’est là que cela devient intéressant pour nos entreprises. Pour peu qu’on leur en donne la chance, les membres de nos équipes peuvent désormais développer et utiliser des applications qui permettent d’améliorer les processus et méthodes de travail. Voir même améliorer les modèles d’affaires.

Certaines grandes entreprises croient tellement à la puissance des développeurs citoyens qu’elles ont décidé d’encadrer la démarche. Lors d’une conférence de Microsoft à laquelle j’ai assisté la semaine dernière, on nous a présenté le cas de Shell, qui compte aujourd’hui plus de 4000 citoyens développeurs qui soumettent des prototypes d’applications pour adresser toute sorte d’enjeux. La première année du programme, plus de 75 applications ont été soumises et, au fil du temps, une des applications développées a permis à la compagnie d’économiser 3 millions de dollars à travers l’optimisation d’un processus. Pas pire si vous voulez mon avis !

À l’image des logiciels Saas (logiciel en tant que service) qui ont mis beaucoup de pression sur les départements TI et créé le phénomène d’informatique fantôme (shadow IT), il est possible que la montée des développeurs citoyens ait des impacts similaires. Pour éviter cela et capitaliser sur la force que représente la créativité de l’ensemble des équipes, j’encourage tous les dirigeants.es TI des à se pencher là-dessus pour réduire l’effet pervers que cela peut avoir, pour plutôt favoriser le potentiel d’innovation des développeurs citoyens.